Chapitre 17 : « Il est grand temps de rallumer les étoiles. »

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« Look what you just did ! OK I said there were norules anymore, but can you please try to not blow me and my cover off ? Thanks. Besides, it hurts. Yes, I've read worse from our parents,but I never thought you'd be one of them, that you'd hate on me for no reasons too.

- Elinor. »(*)

Je souris devant la mauvaise foi de ma sœur. Elle en avait toujours fait preuve, mais elle atteignait désormais des sommets. Je n'avais, à vrai dire, rien d'autre que des raisons de la détester... Mais, étrangement, je ne la haïssais pas.

Après une bonne nuit de sommeil, cependant, j'étais désormais persuadée de n'avoir dit que la plus stricte des vérités lors de mon Twenty questions.

C'était un beau matin ensoleillé, et j'étais enfin sortie de ma déprime de minuit. Tout le monde la connaît : Vous avez été bien toute la journée, souriant, entouré de visages amicaux... Mais là, il est minuit passé, il fait noir et vous êtes seul. Vous voudriez dormir mais, à la place, dans votre tête tourbillonnent toutes les raisons pour lesquelles vous savez que vous ne valez rien, que vous êtes insignifiant, et que vous brisez tout ce que vous touchez. Vous vous répétez à quel point votre vie est affreuse, et que ce n'est pas seulement l'univers qui est contre vous, mais aussi vous qui êtes incapable de vivre.

Vous réalisez que jamais vous ne connaîtrez la passion, jamais vous ne connaître le bonheur pur et parfait auquel les hommes aspirent depuis des millénaires.

Si ridicule que le nom dont je l'ai doté puisse la faire paraître, la déprime de minuit peut être grave. J'avais entendu parler d'une qui fille qui s'était brisée un soir sans raison apparente, et qui ne s'en était jamais remise... La déprime de minuit est la Némésis de l'homme, elle vient lorsque vous vous y attendez le moins... et c'était ce qui m'étais arrivé tout le jour, pendant toute la semaine passée. Mais il faisait jour, désormais. Presque assez pour que je puisse couvrir Ain't No Sunshine, un recueil de textes et de dessins que je tenais depuis des années, de paroles joyeuses, pleines d'espérance.

J'allais mieux. La veille, j'avais préféré prendre la fuite deux fois de suite que de m'abandonner à la seule personne qui comptait vraiment... Peut-être avais-je juste été lâche, mais peut-être, aussi, avais-je seulement fait du mieux que je pouvais, dans une vie qui ne semblait alors plus m'appartenir.

J'avais réellement été, comme je l'avais annoncé à Catherine, un funambule qui avançait à l'aveuglette... Et pourtant. Pourtant je savais que je devais arrêter de me plaindre. Mais c'était plus facile à dire qu'à faire. Après tout, j'avais un réel talent pour blâmer les autres, et les faire culpabiliser pour mes propres insécurités... Je réalisai enfin qu'il était grand temps que j'arrête de me cacher et de me plaindre ; que je recommence enfin à régner sur ma vie. Même à l'aveuglette. Si je n'étais pas le centre du monde, j'étais, ou j'aurais dû être celui du mien. Il était temps que je me lève pour moi-même, que je réagisse.

Il est grand temps de rallumer les étoiles, aurait dit Apollinaire.

C'est pourquoi, pour la première fois de la semaine, j'étais de la meilleure des humeurs dès mon réveil. Je me forçai à boire le smoothie que m'avait concocté Léo avec amour, avalai rapidement un croissant qu'Elaine était allée chercher le matin-même. Celle-ci, d'ailleurs, arriva dans la cuisine, sublime avec ses cheveux emmêlés, sa moue boudeuse et un vieux tee-shirt gris que John avait laissé ici.

Soudainement, j'eus beaucoup de peine pour elle, qui continuait à mettre ce qui lui rappelait probablement douloureusement qu'elle avait joué à la plus conne, et perdu celui qu'elle aimait. Le premier pas de ma rédemption, décidai-je, serait d'expliquer à Elaine, dans la mesure du possible... Oui, mais expliquer quoi, exactement ?

April By NightOù les histoires vivent. Découvrez maintenant