Chapitre 13

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Je me doutais que s'occuper d'un nouveau né serait compliqué. J'étais loin du compte. D'abord, Mark ne me laissa même pas le temps d'être certain qu'Altara était définitivement tirée d'affaire. Au premier cri de mon fils, il m'entraîna par le souterrain qui partait de la salle d'opération sur plus de deux cent mètres avant de gravir cinq étages. Je me retrouvais dans un studio qui aurait eu besoin d'un rafraichissement où tout ce dont avait besoin un nouveau né avait été installé dans un coin. Si Altara avait toujours joué l'innocente, elle s'était pourtant occupée directement ou indirectement de cet aménagement. Je me retrouvai avec biberon, couches et lait sur les bras sans arriver à retenir Mark qui repartit en courant pour s'occuper d'Altara. Mon fils pleurait. Je n'avais plus qu'à m'exécuter.

La première nuit me parut trop courte. Au petit matin, alors que mon fils s'était endormi sur moi, j'attrapai une couverture et m'enfonçai dans le souterrain. J'avais besoin de voir Altara. Mais quand j'entrai dans la salle d'opération, elle n'était plus là. Je faillis hurler. Mark me fit d'abord signe de me taire en me montrant mon fils. Je ne le lâchai pas d'un regard noir.

« Les gars l'ont amené se reposer à l'abri, m'expliqua-t-il à voix basse. La nouvelle s'est répandue comme une traînée de poudre. Ils ont intercepté deux attaques d'autres clans avant qu'elles n'arrivent ici. Altara pense qu'il vaut mieux se disperser. »

Je sentis mes mâchoires se serrer. La stratégie était logique mais Altara était encore fragile. Je râlai intérieurement, pourtant les choses avaient été claires dès le départ. Ma priorité était mon fils. Mark me demanda d'ailleurs comment nous allions l'appeler. Je retins une réaction trop franche. Nous n'en avions pas discuté. Je lui répondis « Greig » sans réfléchir. C'était le seul nom que je connaissais de l'histoire d'Altara. Mark eut un sourire en coin avant d'acquiescer. Il me tendit des papiers puisque finalement mon fils aurait une existence légale, même si son père était officiellement mort. Il en profita pour me montrer mon nouvel acte de propriété. Altara m'avait cédé à notre fils. Je retins une grimace sans commentaire.

Je pris une chaise et m'assit le regard absent sans réfléchir au temps qui passait. J'étais inquiet pour Altara et je n'avais plus aucun moyen de l'aider. Je ne pouvais que compter sur Mark et tous les gros bras qui lui prêtaient main forte. Elle était vivante mais j'avais l'impression qu'elle m'échappait de nouveau.

Mon fils finit par gesticuler sur moi. Il me surprenait à chaque fois qu'il s'endormait s'y profondément sur moi alors que j'avais l'impression d'être pris dans une tempête intérieure infernale. Je revins dans l'appartement, la mine sombre, et préparai mécaniquement le biberon, perdu dans mes pensées. Je pris mon fils aussi délicatement que possible alors qu'il commençait tout juste à chouiner pour le lui donner. Juste avant qu'il prenne la tétine en bouche, je le retirai d'un mouvement brusque, provoquant cette fois-ci de vrais pleurs. Le lait avait un léger reflet plus foncé que le matin même. J'ouvris le biberon et trempai les lèvres dans ce qui devait être du lait. Je crachai instinctivement et courut me laver la bouche avant d'attraper un anti-poison. Si ce n'était pas de l'arsenic, cela n'en était pas loin. Mon fils hurlait de toutes ses forces. Je reniflai le pot de poudre de lait et l'envoyai directement dans la poubelle en récupérant mon fils dans mes bras. Quelqu'un était entrait dans l'appartement le peu de temps que j'étais allé voir Mark. Je fis d'abord le tour du propriétaire arme au poing avant de prendre finalement en compte les pleurs de mon fils. Je descendis en courant dans la rue. Par chance, une supérette se trouvait juste de l'autre côté de la rue. Il n'avait qu'un seul pot de lait en poudre mais la date de péremption était encore éloigné. L'épicier me jeta un regard douteux, soit à cause des pleurs de mon fils que je tenais maladroitement, soit à cause du billet trop important que je lui donnai pour payer. Je n'avais trouvé que ce genre de coupure dans l'appartement. J'eus juste le temps de traverser la rue avant d'essuyer des tirs. Je montai les cinq étages en courant pour préparer un nouveau biberon. Greig n'en finissait pas de pleurer, sûrement trop serré contre moi. Quand il eut enfin la tétine dans la bouche, buvant goulûment, je fis l'inventaire de tout ce qui se trouvait autour de moi en me mettant en alerte maximum.

MenteuseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant