Un an et demi plus tôt - Cléo
Je remercie un dernière fois Thérèse d'assurer la relève pour l'après-midi et prends la route avec le sourire, pressée de retrouver Maxime, qui a encore la fin de semaine en congés.
Depuis notre retour de vacances et cette discussion houleuse qui a failli se terminer sur ma décision de le quitter, j'ai été quelques peu distante. Bien qu'il ait compris mon besoin de temps car ma confiance en nous a été secouée, je me sens mal de lui imposer ma froideur. D'autant plus qu'il fait des efforts pour relancer notre flamme... Alors, ce matin, j'ai négocié une demi-journée de récup', pour rentrer lui préparer à manger et à mon tour refaire un pas vers lui, pour le bien de notre relation.
Mais quand j'arrive enfin à notre appartement, je n'y trouve que Wave. Je la salue d'une main, distraite, soudain frappée d'une sensation profondément inconfortable.
— Maxime ? appelé-je tout de même.
Rien. Et je ne le trouve pas davantage en faisant le tour des pièces de notre quatre-vingt mètres carré.
Le frigo est plein, il n'est pas en train de promener ma chienne et il ne m'a informé d'aucune virée chez ses parents ou activité de quelconque sorte...
Tremblante, je dégaine mon téléphone et lui écris, pour la première fois en plus de sept ans de couple :
À : Mon Amour
T'es où ?
De : Mon Amour
On est à la Ballastière.
Les larmes se bousculent à mes yeux, tant parce que je me déteste de rédiger ces messages de jalouse possessive, que parce que le tableau se dessine trait après trait. La Ballastière, c'est le spot rêvé pour l'été ; entre baignade et barbecue, c'est un endroit qui rime avec rigolade et maillot de bain. À trente minutes en voiture d'ici, alors que depuis quelques mois Maxime n'a plus que son vélo pour se déplacer.
À : Mon Amour
Qui ça, « on » ?
Je crains savoir.
Pitié que je me trompe.
Que ça ne soit pas lui qui le fasse.
Malheureusement, mes doutes se confirment.
De : Mon Amour
Avec Juju.
Rien qu'elle. Pas « ma collègue Julie » ni même juste « Julie ». L'emploi de son surnom est un coup de poignard dans le cœur. Deux mois que j'entends parler d'elle. Que son prénom apparaît dans ses messages privés. Sa subordonnée d'à peine dix-huit ans, gentille, dont je ne dois pas me méfier. Celle qu'il considère comme sa petite sœur, mais à qui il s'empresse d'écrire dès qu'on a fini de coucher ensemble. Celle à qui il raconte tout, celle à qui il a sûrement raconté notre dispute. Celle à qui il exprime sans doute qu'il a peur de passer à côté de sa jeunesse, et qu'il est coincé dans une relation longue.
Celle avec qui il est seul en ce moment, presque nu, alors que j'ai pris une disponibilité pour passer du temps avec lui.
L'indignation gèle ma peine et, debout dans mon hall, mes chaussures encore aux pieds, je martyrise mon clavier :
À : Mon Amour
Faut qu'on parle, rentre.
De : Mon Amour
On part de là-bas dans deux heures.
Est-il sérieux ?
Sa réponse me provoque une colère monstre. Il est en train de choisir de rester passer du bon temps avec cette gamine plutôt que de me rejoindre alors que nous traversons une crise et que la surmonter nécessite nos efforts communs.
VOUS LISEZ
À mes Toujours
RomanceLa plus triste des séparations n'est que le début du chemin vers la plus belle des rencontres. - Victor Hugo Aigrie par sa rupture et l'année et demi écoulée à enchaîner les rencards, tous plus foireux les uns que les autres, Cléo espère bien passer...
