Chapitre 17

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Média :

Birdy - The A Team 

Le temps tourne à l'orage, mais je ne bouge pas de ma place. Les gouttes tombent dru sur ma peau, le vent me glace le sang, mais je ne bouge pas. Un éclair perce ma vision floue, mais je ne bouge pas. Plus ma peine et ma colère augmentent, plus le temps se dégrade. Je sais que je devrais me calmer. Mais, j'ai l'impression que l'on me piétine les entrailles, que je ne pourrais jamais me relever d'un coup si douloureux. Je n'en ai pas la force, pas après ce que je viens de vivre. J'ai été si crédule ! Comment j'ai pu penser à lui accorder ma confiance ? J'aurais dû écouter les conseils de Gabe et continuer à me méfier d'Evan. À présent, il va se faire une joie de m'humilier auprès de ses comparses, si ce n'est pas déjà fait. Je vais revivre ce que j'ai déjà vécu dans les foyers où j'ai laissé une partie de ma vie être dirigé par d'autres.

Humiliations.

Colère.

Cris.

Peine.

Les images de ce que l'on a vécu dans la grotte tournent en boucle dans mon esprit et j'aimerais tout oublier. J'aimerais, ne jamais avoir été si naïve, ne pas avoir espéré qu'un garçon me regarde autrement que comme une pestiférée. Je ferme les yeux et me mets sur le dos. Mes vêtements sont trempés, je frissonne à cause du froid et je suis certaine d'attraper un bon rhume à la suite de cet épisode. Pourtant, je ne bouge toujours pas. Je sens la terre trembler sous moi, puis il me semble qu'un cousin se glisse sous mon corps et que je m'élève. De plus en plus vite, de plus en plus haut. J'entrouvre les paupières. La pluie commence à me fouetter le visage tel des milliers d'aiguilles, la douleur est si intense qu'un cri sort de ma bouche. Je me protège à l'aide de mes bras et me recroqueville, mais mon ascension ne s'arrête pas. La panique m'étreint comme un linceul. Je ne sais pas ce qui m'arrive et cela me terrifie. Puis, plus aucun coussin ne me soutient. Dès lors, ma chute vertigineuse commence. Un cri silencieux, étouffé par la terreur me fait ouvrir la bouche. Je me vide l'esprit, je n'entends plus le sifflement du vent ni la pluie qui me martèle le corps. Je me roule en boule et tente de puiser dans mes pouvoirs pour me faire léviter. Une sorte d'étincelle jaillit de mon corps et je comprends que je suis bien trop épuisée pour les faire fonctionner. Alors j'attends le choc de mon atterrissage. J'entends mon nom apporté par le vent, mais je ne sais pas d'où il provient. Tout cela n'a plus d'importance à présent, je vais mourir, car je ne suis même pas capable de sauver ma propre vie. Les paroles de Kane me reviennent en mémoire.

« Je n'ai cessé de faire le con avec mes pouvoirs que lorsque j'ai eu la possibilité de sauver une vie et que je n'ai pas pu le faire. »

C'est trop tard pour moi, je n'aurais jamais la possibilité d'apprendre à les maîtriser. Et la vie que je ne peux sauver, c'est la mienne. Je sais que ça ne dure que quelques secondes, mais j'ai la sensation que ça fait des heures que je suis en chute libre. Je bloque toutes mes capacités sensorielles et ouvre les yeux avant que mon corps ne touche le bitume de la cour. Je ne sais pas comment je suis arrivée jusqu'ici, mais une chose est sûre, ça va être atroce. Je referme les paupières quand le choc me coupe le souffle. J'attends que la douleur me submerge puis que tout devienne noir, mais je ne ressens pas la douleur intense que j'avais imaginé. Je sens une main me frôler le visage et dégager les mèches mouillées qui collent ma peau. J'ouvre les yeux et un visage flou apparaît au-dessus du mien. À cause de la pluie, je n'arrive pas à discerner ses traits. Soudain, comme s'il avait lu dans mes pensées, une bulle nous englobe et plus aucune goutte ne nous touche. Il fait encore sombre, mais je reconnaîtrai sans aucun mal ses yeux jaunes.

Le Cercle [ EN PAUSE ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant