Première concentration

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La fin de semaine passa à une vitesse folle. J'avais passé pratiquement tout mon temps avec les filles à visiter les environs. Parfois, je prenais du temps pour avancer l'écriture du manuel, tout en me servant de quelques idées qui m'étaient venues les rares fois où j'avais pu discuter avec Julien des entrainements.

Je ne vis que très peu les autres joueurs, bien trop accaparés par leur entrainement. Ils avaient des entrainements en commun et d'autres plus personnels adaptés selon le poste et les besoins de chacun. Plus les jours passaient et plus Julien se concentrait. Je ne fis aucune remarque sur le fait que j'avais, de temps à autre, l'impression de faire partie des meubles. Cependant, je ne le vivais que moyennement bien jusqu'à ce que Sophia lâche sans qu'on s'y attende :

- Dîtes-moi les filles suis-je invisible ? Non parce que hier soir quand Nicolas est rentré, je n'aurais pas été là, ça aurait été pareil. Il a franchi la porte, il s'est dirigé droit vers le lit et c'est à peine s'il m'a adressé la parole avant de s'endormir. Alors, je repose la question : suis-je invisible ?

Pauline ne put s'empêcher de retenir un petit rire. On se regarda toutes, les unes après les autres, avant de rire de bon cœur. On comprit tout de suite que tous nos hommes avaient tous eu plus ou moins le même comportement.

- Non mais ce n'est pas drôle là ! Qu'est-ce qui vous prend ? s'indigna Sophia.

- Ma belle, tu sais bien comment ils sont quand un match important approche. Ils ne pensent plus qu'à ça.

On discuta de la préparation du match, de notre ressenti par rapport à tout ça, de la tension qu'on sentait dans l'air. On refit le monde jusqu'à ce que chacune reparte dans sa chambre.

Nous étions la veille du match et lorsque Julien rentra je sentis quelque chose de différent chez lui. A peine était-il arrivé qu'il se dirigea droit vers moi et m'embrassa passionnément.

- Que me vaut cet honneur ? lui demandai-je étonnée.

Ses yeux pétillaient, son sourire était presque carnassier. Il m'embrassa de nouveau avant de me répondre.

- J'ai juste hâte d'être à demain.

C'était donc ça. Maintenant, que le match était si proche son corps vibrait d'impatience. Je le ressentis dans sa posture, il hurlait son envie de jouer. Il avait travaillé si dur, la saison s'était plutôt bien passée et les voilà en finale. Il avait une soif de vaincre qui faisait plaisir à voir. Moi qui avais tendance à me mettre dans des états pas possibles lorsqu'il s'agissait d'examen ou de mon inspection, j'étais admirative. Lui, au contraire, était stimulé par tant d'enjeu. Il ne souhaitait qu'une chose : y être tout de suite. J'essayai de m'imprégner de cet esprit combatif, c'était toujours utile. Il me sembla tout à coup plus grand, plus large, plus impressionnant. Je me blottis tout contre lui bien à l'abri entre ses bras.

On discutait de tout et de rien en dînant jusqu'à ce que je réalise que je n'avais pas vu Laëtitia depuis que j'étais arrivée ici. Je l'avais revue à plusieurs reprises depuis que Julien et moi étions ensemble. J'avais réellement été soulagée de ne voir aucune attirance ou lien étrange entre eux deux parce qu'en toute sincérité, je ne lui arrivais pas à la cheville. Elle était tout bonnement extraordinaire. C'était tout à fait le genre de personne qu'on pourrait détester par jalousie, si elle n'était pas aussi adorable. Je m'inquiétais donc de ne pas l'avoir vue.

- Oh c'est juste qu'en ce moment elle court un peu partout. Depuis qu'on est en finale, elle n'a pas arrêté. Tu la verras probablement demain au stade.

Rassurée, nous reprîmes notre discussion là où je l'avais interrompue.

A la fin du repas, Julien me prit la main et me regarda soudainement très sérieusement. Je l'interrogeai du regard, inquiète de ce soudain silence. Il semblait chercher ses mots jusqu'à ce qu'il soupire en souriant et me demanda tout bas :

Au coeur du rugbyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant