Chapitre 9

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J'avais réfléchi à ce qu'il me restait de relation avec Altara mais pas à ce que j'allais découvrir. Elle fut pour le moins très peu cordiale. Elle me guida à travers plusieurs rues avant de rejoindre une ville importante. J'avais réussi à me repérer à l'aide de quelques panneaux. Nous étions dans un des pays les plus à l'Est du continent, et surtout l'un des moins regardants envers la mafia. Le choix de s'y replier n'était pas une mauvaise idée. Elle était fragilisée par sa grossesse et elle savait que les renseignements généraux hésiteraient longuement avant d'opérer dans un pays comme celui-là. Elle pouvait s'y promener sans aucune précaution, arme à la ceinture.

Elle me dit de me garer à deux pas d'un palace. Il fallut encore discuter pour que je puisse la suivre à l'intérieur. Je jouai de cette peur qu'elle avait que je me fasse tuer pour la convaincre et j'hésitai à compter le nombre de regard noir que j'allais recevoir aujourd'hui. Je n'étais pas très content qu'elle soit aussi craintive pour ma vie. Je n'étais pas un enfant. Elle le savait alors je ne comprenais pas à quoi était dû cette peur panique.

Je ne mis pas longtemps à avoir un aperçu de ses raisons. Nous entrâmes dans le palace. Je la suivis vers l'ascenseur. Je remarquai plusieurs hommes en arme. Nous descendîmes au deuxième sous-sol et nous fûmes reçus par deux hommes armés de fusil d'assault à la sortie. Je me retrouvai d'ailleurs le canon de l'un d'eux sous le nez avant mon deuxième pas. Je jetai un regard noir à celui qui m'avait braqué sans arriver à déceler si c'était une provocation ou un avertissement.

« Viens, me dit Altara qui s'était arrêté à quelques pas. »

Contrairement à ce qu'elle m'avait montré dans la voiture, le fait que je sois mis en joug devant ses yeux ne sembla pas lui poser problème. Je la rejoignis en laissant l'homme à ses affaires. Il ne tira pas, n'y insista.

« Ne me lâcha pas d'une semelle et ne t'arrête pas quoiqu'il se passe, me souffla-t-elle quand j'arrivai à sa hauteur. »

Elle se remit en marche sans répondre aux sollicitations qui l'interpelait ça et là. Il y avait là un véritable club souterrain, largement enfumé et dont la plupart des occupants avait l'air louche.

Elle rejoignit une large table presque identique à celle à laquelle je l'avais observé des nuits entières. J'y reconnus d'ailleurs quelques têtes. Visiblement le clan Aftagan avait déplacé son QG. Elle s'assit sans me jeter un coup d'œil. J'attrapai rapidement un tabouret à proximité pour rester derrière elle.

« Un nouveau chien, Altara ? Lâcha un des hommes en face d'elle.

- Comment se porte le tien ? lui répondit-elle tranquillement. Toujours à se pisser dessus ? »

Quelques rires l'approuvèrent avant que les piques reprennent. Je n'avais jamais fait attention à ces conversations annexes à leurs vraies affaires pendant mes filatures, bien trop concentré sur mon objectif de la coincer à l'époque. Comme je n'avais plus rien d'autres à faire, j'écoutais attentivement en jetant un coup d'œil aux alentours.

Dans un premier temps, je fus impressionné du nombre de regards que je croisais, voir de menaces muettes. Visiblement, je ne passai pas inaperçu. Ensuite, je fus effaré des joutes verbales qu'Altara devait supporter. Une phrase sur deux était une attaque sans demi-mesure. Certains la traitait de fillette, d'autres lui reprochait des actions des renseignements généraux mais la plupart lui servait des insultes purement gratuites. Soit elle n'y faisait clairement pas attention, soit elle répondait de la même manière. C'était peut-être un jeu, ou leur manière de communiquer, mais je trouvais cela usant après seulement quelques minutes. N'importe qui aurait fini par craquer face à un tel harcèlement. Altara ne bronchait pas en continuant ses affaires. Pourtant, même si ces hommes passaient leur temps à la critiquer, je vis bien qu'ils l'écoutaient attentivement quand il s'agissait de leurs affaires. Je ne pus que constater ce que Mark m'avait dit. Sa position était une lutte constante mais c'est ainsi qu'elle l'avait choisi. Je pouvais comprendre qu'elle ait des réactions impulsives quand elle devait subir ce cirque à longueur de temps.

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