Chapitre 9 : Trésors et légendes

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Tout en faisant une visite guidée des lieux, j'étais absente, trop occupée à penser à cette histoire de mystérieuse bouteille dorée qui, selon moi, ne tenait pas la route. Pourquoi parmi tous ses biens inestimables, Monsieur Haurang n'avaient d'yeux que pour cet objet et pourquoi était-il si bien caché ?

Trop absorbée par le fait d'essayer de répondre à cette question par moi-même, je ne vis pas que Monsieur Haurang et Elisa étaient sortis pour rejoindre la pièce d'à côté pour la suite du déroulement de la visite, sans remarquer mon absence. Soudain, profitant du fait que nous étions tous les deux, Thomas se planta devant moi, contre l'encadrement de la porte, m'empêchant ainsi de sortir de la pièce, ce qui eut pour effet de me ramener immédiatement sur terre.

- Que les choses soient bien claires entre nous, commença le détective sur un ton cinglant. Monsieur Haurang ne m'avais pas prévenu que tu viendrais et il pense que tu vas m'aider pour la mission qu'il nous a confiée, sauf que je suis quelqu'un qui bosse en solo et n'a besoin de personne et surtout pas toi, miss chasseuse de trésors.

Furieuse je répliquais :

- Parce que tu crois que j'ai besoin de toi ? Eh bien tu te fourres le doigt dans l'œil, Monsieur le détective. Elisa et moi on peut très bien s'en sortir sans toi.

- Alors dans ce cas, tu n'y verras pas d'inconvénient à ce que nous cherchions la bouteille d'or chacun de notre côté, en déduisit-il.

- Absolument pas, au contraire ça m'arrange parce que, quand je l'aurai trouvée, tu pourras enfin reconnaître que je suis aussi compétente que toi pour cette mission et cela fera un gros coup de pub pour mon agence qui pourra faire encore plus de bénéfices, dis-je.

A ces mots, le regard de Thomas se fit plus dur et il serra les poings de frustration.

- Si tu crois que tu vaux mieux que moi alors faisons un marché, celui qui trouvera la bouteille d'or en premier aura le droit de vanter cet exploit dans la presse régionale, et tout le mérite reviendra à son agence, ça te va ?

- Je dirais même que c'est la meilleure idée que tu aies eut de ta vie, dis-je tout en esquivant le détective pour passer par l'embrasure de la porte, sans même lui adresser un regard.

Thomas ne tenta rien pour m'en empêcher et nous retrouvions quelques instants plus tard le propriétaire des lieux et Elisa en train de visiter une énième chambre depuis le début de la visite et celui-ci était tellement absorbé par l'histoire qu'il racontait à mon assistante qu'aucun des deux ne s'était aperçus que Thomas et moi avions manqué à l'appel durant cinq minutes.

- C'est donc suite à cette légende que je me suis mis en tête d'être le premier membre de la famille à la retrouver et la garder ainsi comme trophée, termina Monsieur Haurang.

Nous nous dévisagèrent avec Thomas, incrédules. A cause de son petit jeu, on venait de rater un élément crucial de l'enquête !

- Quelle légende ?, osa demander le détective.

- Vous n'avez donc rien écouté de mon récit ?, s'offusqua Monsieur Haurang, dont les pupilles paraissaient à cet instant d'un bleu presque irréel.

Silence de notre part qu'il fallait briser en trouvant une bonne excuse à servir.

- Thomas me montrait quelque chose dans la pièce d'à côté, le défendis-je. Nous venions juste de vous rejoindre au moment où vous acheviez votre histoire et n'avons donc rien entendu.

Le détective me dévisagea en écarquillant les yeux de surprise, ne s'attendant visiblement pas à ce que je prenne sa défense, et moi-même j'ignorais pourquoi je l'avais fait. Le propriétaire du domaine nous dévisagea l'un et l'autre puis émit un profond soupir.

- Bon très bien je vais répéter, céda t'il. Je disais à cette jeune fille que je n'ai jamais vu cette bouteille de Champagne dorée que mes ancêtres ont faite fabriquée en 1910 à la gloire de la Maison. C'est une légende que m'ont transmis mes grands-parents qui le tenaient eux-mêmes des leurs.

- Avec tout le respect que je vous dois, Monsieur, les légendes ne reflètent pas toujours la réalité, remarquais-je tout en observant trois regards se braquer sur moi et j'enchainais : J'ai quelques clients qui avaient écho de fausses légendes et étaient pourtant convaincus qu'un trésor existais malgré tout.

Suite à mes propos, Monsieur Haurang ne se mit heureusement pas en colère après moi et se contenta bien au contraire de m'offrir un sourire rassurant et léger afin de ne pas lui creuser trop de rides autour des yeux et de la bouche.

- Ne vous inquiétez pas Mademoiselle Guenégan, je n'aurais pas fait appel à vous si je n'avais pas la preuve de ce que j'avance. Si vous voulez bien me suivre, je vais vous montrer quelque chose, se contenta-t-il de répondre.

Nous lui emboitèrent le pas vers une autre pièce –encore une chambre – Et Monsieur Haurang se dirigea vers une table de chevet dont il en extrait quelque chose qu'il me tendit. C'était une photographie en noir et blanc représentant un homme, sans doute l'ancêtre de notre hôte, habillé chic dans une tenue démodée depuis au moins un siècle, tenant dans ses mains gantées une imposante bouteille de Champagne, sans doute un magnum de deux litres.

- Vous ne voyez peut être pas très bien sur cette photo, mais je peux vous affirmer que la bouteille représentée ici est bel est bien en or, nous confirma Monsieur Haurang. Si malgré cela vous ne me croyez toujours pas, cette même bouteille a été gravée dans la chapelle privée où sont enterrés mes ancêtres. Au fil du temps, beaucoup ont essayé mais aucun d'entre eux n'a su retrouver la trace de cet objet après 1910 et en faisant appel à vous deux, je pensais être le premier de la famille qui aurait ce privilège et je pourrais la conserver en trophée dans ma petite maison dans le sud comme dernier vestige de mes ancêtres.

A ces mots, je vis une lueur passer devant les prunelles de Thomas, comme s'il avait eu une illumination.

- Et vous ne pensez pas que cette fameuse bouteille dorée que vous et vos ancêtres avez cherchée partout dans votre demeure en vain puisse se trouver dans cette chapelle privée dont vous venez de parler ?, demanda t'il.

Le propriétaire des lieux considéra un instant l'idée du détective.

- Cela peut en effet consister une première piste intéressante pour vos recherches, vous avez absolument raison, admit-il. Alors ne perdons pas une minute et allons-y !

Suite à ces paroles, je me figeais sur place, comme pétrifiée.

- Je crois ne pas avoir bien compris, intervenais-je en sentant les battements de mon cœur s'accélérer. Nous n'allons pas nous rendre au cimetière quand même ?!

- Bien sûr que si, pourquoi jeune fille ?, me demanda Monsieur Haurang, sous le regard interrogateur de Thomas et Elisa qui semblaient me poser la même question en silence.

- Euh... Eh bien.... Parce que ce serait irrespectueux pour les défunts, balbutiais-je.

- Ne vous en faites pas Mademoiselle Guenégan, mes ancêtres sont morts depuis longtemps et je doute que cela les dérangera que nous leur rendions une petite visite pour fouiller leur résidence, ironisa t'il.

Je ne trouvais absolument pas ça drôle, c'était même super flippant.


A. Guenégan, chasseuse de trésorOù les histoires vivent. Découvrez maintenant