Chapitre 5

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Média :

Bastille - Pompeii 


Lundi


L'arrivée de Monsieur Delmont dans la salle de classe a le don de calmer relativement mes ardeurs. Je constate d'ores et déjà qu'une atmosphère beaucoup plus sérieuse s'installe dans la classe tandis que les murmures cessent. La présence de notre cher directeur inspire le respect, et je distingue, avec beaucoup de curiosité, les élèves le scruter, les yeux brillant comme s'ils l'admiraient. Ceci dit, cela rejoint plus ou moins ma première impression. En effet, quand je me remémore ma rencontre d'hier avec lui, mon instinct me soufflait que cet homme avait quelque chose de foncièrement bon. Je préfère tout de même attendre, préférant jouer la carte de la prudence.

Même ma coloc reste muette, et se tasse dans sa chaise, pendant que notre professeur dispose ses affaires sur son bureau.

Il ne semble pas remarquer ma présence et cela va sans dire que cela m'arrange d'une certaine manière. Il se saisit ensuite d'un polycopié et commence à faire l'appel. Ses yeux voguent sur les élèves présents, tandis que ses billes s'arrêtent soudainement vers moi. Il fronce les sourcils, regarde à nouveau le polycopié, puis m'interpelle :

— Léna, peux-tu venir me rejoindre s'il te plaît ? Tu ne t'es pas encore présenté à tes camarades.

De concert, mes camarades de classe se retournent vers moi tandis qu'une certaine appréhension me gagne. Cette soudaine attention me crispe, et je serre les dents alors que je me hisse sur mes deux pieds. Gabriel m'adresse un faible sourire d'encouragement, mais je ne parviens pas à me dérider. Je déteste ça. Je déteste le fait qu'on me regarde comme si j'étais une bête curieuse.

Arrivée près du directeur, il m'adresse un sourire chaleureux, et me fait signe de prendre place sur l'estrade. Je m'exécute avant de me tourner à nouveau vers mes camarades. Si je constate que beaucoup semblent intrigués par ma présence, les derniers élèves du fond me scrutent avec dédain.

— Bonjour, je m'appelle Léna Hall. J'ai dix-sept ans, et je suis arrivée hier à l'académie de Saint-Honoré.

— D'où viens-tu ? me questionne une fille qui se situe au premier rang.

Son ton est juste curieux, il n'y a aucune note de sarcasme dans sa voix. Sa question fait naître un sentiment de panique en moi, je n'ai jamais aimé parler de moi, et il s'agit d'une question délicate. Comment annoncer à une multitude d'élèves que j'ai grandi dans un foyer, sans parents, sans amis ? Sa question reste en suspens, quand une voix grave retentit pour me sauver la mise :

— Quelle est ta spécialité ?

La question provient du brun qui a fait son apparition dans la salle de classe au dernier moment. Evan. Mes yeux s'arrêtent sur lui tandis qu'il me fixe sans ciller de son regard azur. Ses lèvres roses sont pincées en une ligne dure, et sa mâchoire serrée alors qu'il attend impatiemment ma réponse.

— Quoi ?

— Tu es sourde ? lance-t-il tandis que ses comparses ricanent de sa remarque. Tu veux que je répète plus lentement pour toi la nouvelle ? Peut-être faudrait-il que tu retournes au précédent niveau, pour comprendre, la base de notre langue.

Sidérée, je mets plusieurs secondes pour percuter qu'il essaie de me descendre publiquement. S'il pense un seul instant, qu'être en présence d'autres élèves va m'arrêter, il se trompe lourdement. Mon sang bouillonne, et je suis sur le point de lui balancer une réplique bien sentie, mais la voix de ténor de monsieur Delmont retentit :

Le Cercle [ EN PAUSE ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant