Chapitre 1

58 5 0
                                    

J'ai rencontré Emma à la prestigieuse école INSSAD, dont la plupart des grands patrons ou chefs de cabinets ministériels est issue. Les jeunes femmes n'étaient pas légion dans ma promotion et honnêtement, mon projet de carrière déjà bien en tête, je n'y portais pas un très grand intérêt. Je les avais réparties en deux catégories : celles qui ne lâchaient pas leurs notes et semblaient étudier jour et nuit et celles qui étaient de toutes les soirées, se la jouant cool à la recherche d'un mari potentiel ou d'une année sabbatique malgré la sélection drastique à l'entrée. Je ne m'en préoccupais uniquement quand nous sortions pour nous détendre sans jamais prendre les choses au sérieux.

Mais sur une promotion de plus de 250 étudiants, Emma arrivait à se démarquer en deux pas et un regard. Elle ne rentrait dans aucune catégorie. Elle ne courait pas les premiers rangs, ni les derniers, ne cherchait pas à faire de l'esbroufe mais arrivait à mettre un professeur en difficulté en deux questions. Les regards ou invitations ne semblaient n'avoir aucun impact sur elle. Elle venait en cours, participait à la vie de la promotion sans jamais trop s'impliquer et repartait quand elle seule le décidait. Elle sortait de temps en temps avec nous. J'appréciais son comportement pour la simple et unique raison qu'elle ne perturbait pas mes plans de carrière. Je la trouvais rafraichissante. J'avais flirté une ou deux fois à l'époque sans vraiment savoir si je l'accrochais à mon tableau de chasse ou l'inverse.

Elle serait restée un simple bon souvenir si la dernière fois que je l'avais vu avait été lors de la soirée pour fêter la fin de nos études. Elle n'était qu'une simple connaissance. Je ne savais absolument rien de ses plans.

J'avais rapidement repris mes esprits pour passer le concours d'entrée aux renseignements généraux. Les taux de réussite étaient extrêmement faibles alors j'y sacrifiais toutes mes vacances sans le moindre remord pour mes amis et famille que je délaissais. La lettre d'acceptation dans ses services prestigieux fut une délivrance et une réussite dignement fêtée.

Ma première surprise fut le jour d'entrée aux renseignements généraux. Sur 7000 candidats, nous étions 5 à avoir été acceptés et parmi ces 5, il y avait Emma. Je n'avais pu m'empêcher de la dévisager. Elle n'avait jamais mentionné de telles ambitions, ni n'avait mis en avant des résultats exceptionnels. J'avais bien remarqué qu'elle était vive d'esprit mais elle était si indépendante que je n'y avais jamais décelée la moindre volonté de faire carrière. Elle m'adressa un simple sourire en coin.

C'est ainsi que nous commencions à travailler ensemble. Je ne pus que comprendre pourquoi elle avait été reçue au concours d'entrée, et avait même été major de cette année. Elle semblait avoir tout le temps 3 coups d'avance sur nous. Comme je la connaissais un peu, je ne fus pas énormément dérouté par son comportement distant parfois, franchement décontractée à d'autres, mais ce ne fut pas le cas des autres promus qui râlaient dès qu'elle avait le dos tourné. Passée la première surprise, j'avais l'impression de la redécouvrir. Elle avait toujours cette indépendance propre mais dans un but commun, elle était extrêmement coopérative. Il fallait juste arriver à suivre son rythme et ce n'était qu'une question de franche concentration. Je finissais mes journées sur les rotules à vouloir la suivre mais elle était un challenge qui me plaisait de plus en plus. Je réussis même à comprendre des logiques récurrentes dans son raisonnement. Cela ne fit que nous rapprocher.

Nous travaillâmes ainsi pendant plusieurs années, sans vraiment réfléchir à certaines soirées qui se terminaient chez elle ou chez moi. Ce fut lors de l'annonce de la prochaine promotion que je me rendis compte que cette étrange relation était plus qu'un simple flirt.

Elle était particulièrement fatiguée à cette époque. A vrai dire, je n'arrivais toujours pas à comprendre comment elle arrivait à mener de front son travail aux renseignements généraux avec des semaines sans limite d'heures et plusieurs activités sportives à côté. Elle me soutenait que c'était son rythme et j'avais fini par m'y mettre aussi. Sa présence était une vraie source de dynamisme.

MenteuseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant