32 | 𝕊𝕚 𝕓𝕦𝕥𝕖́

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𝔸kim et moi avons dîné dehors après sa réunion des Alcooliques Anonymes. Une fois rentrés chez lui, il m'a proposé, assez maladroitement, de regarder un film en sa compagnie. Mais, en plus de tout le reste, la réponse des flics de Raymondville concernant la mystérieuse disparition de certains éléments du dossier Bellacruz m'a mis de mauvais poil.

J'ai réussi à contenir mon humeur, et la soirée s'est bien déroulée jusqu'ici. Loin de moi l'envie de tenter le Diable. Alors j'ai décliné son offre, prétextant devoir avancer sur mon enquête, avant de le laisser au rez-de-chaussée pour me replier à l'étage.

Je suis soulagé qu'il ait gobé mon excuse. Mais une fois seul dans la chambre d'amis, je fixe l'écran de mon PC sans réellement prêter attention aux informations que j'y fais défiler. Toutes mes pensées dérivent inlassablement vers Akim et combien l'éviter est puéril de ma part. Je dois admettre que j'ai souvent cette tendance à choisir la facilité lorsqu'il s'agit de ma vie personnelle. Mais qu'importent ce que je ressens dans mes moments de vulnérabilité, ou les souvenirs qui s'acharnent à remonter à la surface : il ne se passera plus rien avec Eliakim. Ni ce soir ni jamais.

C'est une certitude. Que ça me plaise ou non, il est le veuf de ma défunte sœur. Le simple fait de le voir autrement serait... problématique. Et déplacé. Une très mauvaise idée, en somme.

Je me targue d'être un homme mature, capable de contrôler ses pulsions. Privilégier mon bon sens ne devrait donc pas représenter un défi insurmontable, même si des sentiments troubles s'en mêlent.

Je cogite devant mon ordinateur jusqu'à me flanquer la migraine et l'heure file, sans que je m'en rende compte. Il est presque 23 h lorsque je descends à la cuisine me chercher un truc à boire. Le silence règne dans la maison, mais à mon retour vers l'étage, je sens une douce brise s'infiltrer par la baie vitrée entrouverte. Intrigué, j'y porte plus d'attention. Quelle n'est pas ma surprise repérer Akim dehors.

Dos au jardin en friche, il est assis dans la fraîcheur de la nuit et tangue lentement sur la vieille balancelle du perron arrière. La lueur froide de la lune éclaire sa peau, accentuant la profondeur de son teint. Les traits de son visage sont détendus. J'aperçois même ses lèvres s'étirer un peu lorsqu'il tourne une page de son livre. Attiré par sa sérénité, je m'avance vers la grande baie vitrée et m'appuie contre l'encadrement.

- Je te pensais déjà au lit.

Captivé par sa lecture, Akim sursaute en m'entendant. Installé dans une position étrange, qu'il trouve sans doute confortable, il lève la tête et pose un pied à terre pour arrêter le balancement de son siège.

- J'y étais, finit-il par confirmer t-il avec un léger sourire. Je ne parvenais pas à fermer l'œil, alors...

Il agite son bouquin. J'opine et tente d'en décrypter le titre pour avoir matière à discussion, mais il me devance.

- As-tu pu avancer comme tu le souhaitais sur ton enquête ?

- Pas vraiment.

Je me gratte le front et soupire de dépit, avant de constater qu'Akim me fixe d'un regard bien trop attentif.

Même si je ne tiens pas à le tenir à l'écart, je redoute que me confier sur un dossier qui me touche autant ne renforce une intimité indésirable. Alors, bien qu'il semble attendre que je développe, je choisis de couper court. Je me redresse en reprenant d'une voix calme :

- Je vais te laisser lire tranquillement. Bonne nuit.

- Attends, Séra, lance-t-il en se levant.

Lèvres pincées, je marque un temps d'arrêt. Les yeux accrochés à moi, comme pour analyser mes moindres mimiques, Akim se lance, non sans hésitation.

Séraphin en mission [MxM | 🔞]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant