La vie qui sera mienne

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Chaque pas, chaque seconde que nous passons loin de la protection de l'auberge me paraît durer une éternité. L'esprit de Lyanne devient de plus en plus transparent, je peux presque sentir le tonnerre gronder sous la colère de Klaus. Il pleut depuis notre départ, rendant notre transport de plus en plus compliqué. Tantôt trébuchant sur une racine, tantôt dérapant dans la gadoue, je ne cesse de tourner les images des derniers instants dans ma tête. D'après Lyanne, il lui est possible d'interdir temporairement l'accès à son auberge, à Klaus compris. Ainsi, elle pourra soigner Sofia, du moins la protéger pour notre voyage de retour chez nous. Mais son esprit ne cesse de s'estomper, l'effet du sifflet se dissipant... Et je ne peux pas l'utiliser une seconde fois. Il n'est plus qu'un sifflet ordinaire. Soudain, j'entends un gémissement. Sofia ?! Elle essaie de parler mais n'émet que des gargouillis inintelligibles. Je lui suggère de se calmer, je lui dis que tout se passera bien. Que nous rentrons chez nous. Mais je ne sais si j'essaie de me convaincre par la même occasion... Probablement. Autour de nous, tout est sombre. Je serai incapable de me déplacer sans l'aide de Lyanne. Je m'en rends compte lorsqu'elle disparaît complètement, me laissant seule avec Sofia, dans les épaisses ténèbres de cette forêt. Contrainte de déposer Sofia, complètement revenue à elle, je me plie pour reprendre mon souffle. Où aller ? Sofia se relève lentement, par chance elle est capable de se déplacer à nouveau. Elle murmure :

- Juliana. Je connais le chemin. La mère de Lyanne était mon amie, autrefois. Je sais où est l'auberge. Viens !

Alors que j'attrape la main qu'elle me tend, je stoppe. Une branche a craqué derrière nous. Mais peut-être était-ce la pluie ? Pas de temps à perdre, nous reprenons notre course folle vers la vie. Mais j'entends à nouveau des bruits inquiétants derrière moi ! Luttant contre ma paranoïa, je ne pipe mot et ferme les yeux, guidée par ma mère enfin retrouvée. Mais au bout de longues secondes, une main étrangement froide se pose sur mon épaule. Le temps semble s'arrêter, les gouttes d'eau suspendues dans leur chute vertigineuse vers le sol. Je tourne lentement la tête pour faire face à un sourire toujours plus mauvais. Klaus ! Il me chuchote à l'oreille :

- Salut, poupée !

Je pousse alors un hurlement, de toute la force de mes poumons. Alors que j'en expulse l'air, Klaus fait un geste avec sa main libre, et me rend aphone, incapable du moindre son. Je voudrais tellement qu'on m'aide ! Mais il ne faut pas qu'il ait Sofia. Il ne semble pas avoir remarqué sa simple présence ! J'entends alors un petit murmure, une voix si faible que seule l'oreille à qui ce message est destinée est capable de l'entendre :

- J'ai protégé ta mère avec une bulle d'invisibilité. C'est pourquoi j'ai disparu, je sentais Klaus approcher, vous épier. Il ne connaît pas l'emplacement de l'auberge !

Je tente d'effacer l'expression de surprise de mon visage. Ainsi, il y aurait de l'espoir ? Je lâche alors la main de ma mère, sans même y réfléchir, et lui envoie comme un signal mental. Et la façon de le faire m'était jusqu'alors inconnue !

Cours. Ne t'arrête pas ! Je vais m'en sortir. Klaus ne sait pas où est l'auberge ! Je te rejoins, promis. Je t'aime.

Puis, plus personne. Juste Klaus, et moi. Je lui lance un regard haineux et le provoque :

- Et pourquoi donc ce cher monsieur voudrait-il m'attraper ? Je ne suis qu'une insignifiante petite enfant ! Allez-vous en, ou vous aurez des problèmes.

Souriant à mes paroles, il avance vers moi. Pétrifiée de peur, je suis incapable de bouger. Il effleure mes lèvres de ses doigts et dit :

- Que de vilains mots sortant de cette magnifique bouche ! Vraiment, je ne saurais y croire si je ne me tenais pas ici.

Le Monde du Dessous - La Dame des MortsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant