19.

16 1 0
                                    

J'arrive devant une boulangerie, prend mon skate à la main et entre. La femme au comptoir doit avoir une cinquantaine d'années. Elle me souris bêtement, alors je fais de même puis regarde la vitrine.

Tous ces pains au chocolats, ces muffins et ces sandwichs me font baver. Je me retourne et vois une étagère avec des sacs de bonbons. Je regarde encore une fois la vitrine puis lève les yeux sur l'étalage de pain. Je lis les noms des baguettes une à une jusqu'à voir un nom sans pain présenté. Je regarde la vendeuse d'un air interrogateur puis demande :
"- Vous n'avez plus de pain aux céréales ?
- Non, désolé
- Et... Vous ne refaite pas une fournée aujourd'hui ?
- Je ne sais pas...
- Vous pourriez aller verifier s'il vous plaît ?
- Bien bien. Je vais voir je reviens dans 30 secondes"
Sur ces mots, elle part dans la cuisine de la boulangerie. Je regarde si personne d'autre n'est là, non. Puis passe très vite derrière le comptoir et prend deux croissants. Je les glisse dans mon sac et prend le sandwich le plus près de moi et le met avec les croissants puis retourne du bon côté du comptoir comme si de rien n'était. Et, n'entendant aucun bruit de pas, je vais à l'étagère et prend un sac de bonbons et le fourre dans mon sac aussi.

Les talons de la vendeuse résonnent sur le sol et deviennent de plus en plus forts. Elle retourne à sa caisse et ne remarque aucun manque.
"- Non désolé nous ne faisons plus de fournée jusqu'à demain matin.
- Bon, tant pis.
- Repassez demain
- Ouais ouais..." dis-je sans enthousiasme puis part en saluant la vendeuse tout de même.

Une fois sortie je jette mon skate par terre, monte dessus et roule le plus vite possible en direction de la maison.

Arrivée dans la rue, je deviens mon skate, le ramasse, et marche rapidement tout en me retournant régulièrement. Je passe le portail, fais le tour de la maison et rentre par la même fenêtre. Je remonte à l'étage et repose mon sac dans la chambre. Je m'asseois en tailleur à côté de mes affaires, pose mes mains sur mes genoux, inspire, puis ferme les yeux. Je me concentre sur ce que je ferais pour partir de cette maudite ville. Un courant d'air froid me passe dans le dos et me fais frissonner. Je rouvre les yeux et regarde le dos de mes mains, puis les retourne et observe mes paumes. Sales. Noires. Abîmées. Je ressens un courant de froid dans mon dos et frissonne encore une fois. Je met alors mon gilet puis descend au rez-de-chaussée. Je vais dans le salon. Ou du moins la pièce que j'utiliserai comme salon si j'avais des meubles. Je me dirige vers la cheminée et m'asseois devant. Encore en tailleur. Les parois intérieures sont très noires, le sol encore gris et couvert de cendres, et une vieille bûche à moitié brûlée est toujours présente. Mon faible souffle fait voler les cendres les plus proches de moi, et le silence se fait. Je sens mes paupières lourdes, mes yeux fatigués, mes muscles détendus... J'attend. Mais quoi ?

Je fixe le sol, puis perd mon regard dans mes pensées. Je revois les images des filles... De mon père... De ma mère... Du sang... Alex... Je cligne des yeux et reprend mes esprits. Puis me lève, remonte à l'étage, prend mon sac et sors un croissant.
. Je le mange en moins deux et nettoie les miettes tombées au sol. Puis je vais dans la salle de bain, toujours à l'étage, et va devant le miroir au dessus du lavabo. Je regarde mon visage abîmé, ma peau, mes cheveux, puis retire mon gilet et regarde mes épaules. Ma peau et recouverte de griffures, quelques vieilles cicatrices,...
Je remet mon gilet et sors de la pièce en me jurant de ne plus jamais me regarder dans un miroir. Se voir le visage décomposé, la peau abîmée, les lèvres si sèches...
Je sors mon téléphone et regarde l'heure et vois que j'ai 2 nouveaux messages.
Je regarde celui de... Alex :

Je voulais te dire...
Adieu, et bonne chance surtout.

Je souriais quand j'ai vu que c'était de sa part, mais mon sourire a disparu au mot "Adieu".
Je relève la tête et fixe quelques secondes le plancher puis regarde le second message qui est de....

Ne t'en fais pas,
Je me suis occupé de ta mère
Bientôt ce sera à ton tour
Prépare toi,
Je ne compte pas te faire de cadeaux

Inutile de dire de qui il s'agit.
J'éteinds l'écran de mon téléphone et va m'asseoir à côté de mon sac. Sans aucune sensation, aucun sentiment, rien. Pas même la peur.
Je range mon portable dans le sac et je regarde le sol. Le plancher foncé laisse bien apparaître la poussière....

Soudain j'entend un bruit venant du rez-de-chaussée. Mon corps se crispe, je me lève d'un bond, et va sans bruit sur le palier.
Aucun bruit.
J'attend encore un peu et entends à nouveau un bruit venant du bas.
Mon père ? Non par pitié pas lui ! J'essaie de chasser cette idée de ma tête et descend silencieusement les marches. Je fais en sorte qu'elles ne grincent pas trop sur mon passage et arrive en bas. Je vais ensuite dans la cuisine et vois une personne en train de fouiller dans les vieux placards suspendus. Il a sa capuche sur la tête, un sac à dos sur une épaule, et doit être un peu plus grand que moi en taille.
Puis soudain, il se retourne et me voit. Il se stop net à ma vue et lâche ce qu'il a dans les mains. Nous restons quelques instants sans parler puis il brise le silence :
"- Je....
- ...
- Qu'est ce que tu fous là ?
- Euh non toi qu'est ce que tu fous là ? J'étais là avant jte signal.
- Ah bon ? Désolé je m'en vais alors"
Il se baisse pour ramasser ce qu'il a fait tomber et s'approche de moi puis me le tend.
"- Si tu étais là avant, ce que je trouve ici t'appartient.
- Non garde le.
- Sérieux ?
- Oui
- Ow c'est gentil merci."
Sur ces mots, il le rangea dans son sac.
"- Dit, je n'ai pas envie de te déranger, tu ne saurais pas où je pourrais passer la nuit ?
- Euhh... Non je sais pas.
- Ok tant pis.."
Il se rapprocha alors de la fenêtre cassée et mon sur le rebord pour sortir.
"- Attends !"
Je le rattrape par le tee-shirt avant qu'il ne franchisse l'issue. Il se retourne, toujours sur le rebord.
"- ...
- Ne t'embête pas à chercher plus loin. La maison est assez grande pour nous deux
- Oui mais je ne veux pas te déranger j'ai dit
- Tu ne me dérange pas du tout.
- Alors.... Je peux rester cette nuit ?
- Oui"
Je lui souris et il descend du rebord de la fenêtre. Il enlève sa capuche et me souris.

C'est...
Je le connais...
Je l'ai déjà vu quelque part...

Une Raison de PartirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant