Chapitre 10

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A partir de ce fameux jour où j'étais devenu, pour le clan Aftagan, la propriété de ma femme, je ne fis plus que la suivre comme son ombre, muet comme une tombe. Je ne voulais pas me mêler de ses affaires. Je compris rapidement que je ne connaissais même pas le dixième de leurs codes. Je me contentai d'écouter pour essayer d'avoir un aperçu global de la situation. De près ou de loin, Altara gérait plus de dix mille hommes. Elle déléguait peu les décisions et elle avait tendance à demander toujours plus de détails, si bien qu'elle courait dans tous les sens malgré sa grossesse avancée. Je n'arrivai qu'à la convaincre de se coucher plus tôt et d'inclure une seule pause repas au milieu de la journée. Je ne pouvais que constater que le travail aux renseignements généraux avait dû être une partie de plaisir pour elle.

Je m'occupais de toute l'intendance de sorte qu'elle avale quelque chose le matin et le soir dans son appartement, mais j'avais dû trouver mon rythme dans le sien. Ma seule autre intervention était de tester ses verres. Je n'arrivais pas à la laisser boire quoi que ce soit sans m'assurer que ce n'était pas empoisonné. Ce fut l'objet d'une dispute comme j'espérais ne plus en avoir. Elle craignait davantage un poison pour moi que pour elle puisque, d'après elle, un certain nombre de grands pontes du clan souhaitait me rayer de la carte pour pouvoir l'atteindre plus facilement. Elle me soutint qu'elle avait toujours sur elle un anti-poison au cas où mais je n'en démordais pas. Je lui fis remarquer pour la énième fois qu'elle était enceinte. Il n'y avait plus qu'elle uniquement dans l'histoire. Elle accepta finalement de me donner son antidote au cas où. Je refusai de rester sans rien faire.

Au début, j'avais eu peur des moments seuls tous les deux mais je remarquai rapidement que je n'avais plus rien à craindre. Pendant les trois premières semaines, elle s'endormait avant même que j'arrive à lui faire avaler quoi que ce soit. Je me dis alors qu'elle devait toujours me faire confiance et que Mark avait dû avoir raison encore une fois : je lui apportais un peu de calme, même au sein de son clan.

Quand elle réussit à garder cinq minutes les yeux ouverts, ma première question fut où trouver une bibliothèque. J'avais regardé longuement son ventre si rond jusqu'à me rendre compte qu'il allait falloir que je m'occupe d'un nouveau-né. Dans ce contexte, j'avais tendance à l'oublier. Au regard qu'elle me jeta quand j'arrivai à lui expliquer mes raisons, je compris qu'elle n'avait aucune idée de comment m'aider. Visiblement, ne pas s'occuper de son fils n'était pas un problème pour elle. Elle me laissa donc sans réponse jusqu'au surlendemain où, sans me prévenir, nous nous retrouvâmes dans une librairie au milieu de ses rendez-vous. Je ne faisais pourtant que suivre ses instructions sur où aller. Visiblement, elle avait inclus mes préoccupations dans son agenda. Je me mis alors en quête d'un ouvrage qui pouvait m'aider.

J'étais tellement concentré que je mis un moment à réaliser qu'elle était restée à quelques pas derrière moi mais jetait de fréquents coups d'œil dans ma direction. J'hésitai mais finis par lui dire de venir m'aider à trouver quelque chose de pratique. Je ne rêvais pas en la voyant faire un pas vers moi avant de se raviser. Elle commença à me dire qu'elle m'attendait aux caisses avant de faire de nouveau marche arrière. Je n'avais même pas retenu un haussement de sourcils. Je n'avais pas besoin de plus pour tenter de fuir même si je savais dans le fond que je ne le ferai pas. Nous étions trop proche de l'accouchement. Je ne pouvais pas la laisser seule maintenant.

Je revins vers elle, deux livres à la mains en lui demandant de choisir l'un ou l'autre. Elle y jeta un coup d'œil avant de grimacer et de me dire qu'elle prenait les deux. Je ne protestai pas, ni ne retins un léger sourire. Je ne m'attendais pas à la voir si minaude sur le sujet. Tout au long de la journée, même si elle s'en défendit, je la vis dans le rétroviseur de la voiture, feuilleter les livres, quitte à se tromper de direction.

Le soir même, j'abordai le sujet puisqu'elle était arrivée à rester éveillée jusqu'à ce que le dîner soit prêt.

« Comment va-t-on faire ? Lui dis-je maladroitement.

MenteuseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant