Chapitre 5 "Semaine mouvementée" / Partie 1 : HAINE

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AVRIL

Il y avait des jours où maman sortait de la salle de bain en portant des lunettes de soleil.

Je demandais :

- Ça va, maman ?

- Joue avec ta grande sœur Avril, s'il-te-plaît.

Sa voix était sombre, même à cinq ans, je comprenais qu'elle avait besoin de silence. Je me taisais pour lui faire plaisir. J'attendais qu'elle aille mieux. Que maman sorte de la salle de bain sans ses lunettes.

Qu'elle se mette au piano et laisse ses doigts si longs et si fins courir à toute allure. Parfois, elle fermait les yeux ou regarder devant. Loin devant. Elle se perdait au son de la musique. Alors je me glissais tout près, sans bruit. Je faisais attention à ne pas la déranger. Oh non ! Quand maman jouait aussi légèrement, je voulais qu'elle reste comme cela pour toujours. La musique sortait d'elle pour rentrer en moi. Nous ne formions plus qu'un et notre monde était beau. J'en profitais de ces instants car ils étaient rares.

Une fois, maman s'était énervée parce que j'avais dit que sa musique était triste. Elle avait refermée sèchement le piano. Je l'avais regardé replacer le napperon et la plante. Epousseter le tabouret, le remettre en place et dire d'une voix sombre :

- Viens, ton père va bientôt arriver.

Des jours comme ça, maman filait à la cuisine et je n'existais plus. Ses mains tremblaient, elle s'énervait, regardait sa montre. Un coup d'œil à la fenêtre, rapide, agaçait. La peur se lisait dans ses yeux.

Alors elle mettait rapidement la table. Elle plaçait les couverts et les verres au millimètre près. Tout devait être impeccable et beau. Nous attendions avec peur cet homme qui était mon père. Si souvent absent la journée, trop présent la nuit.

Maintenant, je le connaissais, ce sentiment qui me liait à cet homme en le voyant. Oui, à cinq ans, on ne le nomme pas facilement.

Mais maintenant, son nom me venait vite à l'esprit c'était de la haine qui me contenait.

Ses coups revinrent vite dans ma mémoire, ses insultes aussi.

Je me réveille en sursaut au beau milieu de la nuit. Mon regard est flou et j'ai le corps rempli de sueur. Les yeux verts remplis de haine de mon père me dévisagent un instant en face de moi, ils s'envolent quand mon esprit me confirme qu'ils ne font encore que partis du cauchemar.

Je sursaute lorsque j'entends un murmure à ma droite, souffler mon prénom :

- Avril ? Ca va ?

J'ouvre ma bouche de stupeur en découvrant Romain. Trop sonnée, je ne me souvenais pas de l'avoir convié à dormir avec moi. Romain semble comprendre mon amnésie soudaine, car il chuchote :

- Tu m'as demandé de dormir après la crise que Jim a fait lors du dîner...tu as eu peur et tu n'es pas arrivée à maîtrisé la colère de Jim, alors tu m'as appelé. J'ai fait aussi vite que j'ai pu, mais Jim a eu le temps de casser davantage la vaisselle de ta mère, de lui crier également dessus toute sa haine quand celle-ci est revenue de son déplacement professionnel. C'est un peu parti en couilles entre vous trois, mais en élevant la voix, j'ai réussi à calmer un peu toutes ces embrouilles.

- Où...où est ma mère ? j'ai demandé, en me massant les tempes.

- Elle doit dormir, elle a donné deux somnifères à Jim pour avoir la paix.

Je me suis assise sur le rebord de mon lit pour reprendre totalement mes esprits.

Des somnifères...voilà ce qui nous permettait quelques fois de dormir sans se souvenir de lui...

(Fiction Tome 1) Doutes et harcelementsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant