Le choix

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Depuis plusieurs jours, Elora était tendue. Elle craignait ce qui allait arriver. Pourquoi avait-il fallu qu'elle aille cueillir des framboises dans la forêt ce jour-là ? C'est vrai qu'elle n'avait pas pu prévoir la rencontre qu'elle ferait. Ce souvenir hantait ses pensées. Elle revoyait sans cesse la scène : Un cerf sautant au-dessus d'elle avait faillit la blesser, elle s'était écartée... Pour voir alors le prince et ses chiens. Il lui avait demandé si elle n'était pas blessée. Elle avait répondu un simple "Non". Le prince lui avait demandé son nom et elle avait vu dans son regard bleu-ciel une lueur de convoitise, inquiétante et charmeuse à la fois. Se disant qu'elle rêvait et que ces yeux ne possédait rien d'étrange, elle avait fait l'erreur de répondre et de lui dire la vérité. D'un air heureux il lui avait soufflé :

- Vous êtes magnifique.

Elora s'était alors aperçue que cette lueur n'était pas une hallucination. Paniquée par les conséquences que cela pouvait avoir, elle s'était enfuie.

Depuis, elle attendait, les nerfs crispés, l'éventuelle lettre qu'elle allait recevoir. Pour ne pas inquiéter sa famille, elle ne lui avait rien dit.

- Ma chérie, cria sa mère sur le pas de la porte, un message important pour toi !

" Oh non ! pensa la jeune fille"

Lentement, elle descendit les marches de l'escalier de bois reliant sa chambre à l'entrée. Sa mère lui tendit un rouleau scellé avec, en lettres rouges, le mot "Important" soigneusement écrit en arabesques.

Le père d'Elora avait beaucoup souffert d'être illettré, un des plus grands cadeau fait à sa fille chérie était donc l'instruction. Un luxe qui l'avait endetté mais Elora, en échange, travaillait dans un atelier de scribe, ce qui lui rapportait un peu d'argent pour rembourser les dettes de son père. De plus elle lui apprenait tout ce qu'elle savait, c'est-à-dire lire, écrire, les mathématiques, les sciences, l'histoire, le féerique, le dalinathique (langue des nains, le nain se disant Dalina dans sa langue) et même la gemmologie (l'étude des pierres précieuses). Évidemment, en vrai paysan, il ne comprenait pas toujours ce que sa fille lui racontait mais l'écoutait patiemment, admirant la mémoire de la jeune fille. Le professeur d'Elora avait même accepté de baisser ses prix en voyant l'intelligence de son élève. Elora était une jeune fille assez étonnante. Bien qu'aimant apprendre, elle aimait aussi les balades dans la forêt et le travail des champs. Seulement, ses mains étaient fines et délicates, elles supportaient mal cette vie paysanne.

Sa vie était plutôt heureuse, hormis sa sœur aînée, une vraie peste. Baiti, haïssait Elora pour la simple raison qu'elle était jalouse. Jalouse tout d'abord de son instruction, qu'elle n'avait jamais eu, jalouse de la nette préférence de ses parents pour la dernière car Baiti était insupportable et pour finir, jalouse de l'intelligence de la cadette. Lorsque celle-ci, comprenant le désir de son aînée de s'instruire, lui avait donné des cours, Baiti n'avait rien compris et cela, malgré les efforts de sa sœur. Elle avait une carrure faite pour la vie des champs, pas une tête pour l'étude. Au bout de deux mois, Elora avait abandonné, ce qui avait rendu encore plus furieuse son aînée. Dès son enfance, Baiti s'était montrée caractérielle et vicieuse, accusant les autres enfants d'une faute qu'elle avait commise. Ses parents avaient essayés de se montrer plus tendres et attentifs, elle n'avait fait qu'en profiter d'avantage. D'ailleurs elle ne restait chez elle que parce qu'elle n'avait pas le choix et que c'était les seules personnes capables de l'accepter pour un travail. À chaque fois qu'elle avait tenté de se faire embaucher chez d'autres paysans, son caractère l'avait aussitôt fait refuser. Fille et sœur insupportable, tout le monde la dédaignait.

Les autres frères et sœurs d'Elora l'adoraient. Il y avait Gaïan, juste après Baiti, aussi studieux que sa cadette, il la chérissait tendrement, puis Lomi et Lana, les jumelles travailleuses et habiles de leurs mains, particulièrement pour la poterie, suivait Nossel, le portrait de son père et enfin Moala qui avait à peine un an de plus qu'Elora. Elles s'entendaient parfaitement, quasiment autant que les jumelles. En revanche, leurs physiques différaient totalement. Moala était plutôt le type de beauté brut avec ses cheveux d'or, ses yeux de jade, son visage en ovale parfait, sa bouche pulpeuse, son teint presque aussi blanc que la neige et ses formes voyantes. Elora avait plus de charme, de grâce, ses cheveux étant d'un noir profond, ses yeux bleu-foncé, son visage d'un ovale quelconque, son teint mat et sa bouche assez commune. Quand aux formes, elle n'en possédaient quasiment pas. C'était une elfe assez banale en soit, si ce n'est l'aura de grâce, de légèreté qui émanait d'elle, particulièrement lorsqu'elle se mouvait. On aurait dit qu'elle flottait. Les deux sœurs étaient aussi magnifiques l'une que l'autre, bien qu'ayant des beautés presque contraires. C'était donc une joyeuse famille de six enfants, si l'on élimine Baiti, qui vivait en parfaite harmonie.

Elora Tome 1 : La MarqueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant