Chapitre 16, partie 3

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Louis.

Ils ne s'adressèrent pas un mot, pas durant le trajet jusqu'à la gare.

À chaque fois que Louis regardait dans le rétroviseur, il apercevait un bout du sac en toile d'Harry à l'arrière.

Le silence était suffocant. Il pensa à allumer la radio, mais ne pouvait supporter l'idée de s'approcher de l'autre côté de la voiture. L'espace personnel d'Harry semblait s'être étendu pour remplir tout l'habitacle sauf le siège conducteur et Louis ne pouvait se résoudre à le pénétrer. Même respirer semblait être une violation. Il était un trou du cul. Jésus. Il était un tel trou du cul. Harry était un trou du cul, aussi. Tout le monde était un trou du cul. La planète était un trou du cul géant.

Il s'arrêtèrent à un feu rouge. Louis baissa les yeux sur ses doigts sur le levier de vitesse, regarda la main vide d'Harry sur sa gauche. L'impulsion était forte, mais ensuite le feu passa au vert et les mains de Louis étaient à nouveau occupées.

Il avait pris le chemin le plus long, mais Harry ne fit pas de commentaires. Peut-être qu'il ne connaissait pas assez bien la ville pour s'en rendre compte.

Gardant les yeux fixés sur la route, il ne pensait pas avoir déjà conduit aussi prudemment de toute sa vie. Du moment qu'il ne faisait que passer d'une tâche à une autre - accélérer, mettre le clignotant, freiner tranquillement, prendre à droite - il ne pensait pas à l'endroit où ils allaient. Il s'attendait à moitié à ce que les règles du code de de la route aient changées aujourd'hui, parce qu'il n'y avait pas moyen que tout soit normal alors que ça se passait, alors que la vie de Louis s'effondrait dans un endroit précis à dix minutes de là. Mais tout fonctionnait comme ça l'avait toujours fait, les feux passant du rouge au vert réglés comme des horloges et la circulation assez fluide même s'il y avait un véhicule de quatre vingts tonne empilé dans la tête de Louis.

Peut-être que c'était tout le temps comme ça, pensa-t-il oisivement. Il se demanda combien de personnes il croisait dans la rue tout les jours qui passaient le pire jour de leurs vies. Il ne put dire si c'était déprimant ou rassurant, que le plus grand désespoir d'une personne ne fasse à peine une onde dans le monde. Là, c'était comme si l'apocalypse n'avait d'importance pour personne hors de cette voiture.

Un dernier virage et il ne pouvait prétendre que toutes ces petites actions ne s'ajoutaient pas au reste, parce qu'ils étaient à la gare. Louis n'avait pas l'impression d'être conscient des décisions qu'il prenait lorsqu'il bougait ses mains, appuyait sur les pédales, mais sa voiture s'insérait dans le parking sans même un soubresault.

Il gara son véhicule et Harry ouvrit la porte avant même que Louis n'ait mis le frein à main. Il sentit ses jambes bouger sans qu'il soit au courant de de ce qu'il faisait, et se retrouva dehors. Il contourna la voiture alors qu'Harry s'avançait vers le coffre et sortit son sac.

Il ferma la porte. Louis mit les mains dans ses poches.

« Et bien. » dit Louis. « Bonne chance, j'imagine, même si tu n'en auras pas besoin. » il força ses yeux à rencontrer ceux d'Harry. S'il n'était pas capable de dire quoique ce soit d'utile, il pouvait au moins faire ça.

Le soleil de la fin d'après midi faisait briller les yeux d'Harry alors qu'ils parcouraient frénétiquement le visage du plus âgé.

Il s'approcha et attrapa le tshirt de Louis, l'attirant contre le lui il s'adossa contre la voiture, coincé entre le plus âgé et le véhicule puis l'embrassa violemment.

Louis était déséquilibré mais s'en moquait, il libéra ses mains de ses poches pour s'appuyer contre la voiture, un bras de chaque côté d'Harry. Il entendit le fracas du sac heurter le sol, sentit le bras d'Harry enrouler sa taille et le tirer encore plus près. Ses mains sur la surface chaude de la voiture, Louis embrassa Harry comme un homme en train de se noyer.

Harry sentait l'herbe et l'adoucissant de Louis. Il avait le goût de la neige.

Il se retira abruptement, toujours coincé entre les bras de Louis. Il plia les genoux pour attraper son sac, se leva et planta un bisou brutal sur sa joue. Puis, il passa sous le bras de ce dernier et marcha en direction de la gare, laissant Louis fixer son propre reflet dans la voiture.

Louis se retourna et le regarda partir, essayant futilement de mémoriser la démarche d'Harry, la ligne de ses épaules, la courbe de sa taille. Il n'avait pas eu pas assez de temps. Il n'aurait jamais assez de temps.

Puis il fut hors de vue, glissant hors de son champ de vision aussi facilement que le corps d'un parfait étranger. Comme s'il était quelqu'un d'autre.

C'est le moment où je devrais lui courir après, pensa Louis, puis il se tourna, déverrouilla sa voiture avec des mains tremblantes.

*

Louis retourna à son appartement, ferma la porte à clé, fit de même avec son balcon, tira les rideaux et ne parla à personne durant une semaine.

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Mmmh .. Une seule chose à dire : Avez-vous envie de pleurer maintenant ?

These Inconvenient Fireworks (Larry)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant