Chapitre 13, partie 1

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Louis.

Louis se réveilla à treize heures le jour suivant avec un lit vide, sept appels manqués, et onze sms. Il éteignit son téléphone à nouveau, prit une douche et essaya de ne pas remarquer que tout dans son putain d'appartement sentait Harry Fucking Styles.

Dès qu'il fut habillé, il ramassa sa clé supplémentaire sous le paillasson et la rangea dans le tiroir de la cuisine.

C'était dimanche, le premier jour des vacances de Pâques et tout à quoi Louis pouvait penser, c'était qu'il avait deux semaines devant lui sans rien à faire et nulle part où se cacher jusqu'au début du troisième trimestre.

Il repensa à la nuit dernière, tant à l'histoire avec Harry qu'au reste. Il se souvenait de Zayn et Liam au premier rang, ce dernier tout sourire en regardant le spectacle et Zayn tout sourire en regardant Liam et il se dit qu'au moins la moitié de ses sms devaient être de Zayn rabâchant à quel point il sentait que les choses avançaient avec Liam, mais il ne pouvait supporter ça aujourd'hui. Il se souvenait de Niall captant ses yeux à un moment au milieu du ramassage des costumes et de son regard, prudent, compatissant et incertain, il savait que celui-ci devait être au courant pour le stage donc c'était probablement aussi le cas de Zayn. Ils s'inquiétaient sûrement pour lui par dessus tout ça, et il ne pouvait vraiment pas le gérer.

C'était simple, du coup. Il devait se casser de Manchester.

Il bourra un sac d'affaires venant du fond de son placard et de l'arrière de ses tiroirs, celles qui n'avaient jamais été touchées par Harry, sa brosse à dent, une paire de chaussures en plus et appela sa mère depuis la voiture, Duchess feulant dans sa caisse à l'arrière.

« Surprise ! » dit-il, espérant que sa voix ne semblait pas aussi hystérique qu'il l'imaginait. « Je rentre pour les vacances ! »

« Que s'est-il passé mon amour ? » demanda sa mère immédiatement. Foutue intuition maternelle. C'était tout bonnement terrifiant. « Est-ce que tu vas bien ? »

« Oui oui, maman. » mentit-il. « Les filles et toi me manquez, c'est tout. Je suis déjà en chemin, je devrais être là dans une heure. »

« Très bien, » dit-elle, clairement peu convaincue. « On en parlera quand tu seras là, boo. »

Louis ne s'embêta même pas à lui dire qu'il n'y avait rien à discuter. Il savait que c'était inutile.

*

Le trajet jusqu'à Doncaster fut pitoyable et interminable, même si il l'avait déjà fait des centaines de fois. Il ne pouvait écouter la radio parce que si il entendait ne serait-ce qu'une chanson d'amour il allait foncer dans un arbre, et il ne pouvait rester assis en silence parce qu'il se retrouvait alors seul avec ses pensées, ce qui était pire. Au final, il alluma une émission stupide présentée par un mec stupide à la voix stupide et ennuyeuse et laissa son cerveau se remplir de coton.

Sa mère devait avoir prévenu les filles de son arrivée, parce qu'à l'instant ou il freina devant la maison, la porte s'ouvrit avec fracas et les jumelles le tirèrent hors de la voiture comme elles le faisaient toujours depuis qu'ils étaient petits, riant, criant et lui montant dessus en essayant de se faire porter. Il lutta avec elles, en faisant attention de ne pas les laisser entrevoir clairement ses yeux.

« Vous deux faites presque la même taille que moi maintenant, ça n'est vraiment plus un combat juste ! » dit Louis en gloussant derrière elles. Il s'empara de son sac dans le coffre et laissa Daisy transporter Duchess et les suivit dans l'allée.

À peine après avoir passé le pas de la porte derrière Phoebe, et Louis pouvait entendre les filles piailler dans la maison, hurlant de chambre à chambre.

« Lottie, descends dire bonjour à ton frère ! » hurla sa mère.

Il resta dans l'entrée un moment, sentant le vieux sol familier sous ses pieds. Il avait toujours été bon pour garder la douleur en lui. Il avait toujours possédé ce don pour l'empacter fermement et la cacher derrière des blagues et l'illusion qu'il savait toujours ce qu'il faisait. C'était un talent qui avait toujours été une part nécessaire de sa vie, et cette maison le savait. Ça tombait bien qu'il soit de retour. Une nouvelle chose à dissumuler sous les lattes du plancher.


« Voilà mon garçon, » dit sa mère en arrivant dans le hall. Il l'attira dans un calin écrasant et Louis sentit son corps fondre sans sa permision. « Oh tu m'as manqué. »

« Tu m'as manqué aussi Maman. » croassa Louis. Merde, merde, il sentait ses yeux le brûler. Il allait toujours bien, toujours bien, jusqu'à ce que sa mère le serre dans ses bras.

« Uh-oh » lâcha-t-elle. Elle fit un pas en arrière, le prit par les épaules et scrutant intensément son visage. « Je le savais. Que s'est-il passé ? »

« Rien. » dit Louis, haïssant sa voix pour s'être brisée au milieu du mot.

Elle cligna des yeux, une ride entre les sourcils et Louis mordit l'intérieur de sa joue pour se ressaisir. « As-tu perdu ton travail ? »

« Non, maman, j'ai pas perdu mon travail. »

« Est ce que ton père a appelé ? »

Louis se mit presque à rire, parce qu'il n'avait pas parlé à son père depuis un an. « Non, il n'a pas-- »

« C'est un garçon ? »

« Non, Maman. » Il se détacha de son emprise. « Je vais bien. Il n'y a pas de problème. Vous m'avez manqué, c'est tout. »

Sa mère n'avait pas l'air de le croire une seconde, mais avant qu'elle ait une chance de relancer le sujet, Lottie trottina dans l'escalier.

« Je t'ai manqué moi aussi ? » Demanda-t-elle.

« Jamais. » dit il. « Je peux à peine supporter de te voir en fait. »

« C'est réciproque. » dit-elle, puis elle sourit et lui fit un de ses câlins caractéristiques. Il capta le regard de sa mère par dessus l'épaule de sa sœur, y détecta sa préoccupation, mais ensuite il fut entouré par ses sœurs et leurs caquettements donc c'était plus qu'assez comme distraction.

C'était facile de s'imiscer dans la vie d'ici, de recommencer exactement où il s'était arrêté. Malgré des années à avoir vécu par lui même, il ne savait toujours pas cuisiner, mais il pouvait se tenir dans la cuisine et nettoyer le désordre pendant que sa mère le faisait, il pouvait arbitrer -ou provoquer- les querelles autour de la table à manger, et il pouvait forcer ses soeurs à accomplir sa part de lessive. Il ne pouvait prétendre que rien n'avait changer, cependant, que les jumelles n'avaient pas à être rappelées de mettre un couvert pour lui. C'était normal, pourtant. Ça avait été son choix de partir. Il serait la dernière personne à demander aux gens qu'il aimait de garder une place pour un fantôme dans leur vie.

Une par une -ou deux, dans le cas des jumelles- ses sœurs montèrent se coucher, avec les remontrances de leur mère pour qu'elles se brossent les dents et se lavent le visage. C'était la routine, ennuyeux et chez lui, et Louis souhaitait qu'il y ait toujours une brosse à dent bleue l'attendant en haut, car adolescent il était toujours inquiet en allant chez le dentiste et mentait en disant utiliser du fil dentaire.

La chose triste c'était le cas, en fait, quand il y réfléchissait. Il s'inquiétait toujours pour le dentiste, et il s'inquiétait pour sa douleur cardiaque, et il s'inquiétait pour son loyer, et personne ne lui avait dit que les inquiétudes de l'enfance ne seraient en fait pas remplacées par celle de l'adolescence et de la vie d'adulte. Elles ne faisaient que de s'accumuler, et parfois le poids de chaque version de lui même d'un coup était trop.

Ce fut ainsi qu'il termina dans la chambre de sa mère, allongé avec elle dans le lit à regarder une émission pourrie, à la façon Tomlinson. Il ne pouvait compter le nombre de fois où ils avaient fini comme ça, quand l'un ou les deux avaient besoin d'un espace pour s'effondrer mais ne pouvait se permettre de le faire réellement. Ils étaient blottis sous les couvertures, chaudes et insulaires et Louis n'avait rien écouté de ce que la télé pouvait raconter depuis les dernières quinze minutes mais était ravi du bruit. Ça le faisait se sentir en sécurité, ici dans cette chambre dont le décor n'avait pas changé depuis ses dix ans, assez en sécurité pour ouvrir sa bouche sans anticiper ce qui allait en sortir.

« Maman, » commença-t-il. « Je vais te demander quelque chose, et je ne veux pas que tu penses que c'est genre, un appel à l'aide pour quoique ce soit. Je veux vraiment savoir. Donc sois honnête. »

« Oh Seigneur. » lâcha-t- elle. Elle repêcha la télécommande depuis les couvertures et désactiva le son de la télé. « Très bien. »

Il prit une inspiration, triturant les franges de la tête de lit se sentant incroyablement stupide et petit même s'il s'agissait de sa mère, la personne au monde avec c'était toujours sûr de baisser sa garde.

« Es-tu fière de moi ? »

Elle se tourna pour le fixer, surprise. « Bébé, » dit-elle, allant chercher sa main. « Pourquoi voudrais tu même demander ça ? »

« Je sais pas maman, » dit Louis. Il retira sa main et remonta ses genoux contre sa poitrine. « Peut-être parce que je n'ai jamais rien fait pour que ce soit le cas, ou parce que je suis émotionellement niqué, ou parce que je n'ai pas pu rester ici pour aider avec les filles, ou pour toute l'histoire avec papa, pour parce que je ne vais probablement jamais- »

« Louis. » l'interrompit-elle, et il tomba dans le silence. Elle se redressa de manière à être assise avec le dos contre la tête de lit à côté de lui, et pris son menton dans sa main, le forçant la regarder dans les yeux. « Tu es mon garçon. Tu es le seul fils dont j'ai jamais rêvé. Il n'y a pas un moment de ta vie dont je n'ai pas été fière. Okay ? »

Louis hôcha timidement la tête, le visage de sa mère s'adoucit et elle le serra contre elle afin que sa tête repose sur son épaule. Il ferma les yeux, sentant ses cheveux lui caresser le visage et respirant l'odeur du détergent qu'elle utilisait chaque jour depuis son enfance, et déglutit autour de sa gorge enflée.

« Tu es mon garçon, » dit-elle à nouveau. « Et je te connais mieux que n'importe qui sur Terre. Peut-être que tu ne sais pas ce que tu traverses en ce moment, peut-être que tu ne veux pas me dire ce que c'est pour l'instant, mais je te connais. Et je connais ton cœur, et je sais que tu iras bien. Tu vas toujours bien. »

« J'ai pas l'impression. » lui dit il. « C'est comme si je n'allais jamais bien. »

« Je sais bébé, » dit elle en lui pressant l'épaule. « Je ne pense pas que tu réalises à quel point tu es fort. »

« Peut-être. » Il voulait tellement la croire, mais il n'y arrivait pas.

Il se souvenait quand il était plus jeune, quand c'était si simple de croire ces choses que sa mère disait, avant qu'il fut témoin de l'implosion de son mariage, qu'il soit quitté par deux pères et eut son propre cœur arraché, retourné et piétiné. Il se rappelait comment elle avait l'habitude de lui dire que les choses s'arrangeraient toujours pour le mieux, qu'il la croyait, et ça rendait les choses supportables.

Il la laissa lui caresser les cheveux en silence, puis il lui demanda d'une petite voix. « Est-ce que tu crois toujours en l'amour ? »

Elle rit un peu, prise par surprise. « Tu veux toujours que je sois honnête ? »

Louis hésita juste un instant. « Ouais. »

Elle prit un long moment pour réfléchir, plissant ses lèvres en pensant. « Je crois en l'amour. Mais je ne sais plus si je crois qu'on soit tous supposé le trouver, ou le garder pour toujours. C'est compliqué. »

« Ouais. » Il n'y avait plus grand chose à dire. Après un moment, sa mère ralluma le son et ils se réinstallèrent dans le silence. Louis s'endormit ainsi, bercé par des rires préfabriqués et la pensée que si même la plupart des choses s'estompaient, cela durerait probablement pour toujours.

These Inconvenient Fireworks (Larry)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant