Chapitre 17

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- Je ne veux pas vous parler de moi. Je ne sais même pas ce que je fais ici, sincèrement. Vous me trouvez bizarre ?

- Qu'est ce qui vous a poussée à venir, alors ? Non, il n'y a rien de bizarre dans ce que vous décrivez. Vos réactions sont parfaitement normales et justifiées. Vous vous débrouillez très bien, pour une première fois.

- Comment suis-je supposée savoir ? Pourquoi je suis là ? Je ne le sais pas moi-même. Et... merci, merci.

Elle rit. Cette idiote rit. Qu'y a-t-il de drôle ? Je suis venue pour qu'on mette fin à ma souffrance, pas pour que l'on se foute ouvertement de moi.

- Je crois que je vais y aller. Cela vaut mieux.

- Et pourquoi cela vaudrait-il mieux, mademoiselle Johnson ?

Je prends de grandes respirations. Même le plus inculte de tous les incultes pourrait s'apercevoir que je suis sur le point de la frapper. Non ?

- Moins fort s'il vous plaît, je vous entends d'ici.

C'est certain. Je vais la tuer. Est ce que j'ai l'air de rigoler ? De trouver ce moment marrant ? Vraiment ? Depuis que je suis entrée dans ce salon-salle d'interrogatoire, je me sens mal, toute chose. Elle ne lit pas en moi, non, elle devine, elle fait des hypothèses. Je devrais partir sans payer. Mais non. Quelque chose me retient. Je ne saurais dire ce que c'est. Aucune idée, pas la moindre. Et pourtant j'ai des envies de meurtre sur cette psychologue. Je suis chez le psy. Je comprends maintenant ce que voulait dire Thibault en se justifiant. Nous ne sommes pas fous. Nous voulons aller mieux. Et c'est peut-être cette idée de remettre son bonheur et sa santé mentale entre les mains d'une tierce personne qui parait si dénuée de sens. Ainsi, je suis dérangée. Parfait. Il ne manquait lus que cela à mon palmarès... Et une condamnation pour homicide volontaire.

- Vous comptez me prendre pour une imbécile encore longtemps ?

- Oui. Jusqu'à ce que vous vous décidiez à me dire ce que vous faites dans mon cabinet.

- Vous êtes une psychologue. Vous êtes censée savoir ce que je fous là. Vous êtes payée pour.

- Je suis payée pour conseiller ceux qui en ressentent le besoin, pour les écouter. Pas pour deviner les motifs de leur présence.

- Je suis venue pour être heureuse.

Elle me regarde longuement, une expression de surprise très mal masquée scotchée sur son visage. Contente ?

- Je n'ai pas le secret du bonheur.

- C'est super. Tout ce que je veux, c'est que vous me disiez comment oublier. Tout oublier. Pour repartir de zéro.

Silence. Je suis impressionnée. C'est donc de cette manière qu'elle compte me soigner ? En me laissant dialoguer toute seule ? Pas mal, pas mal.

- On n'oublie rien. Jamais. On apprend simplement à vivre avec.

"I least I can say that I've tried to tell you I'm Sorry for breaking your heart but it don't matter it clearly doesn't tear you apart anymore..."

Je reprends mon souffle. Même chanter me semble difficile. Aujourd'hui, je n'ai goût à rien. Les mots ont du mal à franchir le seuil de mes lèvres. Cette psychologue m'a littéralement retiré la dernière parcelle d'espoir qui me maintenait. Qui me maintenant en quoi, d'ailleurs ? En vie ? Certainement pas.

"- On n'oublie rien. Jamais. On apprend simplement à vivre avec."

Je me demande si j'ai eu une bonne idée en allant voir cette femme. Les brunes sont étranges. Toujours à poser des questions.

GoneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant