* Abi (suite) *

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— Dépêche-toi !

Le chuchotement n'était pas très fort, mais la sècheresse du ton incita Abi à accélérer. Zigzaguer entre les voitures, contourner les objets en tout genre qui jonchaient les trottoirs, comme cette machine à laver... La jeune femme regarda derrière elle, perturbée.

Pourquoi avait-il fallu qu'elle se porte volontaire pour ce réapprovisionnement ?

Killian — surnommé « Kill » — ne l'appréciait pas vraiment. Elle n'aurait su dire pourquoi, car jusqu'à présent, elle était restée dans son coin, sans faire de vague. Mais après l'avoir côtoyé plusieurs jours, elle avait de toute façon compris qu'ils ne pourraient jamais être amis.

Elle détestait son côté autoritaire et dominateur.

Elle rejoignit enfin le groupe posté devant une petite épicerie, dans laquelle ils rentrèrent un par un, tandis que le dernier montait la garde.

Abi n'était pas sûre que cela serve à grand chose, au vu de la ville déserte, mais elle s'abstint de le faire remarquer.

— Bouge tes fesses, fillette !

Kill venait de passer à côté d'elle, la bousculant au passage pour attraper deux boîtes de conserve solitaires cachées au fond d'une étagère.

— Rappelle-moi quel âge tu as, le tueur ? rétorqua Abi, sarcastique.

Killian ne répondit pas et continua de prendre tout ce qui pourrait leur être utile. La jeune femme ne lui donnait pas plus de dix-neuf ou vingt ans. Il avait encore des marque d'acné sur le visage.

Abi, à son tour, fit le tour des étagères pour prendre ce qu'il restait : des mouchoirs en papier, une boîte de lingettes désinfectantes, une bière.

Une bière !

L'alcool était la première chose qui avait disparu depuis « la fin du monde ». À croire que les gens avaient soit fêté l'évènement, soit étaient trop désespérés et s'étaient saoulés à n'en plus finir.

Killian lui arracha la canette des mains.

— Eh eh, poupée, jolie trouvaille !

— Rends-moi ça, gamin, t'as pas l'âge pour ces trucs-là !

— Ah oui... ?

Le garçon la poussa doucement pour la coincer contre les étagères, se collant de manière explicite à elle. Il était plus grand, de presque une tête, ce qui aurait pu faire penser qu'il dominait la situation.

— Je suis assez vieux pour faire plein de choses... susurra-t-il avec un sourire qui se voulait enjôleur.

Abi soupira.

— Désolée, j'ai passé l'âge de jouer à la marelle, rétorqua-t-elle en le repoussant.

Killian se mit à rire.

— Tu es une drôle de fille, toi. Tu as quel âge ? Vingt-deux, vingt-trois ans ?

La jeune femme fronça les sourcils.

— Vingt-huit...

— Si vieille que ça ?! s'exclama le jeune homme, surpris.

Abi haussa un sourcil.

— Tu parais plus jeune, poupée.

Et il poursuivit son chemin, à la recherche de nourriture.

Abi le contempla, se demandant si elle devait se sentir flatter ou pas. Elle n'était même pas sûre que ce soit un compliment.

Haussant les épaules, elle continua à son tour de fouiller les rayons, puis se dirigea vers la sortie.

Que tombent les feuilles... [EN PAUSE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant