Le Tigre

165 19 0
                                    

Un jour passa, puis deux. Puis ce furent au tour des semaines de s'écouler, comme de longs fleuves monotones. De mars, nous passâmes à juin, et de début juin au commencement des épreuves anticipées du Bac.

J'étais tétanisée à l'idée de passer mon écrit et mon oral de Français et littérature. Il en était de même pour les Sciences, mais cette épreuve-là n'était pas aussi importante pour mon cursus que la première.

Les TPE étaient déjà terminés depuis un moment et nous avions présentés notre sujet, Nala un garçon de ma classe et moi, devant un jury composé de plusieurs professeurs de notre lycée. Nous n'avions pas encore les résultats, mais je savais que nous aurions une note largement au-dessus de la moyenne.

Je passai mes soirées et mes journées de libres dans le Sanctuaire, à trimer comme une folle sur mes cours. Nala m'envoyait une cinquantaine de textos par soir pour que nous sortions avec Dylan voir un film en VO, ou que nous allions manger au restaurant chinois.

Je lui répétai inlassablement que jusqu'à la fin des épreuves je vivrai en ermite chez moi et resterai plongée dans mes livres d'étude comme un rat de bibliothèque.

Elle bougonnait un moment puis se joignait à moi pour m'aider à réviser.

Lorsque j'avais beaucoup de chances (laissez-vous imprégner par l'ironie de cette phrase), Dylan rappliquait une heure plus tard et mon Sanctuaire se transformait en cabinet de révision intensif, ponctué de batailles de coussins entre Dylan et Nala, et de rires hystériques lorsqu'un des deux dégringolait de mon lit après s'être reçu un coussin en pleine face.

Autant dire que je n'arrivais pas beaucoup à me concentrer.

Je rappelais à Nala, si cela s'avérait nécessaire, qu'elle aussi allait devoir passer les mêmes examens que moi. Elle se contentait de hausser les épaules et de retourner à son bras de fer avec son petit ami.

Nala n'avait jamais révisé de sa vie. Elle avait toujours obtenu de bons résultats à tous ses contrôles, sans jamais avoir jeté ne serais-ce qu'un coup d'œil à son cours. Et je la détestais pour ça. Je finissais par abandonner mes protestations et arbitrais leurs combats. Et c'est vrai que je rigolais bien.

La veille des épreuves, alors que mon estomac était descendu dans mes chaussettes depuis un moment, Nala me posait des questions sur les cellules et leur façon de se multiplier.

Tout à coup, n'y tenant plus, je pris ma tête entre mes mains et poussai un gémissement lugubre. Enfin je suppose qu'il l'était, parce que la tête de Nala laissait supposer qu'elle avait cru un instant que ma vie était en danger.

-Quoi, qu'est-ce que t'as ? me demanda-t-elle en me relevant le menton.

Je secouai la tête et me frottai le visage, à deux doigt de fondre en larmes. Mes nerfs étaient à vifs, je voyais des molécules danser devant mes yeux, sans parler des spermatozoïdes. J'étais en train de devenir totalement folle à étudier cette fichue bio.

-Rien Lionne Noire, c'est juste que je n'en peux plus. Je suis fatiguée, je stresse et je sais que je vais perdre tous mes moyens demain, devant ma fichue feuille. Je suis en train de me demander si je ne devrais pas me jeter par ma fenêtre, là, tout de suite.

Nala me fixa un instant, perdu dans ses réflexions. Elle finit par ouvrir la bouche :

-D'une part il te serait totalement inutile de te défenestrer, puisque ladite fenêtre se trouve à un mètre cinquante du sol. D'autre part je sais EXACTEMENT ce dont tu as besoin.

Je posai ma joue dans ma main et la considérai avec lassitude.

-Et de quoi est-ce que j'ai besoin exactement, marraine la bonne fée ?

Moi, Louanne, DifférenteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant