Au coeur du rugby

Premier stress

Je m'affalai dans mon fauteuil totalement essoufflée. J'avais enchainé les problèmes. Une roue de ma valise s'était bloquée, mon RER s'était arrêté en pleine voie et enfin je m'étais trompée de terminal. J'ai dû courir comme une furie dans l'aéroport pour éviter de louper mon vol. C'est ainsi que je me retrouvais dans l'avion dégoulinante de sueur. Sexy...

J'avais senti sur mon passage des paires d'yeux me regarder durement pour être arrivée en retard. Je les comprenais, ce n'était jamais plaisant d'être retardé par un inconnu qui n'était pas fichu de prendre son avion à l'heure. Heureusement pour moi, j'étais tellement crevée d'avoir eu tant de mal à arriver jusqu'ici, que je ne prêtai absolument pas attention à cette atmosphère légèrement étouffante.

J'avais pratiquement deux heures pour me reposer avant d'arriver en Espagne. J'étais toute excitée à l'idée de le rejoindre. Je n'étais allée qu'une fois à Barcelone avec des amis. J'avais passé la plus grande partie de mon séjour à me mettre de la crème 50 pour éviter de ressembler à une merguez oubliée sur le barbecue. Je souris à ce souvenir. Victoria avait pris un malin plaisir à laisser une couche de crème en forme de main dans mon dos. La marque avait mis des semaines à disparaître. J'avais mis moi-même plusieurs heures à comprendre pourquoi les filles riaient à chaque fois que j'étais de dos.

Toujours dans mes pensées, je fis en sorte de m'installer plus confortablement dans mon siège. Puis, je fermai les yeux en espérant m'endormir. Toutefois, au bout de quelques minutes, mon cerveau entra en ébullition. Impossible de penser à autre chose. Il fallait que j'écrive.

Je sortis mon ordinateur pour reprendre la suite de mes observations et des bilans que j'avais faits, suite aux dernières séances de rugby effectuées avec mes élèves. Ils avaient cherché du matériel pour matérialiser le terrain ainsi que les poteaux de but. Pour cela, ils avaient fait en premier lieu un plan du terrain avec moi afin de matérialiser les lignes par des plots de couleurs, puis les ont mis en place eux-mêmes.

J'étais tellement concentrée que je ne me rendis compte que nous étions arrivés que lorsque les hôtesses me demandèrent de ranger l'ordinateur et de rabattre la tablette. Enfin c'est ce que je crus comprendre en regardant ses gestes plus qu'en écoutant ce qu'elle disait.

L'avion atterrit en douceur. Je récupérai tant bien que mal ma valise dans le compartiment au dessus de ma tête en essayant de ne pas me la faire tomber dessus. Je suivis ensuite la file de voyageurs qui descendaient lentement mais sûrement de l'avion. Nous traversâmes ensuite quelques couloirs avant d'arriver devant des portes automatiques menant au hall où j'espérai que Julien m'attendrait.

Je fus légèrement éblouie par la soudaine luminosité. Je ne vis qu'une foule compacte sans distinguer le visage tant attendu. J'avançai vers la sortie, jusqu'à ce qu'un écriteau avec mon nom de famille retienne mon attention. Je regardai avec plus d'attention la personne qui la tenait. Ce n'était autre que mon Mr. Juillet dans une tenue estivale qui surprise surprise lui allait parfaitement. Un sourire s'épanouit instinctivement sur mon visage. Je me mis à accélérer de plus en plus, jusqu'à atteindre une sorte de trottinement d'animal blessé dû à la valise qui trainait au bout de mon bras. Je lui sautai enfin dessus en le couvrant de baisers, bien trop heureuse de le voir pour le laisser parler.

- Mademoiselle Moray vous accueillez tous vos chauffeurs de cette manière ?

- Uniquement ceux qui prennent la peine de venir me chercher à l'aéroport.

Il me prit dans ses bras et me serra fort contre lui. J'inspirai avec avidité son odeur avant de m'éloigner. Je remarquai en un instant quelques nouvelles blessures.

- Ce n'est rien, murmura-t-il.

Visiblement, l'expression de mon visage avait dû me trahir. Ça me faisait mal de le voir aussi amoché.