Kageyama

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Kageyama était étendu de tout son long dans un lit vide. Ses bras étaient repliés derrière sa tête, ses jambes croisées. Il regardait le plafond, sans vraiment le voir, le menton relevé.

-Tobio ?

En entendant son prénom, il se retourna lentement pour voir Oikawa se trémousser sur place pour enfiler son jean –nan mais, quelle idée de porter des trucs aussi serrés, soupira intérieurement Tobio. Enfin, il supposait que c’était pour montrer ses belles jambes qu’Oikawa portait ce genre de slim. Longues et musclées, constata-t-il rêveusement. Lui-même était beaucoup plus longiligne, plus fin, et il se demanda étrangement si ce genre de vêtement pourrait lui aller. Il ramena à contrecœur ses yeux sur le visage d’Oikawa, même s’il n’était pas moins plaisant, en insufflant un peu d’interrogation dans les orbes bleus. Il n’était pas vraiment d’humeur à parler, et planait encore loin au-dessus de la réalité, l’esprit brumeux.

-Je te ramène ?

-Chez moi ?

La question était stupide, bien sûr, mais Kageyama se laissa déborder par l’étonnement. Il n’avait jamais envisagé qu’Oikawa puisse essayer de se montrer serviable, ou du moins attentionné à ce niveau là.

-Oui.

-Je peux rentrer en bus, répondit-il simplement.

Les yeux d’Oikawa se teintèrent de blanc quand leurs billes chocolat roulèrent vers le haut.

-Y’a plus de bus, Tobio, il est minuit moins le quart.

L’information mit un certain temps à arriver au cerveau de Kageyama.

-Attends, quoi ?

-On s’est endormis, gros malin !

-Hé, en quoi c’est de ma faute ?

-C’est toujours de ta faute, grommela Oikawa, le reste de ses paroles perdu dans le tissu du sweat qu’il enfilait.

Tobio ne relança pas. Ses pensées le guidaient à quelques kilomètres de là, chez lui. Hinata devait se dire qu’il ne rentrerait pas avant le lendemain. La culpabilité lui parcourut tout le corps et il balança ses jambes hors du lit pour commencer à collecter ses vêtements sur le sol. Une fois complètement rhabillé, il alla chercher son sac de cours qu’il avait laissé tomber près de l’entrée et se figea.

- Oh, putain. Mes devoirs.

-La voiture, grogna plutôt Oikawa en ouvrant la porte. Grouille-toi, j’ai pas que ça à faire.

-Et t’as quoi d’autre à faire au milieu de la nuit ? répliqua Tobio.

Bien sûr, pas moyen d’avoir une discussion normale sans qu’ils ne finissent par se disputer. Il suivit Oikawa dans les escaliers obscurs, en tenant la rampe d’une main pour éviter de tout dégringoler.

-Tout un tas de choses, poursuivait le plus âgé, qui n’en démordait pas et voulait absolument avoir le dernier mot. La vaisselle, ranger…

-Il est minuit.

-…changer les draps, déjà ! Débarrasser le salon, tout nettoyer…

Tobio eut la vision fugitive d’Oikawa avec un tablier et un balai à poussières. Certes, il savait qu’il était loin d’être un tire-au-flanc, mais tout de même, son image de beau gosse futile contrastait avec le portrait de fée du logis qu’il se dressait. Il sut qu’un sourire stupide était apparu sur son visage quand sa mâchoire se retrouva broyée entre les doigts d’Oikawa. Quand il relâcha enfin sa poigne, Tobio avait l’impression d’avoir les joues trouées, et l’autre passeur souriait comme s’il venait de recevoir son cadeau de Noël. C’était la deuxième fois aujourd’hui que ce scénario se produisait.

Des Coeurs et des CorpsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant