3 Mètres Au Dessus Du Ciel : Une Vie Avec Toi

So raise your glass if you are wrong, in all the right ways

-Tu sais je n'ai pas vraiment voulu que ça se passe comme ça. Je veux dire, j'ai rien prémédité du tout. Il fallait juste que ça arrive.
-ouais il faut croire que c'est le karma. J'en étais sûre de toute façon. Je savais, dès l'instant où j'ai prononcé ton nom, que ça allait bouleverser les choses. Je me demande encore si j'ai bien fait.
-Arrête de te poser cette question Kat, on est des grandes personnes, on fait nos propres choix comme des grands. Tout seuls. C'est fou hein?
-si seulement ça pouvait être si simple! Je ne sais pas pourquoi mais je flippe, c'est comme ça. J'ai l'impression que quelque chose ne va pas bien se passer. Tu sais, Gin est vraiment volcanique, elle peut péter les plombs ou pire, faire péter les plombs à H.

Babi repose son verre de limonade au pamplemousse sur la table ronde en céramique du charmant bistro dans lequel elles ont l'habitude d'aller. La légère brise la fait frissonner gentillement mais elle ignore s'il s'agit du vent ou de l'évocation du nom de celle à qui elle vole une partie de la vie, et pas n'importe quelle partie!

-tu ne m'as jamais vraiment parlé de Gin avant, je ne suis pas sûre de vouloir en savoir plus. J'ai l'impression d'être une voleuse, une belle garce même.

En y réfléchissant Babi a honte. A cause d'elle, une femme va souffrir, à cause d'elle une autre va voir son monde s'effondrer. Et pourtant elle ne peut s'empêcher de sourire en pensant à H. Et à avoir envie de vomir à l'idée de le savoir avec une autre.

-et bin oui, concrètement t'es une garce, dit Katina en éclatant de rire.
-Arrête de rire Kat, c'est pas drôle.
-c'est vrai, c'est pas drôle du tout, ajoute Kat en redevenant sérieuse, tu voles un homme à une autre et c'est moche mais vous êtes amoureux depuis le premier jour alors ça peut s'excuser. C'est vrai c'est pas comme si vous veniez de vous rencontrer. Je pense que Gin est ton substitut. H à eu besoin d'elle pour t'oublier, pour avancer sans toi, mais elle ne t'a jamais remplacée.
-n'empêche, il est avec elle depuis un moment maintenant.
-oui et elle est complètement accro. Je te le dis, ça ne promet rien de bon. Je crois qu'elle a un grain.

Babi éclate discrètement de rire en rejetant la tête en arrière.

-tu ne l'aimes pas beaucoup on dirait, je me demande ce qu'H a bien pu lui trouver.
-elle était drôle et fougueuse, libre comme l'air et sauvage comme une lionne. Elle était compréhensive. Elle était tout ce que tu n'étais pas.

Babi s'étrangle avec son sa gorgée de limonade.

-désolée mais c'est la vérité Babi, s'excuse Kat, il avait besoin de quelqu'un qui le comprenne et qui soit là pour lui. Et ce n'était pas ton cas.
-c'est vrai, avoue Babi en baissant la tête sur son verre presque vide, je n'étais plus là pour lui. En fait je n'étais plus là pour moi non plus. J'ai toujours cru que je devais obéir aux règles qu'on m'imposait, être une gentille fille et ne surtout pas décevoir mes parents. H était le piment, la bouffée d'air dans mon monde bien huilé. Quand tout est parti en vrille, j'ai eu peur. Tu vois? Peur de tout perdre. J'ai été hyper égoïste je le sais. Mais j'ai changé maintenant. Je ne vois plus les choses comme avant. Ça c'est certain. Je veux être moi même et obéir à mes propres règles, je ne veux plus jamais me conformer aux normes imposées par les autres. Je veux vivre ma vie comme je l'entends. Et je veux réparer un peu du mal que je nous ai fait.

Babi et Kat se regarde en silence quelques secondes, attablées l'une à côté de l'autre, ignorant les clients qui discutent autour d'elles, elles n'entendent pas les rires, ni le bruit de la rue. Dans ce regard complice il y a l'empreinte du temps, une preuve d'un passé commun irréfutable et éternel, un passé pourtant révoqué. Dans ce regard il y a aussi une promesse bien réelle et très sérieuse. Celle d'un futur ensemble.

-pour moi c'est déjà fait tu sais! Dit finalement Katina, notre amitié est déjà réparée.
-je t'adore ma pépite, lui dit Babi en l'enlacant subitement.
-je suis contente pour H et toi tu sais. C'est la preuve que l'amour peut triompher. C'est tellement romantique! Allez je lève mon verre à votre amour indéfectible.

Babi et Katina trinquent bruyamment ensemble sous le regard amusé de leurs voisins de table, fraîches et insouciantes  comme de jeunes adolescentes.

...

Quand H rentre chez lui, il n'a qu'une envie : prendre une douche et éliminer l'odeur de la mécanique. Alors, à peine passé le pas de la porte, il se jette dans la baignoire. Toute la journée il a pris soin de refouler son cerveau, torturant ses poignets à coup de tournevis sur ses motos malades pour oublier qu'il va bientôt devoir réfléchir. En sortant de la salle de bain, l'évidence le prend à la gorge alors qu'il balaye l'appartement des yeux.
Il arpente les pieces les unes après les autres, doucement, religieusement. Se disant qu'ici ce sera bientôt un champs de ruine. H se frotte le visage avec énergie. Comment va t-il s'en sortir?
Comment?
Faire semblant au téléphone c'est assez facile mais devant elle il ne sait pas comment faire. Gin a le flair d'un renard affamé et il sait qu'elle a déjà senti quelque chose. Au ton de sa voix tout à l'heure, à ses silences inhabituels.
Non décidément H n'est pas sûr de lui. Cette situation ne lui ressemble pas et ça le met mal à l'aise même si l'idée qu'il se fait de l'infidélité ne ressemble en rien à ce qu'il vit avec Babi.
C'est comme s'il avait toujours été à elle, et qu'elle était à lui.

Il passe sa main sur la commode abîmée du couloir menant à la chambre et caresse l'arête du bois du chambranle de la porte. Il regarde le lit défait. Il regarde la fenêtre entrouverte, il regarde l'armoire béante qui degueule de fringues de filles. Il regarde cet univers dans lequel il ne s'est jamais senti chez lui.
Il soupire soudain en s'asseyant lourdement sur le lit, la tête entre ses mains. Il se dit qu'il s'est foutu dans une belle merde, très belle. Il ne changerait pourtant rien. Il se demande ce qu'il faut faire maintenant : ses valises? Attendre de parler à Gin?
Il ne sait pas quoi faire mais pour la première fois depuis longtemps il n'est pas perdu. Il lui prend alors une furieuse envie d'appeler Babi, juste pour entendre sa voix douce et tranquille.
Assis sur le lit, avec une serviette autour de la taille pour seul vêtement, il attrape son téléphone qui gisait là entre les draps.
Au bout de deux sonneries, elle répond et son intonation déclenche un sourire merveilleux sur le visage de H.

-hello!
-salut Babi! Ça va?
-très bien si tu veux tout savoir. J'ai bu un verre avec Katina après le travail et je rentre tranquillement là. Et toi ça va?
-oui, je...je suis chez moi et je...enfin j'avais envie d'entendre ta voix. Juste...Comme ça.
-ça n'a pas l'air d'aller H! Dit Babi en arrêtant de marcher.
-si si ça va, je suis juste chez moi, enfin chez Gin et moi et je me sens bizarre. C'est tout. J'avais juste envie de t'entendre.

Après quelques secondes de silence Babi poursuit.

- Je suis là,H, Pour de vrai. Je sais que ça doit être un peu étrange pour toi mais je suis avec toi. Dans tout ce qui t'attend de bien et de mal. Je suis là pour toi.ok?
-oui, dit H en riant, qu'est ce qui t'arrive? Je te trouve bien emballée d'un coup.
-et bien j'ai juste envie de vivre ma vie à fond c'est tout. Ah! et aussi...je suis amoureuse de toi Hugo. Je t'aime. Je suis désolée de foutre le bordel dans ta vie. Vraiment désolée mais je m'en fous en fait parce que je suis totalement dingue de toi. Alors oui, je suis un tout petit peu emballée comme tu dis.

En entendant Babi, H s'est allongé sur le lit, les yeux rivés au plafond et un sourire béat sur les lèvres. Dans sa poitrine une haie d'honneur chante l'hymne national.

-tu es toujours là H? demande Babi en reprenant son chemin.
-non, je suis plus là mon amour, je suis quelque part entre le paradis et toi.