Je suis épuisée par les différents voyages que j'ai accomplis. A notre arrivée au lieu de résidence de la Dame des Morts, je lui ai demandé si je pouvais simplement me reposer. Riant, elle a acquiescé et appelé Albert, l'homme qui se chargeait de me faire souffrir avec le collier. Il m'a conduite dans ma chambre, où je me trouve maintenant. Il m'a accroché le collier autour de la taille, par-dessus les vêtements que je porte depuis plusieurs jours. A cet instant, je ne songe qu'à me reposer dans ce lit qui me paraît si réel, si confortable... Une fois seule, je soupire profondément. A quoi bon ? Ma mère a disparu, et je la recherche à l'aide d'une personne qui se fait passer pour elle, et dont je ne connais rien. N'est-ce pas ironique ? Je ne me souviens de rien de ce qui s'est passé il y a trois ans, lorsque ma mère est décédée. Comme par hasard, la veille de mon anniversaire. La fatigue et la lassitude me rendent extrêmement maussade. Il est temps que je dorme. Allongée sur ce lit inconnu, loin de chez moi, je rumine mes malheurs. Un étau m'enserre la poitrine, mais je ne sais plus comment pleurer. Peut-être est-ce un symptôme d'une trop grande souffrance ? Je ferme les yeux sur des images de morts, de douleur, de perte. C'est exactement ce que je ressens, la perte. J'ai perdu ma mère, et je la recherche. Telle est ma quête.
Je me réveille. J'aperçois par les rideaux que le soleil s'est couché, il fait nuit. Je m'étire et je baille, comme si tout était normal. Mais la mémoire me revient peu à peu, et la douleur avec. J'inspire, j'expire, selon une méthode de relaxation que ma grand-mère m'a enseignée. Que peut-il m'arriver de pire ? Je me lève, un pied sur le sol, puis le deuxième. Je regarde autour de moi, contemplant cette chambre, digne d'un hôtel des plus luxueux. Il y a une salle de bain attenante à ma chambre, et des vêtements sont posés sur le bord de mon lit. Un grand tapis moelleux réchauffe la pièce de sa présence, et j'y enfouis mes pieds, ressentant quelque chose proche du bien-être. J'examine les habits qui me sont proposés : c'est assez particulier, c'est un mélange entre une tunique et une robe accompagnée d'un pantalon blanc et de botte montantes brunes. La tunique est verte, comme mon t-shirt actuel l'était, et ressemble à une robe vue de dos : elle couvre jusqu'à mes mollets. Devant, elle s'ouvre sur mes jambes comme un long manteau l'aurait fait, ce qui me rappelle les tenues que portent les héroïnes dans les jeux vidéos que j'affectionnais avant. Bon, cette tenue me convient, et je me dirige vers la douche. Le monde du Dessous n'est pas si différent du monde Mortel, à part quelques différences d'époques dans la décoration entre les pièces. Je me déshabille et me glisse sous l'eau chaude. Ce que ça fait du bien ! Souvent, la douche me permet de méditer. Et c'est ce que je fais. Je relativise, je constate que je n'ai plus rien à perdre. Je ferme les yeux, je souris presque. Le bonheur peut revenir, la tristesse n'est jamais définitive ! C'est sur cette leçon d'espoir que je me décide à quitter la protection rassurante de ma chambre et de m'aventurer dans les couloirs de cette gigantesque demeure, à la recherche de mon hôte et des réponses qu'elle m'apportera.
Porte après porte, couloir après couloir, je ne cesse de me perdre et de revenir sur mes pas. Personne ne se soucie-t-il de moi ? Je reste une invitée ! Je finis par atteindre un stade d'énervement suffisant pour oublier la bonne éducation et la politesse et je tempête :
- He oh ! Il y a quelqu'un ? Non, parce que je suis perdue, je voudrais parler à...
J'hésite sur la qualification à employer pour parler de la Dame des Morts. Suis-je considérée comme sa fille ici ? Ce qui voudrait dire que personne ne doit savoir pour notre véritable mission, nous les chasseuses d'esprit, comme elle dit. J'opte finalement pour :
-... Je voudrais parler à ma mère !
J'entends alors un claquement de porte qui me fait sursauter. Je me tourne et me retourne, mais rien autour de moi. Puis un autre claquement de porte, et encore un autre. Mon cœur bat la chamade, et je commence à avoir peur. Je fais des tours sur moi-même, toujours plus affolée, et c'est au terme de l'un deux que je tombe nez à nez avec Albert, au sens littéraire. Je me recule en poussant un hurlement de terreur et de surprise. Il rit et s'exclame de sa voix grave :
VOUS LISEZ
Le Monde du Dessous - La Dame des Morts
HorrorTout autour de moi est à la fois différent et familier. Toutes époques mélangées. Et moi, je suis là, ni morte ni vivante, ne pensant qu'à m'enfuir. Aujourd'hui plus que tout autre jour, mes racines me paraissent lointaines, comme l'autre rive d'un...