11. Sioban sèche les cours

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Mia vit Sioban monter les escaliers menant aux chambres. Discrètement, profitant d'une heure d'étude, elle la suivit.

Lorsqu'elle rouvrit la porte derrière Sioban, celle-ci ne se retourna pas.

_ Tu n'as pas cours ?

Sioban s'assit en tailleur sur son lit.

_ Si. Mais... je ne me sens pas très bien.

_ Mince !

Elle s'assit en face, sur son lit.

_ Et tu penses que tu vas pouvoir finir la journée ?

Il ne leur restait que deux heures, ce devait être faisable, mais Sioban secoua la tête.

_ Non. Je pensais rester ici.

_ Oh...

_ J'ai une heure d'étude, si tu veux je peux rester ?

_ Non, c'est bon.

Voyant que Mia n'était pas convaincue, Sioban ajouta :

_ Je vais me débrouiller. Ce n'est pas si grave. Et puis Manon va être toute seule.

Mia ne savait pas vraiment comment interpréter cette déclaration. Sioban semblait... jalouse ? Sans le montrer, en tout cas. Était-elle blessée ? Se sentait-elle abandonnée ? Ou peut-être préférait-elle sincèrement rester seule... Dans ce cas, Mia ne pouvait pas se permettre d'insister.

_Bon... dans ce cas, je m'en vais. Mais tu sais...

_Quoi ?

_ Non. Rien.

Mia ouvrit la porte, et se retourna, pour finalement dire ce qu'elle avait sur le cœur :

_ Manon est une une amie à qui je tiens beaucoup. Toi, c'est différent. Ce n'est pas la même chose, tu comprends ? J'ai besoin d'être soutenue par elle, toi...

_ Tu n'as pas besoin de me soutenir. Tout va bien.

Mia baissa les yeux, ne sachant plus quoi ajouter pour la faire changer d'avis, puis partit.

Décidément, elle se sentait si inutile. Que pouvait-elle faire de plus ? Sûrement beaucoup de choses auxquelles elle se voulait de ne pas avoir pensé.

_ Mia, ça va ? S'inquiéta Manon.

Elle s'assirent l'une à côté de l'autre, sur un banc de la coure, et posèrent leurs sacs par terre.

_ Je crois que j'aime, lâcha Mia.

_ Tu aimes ?

Elle hocha la tête.

_ Qui ?

_ Sioban... je ne sais pas, c'est étrange ! En général, quand tu te fais des amis, tu rencontres une personne, sans le faire exprès, sans rien prévoir, simplement par hasard. Puis tu t'y attaches, au fil du temps, tu apprends à le connaître, et tu l'apprécies. Cette personne finis par compter pour toi. Et là... je ne la connais pas, je ne sais rien d'elle, ni de sa vie, ni de son caractère ! Pourtant je veux...

_ Tu veux ?

_ Je ne sais pas... c'est comme si pour moi, elle comptait déjà comme quelqu'un de très important. Alors j'aimerais...

_ Que ce soit réciproque, termina Manon.

Oui. C'était ça. Mia voulait compter aux yeux de Sioban, elle voulait avoir la chance de mieux la connaître, ainsi Sioban ferait sa connaissance également. Sioban pourrait l'aimer, comme elle l'aime. Elle pourrait peut-être s'inquiéter pour Mia autant que Mia s'inquiète déjà pour elle.

Le soir, lorsque les filles mangèrent toutes réunies, Nowait remarqua l'absence de Sioban.

_Tiens ? Elle commence déjà à sécher ?

Bérényce eu un regard hautain.

Si c'était vraiment le cas, et que Sioban n'avait aucune raison valable de ne pas venir en cours, et bien c'était honteux. Elle avait bien remarquer dans la journée que Sioban manquait à l'appel, et elle avait bien réfléchit. Sioban n'était sans aucun doute pas une élève motivée, sinon elle n'aurait pas cette attitude renfermée, et donc elle n'avait sûrement qu'une piètre excuse pour ne pas être venue en cours.

Manon la fusilla du regard.

_Quoi ? Se défendit Bérényce. C'est stupide ! Commencer à louper les cours maintenant ! Et qu'est-ce que ce sera en fin d'année ? Si ça se trouve elle sera virée avant !

Mia se leva d'un coup et hurla :

_ Mais t'en as pas marre d'être aussi conne ?!

Des larmes vinrent perler à ses yeux.

_ Tu...tu ne la connais pas ! Comment peux-tu te permettre de la juger ! Tu ne sais rien d'elle ! Pourquoi tu la rabaisses comme ça !

Bérényce resta bouche bée, comme toutes les filles de la table.

Ne sachant absolument pas comment elle en était venue à ce point d'énervement, troublée, et embarrassée, Mia remonta en courant dans sa chambre.

_ Merde, alors ! Souffla Nowait. Si j'avais su qu'elle pouvait s'énerver à ce point, celle-là !

_Mais... bégaya Bérényce. Je n'ai rien dis de mal !

_ Ah oui ?! S'emporta Manon. On ne t'a jamais dit que descendre les gens c'était mal ?!

_ Mais enfin, arrêtez un peu ! S'écria Bérényce. Vous la défendez tous, mais je vous rappelle qu'elle défend Sioban, dont tout le monde ici présent se fiche éperdument, je me trompe ?

_ Ouais, lâcha Loona, tu te trompes. Parce que que là, tu es en train de parler à notre place, alors qu'en fait, tu n'en sais rien.

La soirée se termina ainsi : en querelle collective. Les filles rentrèrent toutes dans leur chambre, toutes liguées contre Bérényce. Sauf Nowait, qui n'était pas en colère, mais déçue. Quand elle s'allongea sur son lit sans rien dire, même pas une pique à jeter pour taquiner sa colocataire, celle-ci s'en voulut énormément. Non pas qu'elle changeait d'avis, mais elle aurait préféré que Nowait ne lui en veuille pas. Elle qui paraissait aux yeux des autres si inhumaine, et snobe, elle se souciait réellement de ce que les gens pensaient d'elle. Ou plus exactement, de ce que Nowait pensait d'elle. Qui l'eut cru ? Sûrement pas elle.

Mia ouvrit violemment la porte de la chambre et s'écroula en pleurant sur son lit.

Immédiatement, comme un reflex, Sioban vint s'asseoir à côté d'elle, et allait pour poser sa main sur son épaule, mais renonça.

_Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Murmura-t-elle.

_ Je n'en sais rien ! On... on s'est disputé avec Bérényce ! Mais ce n'est rien.

Elle sécha ses larmes.

_ C'est juste que... je ne sais pas trop où j'en suis, en ce moment...

_ Attends un peu, ça viendra tout seul.

_ Mais j'ai peur de mal agir, en attendant...

Mia regarda Sioban dans les yeux, comme si elle pouvait lui faire passer un message de cette manière, mais elle détourna le regard. Avait-elle peur d'y lire une certaine chose ?

_ Alors agis, quitte à tomber à côté.

Mia fronça les sourcils et secoua la tête.

_ Je ne sais pas si je peux me le permettre.

Non, vraiment, elle ne pouvait pas. Sioban allait mal, et elle ne pouvait vraiment pas prendre le risque d'aggraver sa situation en l'embarrassant de ses sentiments, jusqu'à maintenant encore très indescriptibles et étranges. De plus, si Sioban ne désirait pas d'amie proche, elle ne devait pas aller contre sa volonté. De toute manière, cet acte l'éloignerait encore plus d'elle. Mais dans ce cas, que faire ?



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