Aranïi tome 1 : Les héritiers

Chapitre 5

-Avez-vous des questions ?

Mr Hens, le professeur de mathématiques, regarda sa classe. Personne ne semblait perdu. Personne... Sauf une élève : Madoka Greyver. Celle-ci avait le regard fixé au tableau, mais ne semblait ni y voir les nombres, ni les calculs.

-Madoka, l'apostropha-t-il, quelque chose ne va pas ?

La jeune fille sortit brusquement de sa rêverie. Elle regarda une minute Mr Hens, interloquée, mais fini par répondre :

-Non, monsieur, tout va bien.

Le professeur plissa les yeux, mais fini par hausser les épaules et continua son cours. 

Mr Hens n'était pas le seul à avoir remarqué l'absence totale de réaction de la part de Maddie. Cordelia Clark, la meilleure amie de la jeune fille, qui se trouvait juste à côté d'elle, l'avait bien vu, elle aussi. D'habitude, Madoka était toujours vive, tantôt parlant avec le professeur de méthodes et d'exercices, tantôt expliquant des calculs ou des cours que ses camarades n'auraient pas compris. Mais là, rien. Elle était comme perdue dans ses pensées, ce qui était rare chez elle.

-Maddie ? Lui demanda Cordelia timidement, tu vas bien ?

Une fois de plus, Madoka immergea du flot de pensées dans lequel elle s'était perdue.

-Quoi ? Murmura t-elle en se tournant vers son amie.

-Tu vas bien ? Répéta une nouvelle fois la jeune fille, tu es bizarre, depuis le début de l'heure. Il s'est passé quelque avec ton frère ? D'ailleurs, où est-il ?

Madoka se détourna et fronça les sourcils. Pendant quelques secondes, son visage se crispa de culpabilité.

-Je... J'ai dit à Mr Hens qu'il ne se sentait pas bien... Mais, en fait, je ne sais pas, avoua t-elle à son amie. On s'est disputés, tout à l'heure, et il avait un comportement étrange. Il m'a presque fait peur...

En se remémorant ses souvenirs, Madoka étouffa un sanglot.

-Ça ne nous était jamais arrivé d'avoir une telle dispute, se lamenta la jeune fille. Je ne sais plus quoi penser...

Cordelia serra le poignet de son amie dans un geste réconfortant.

-Ne t'en fais pas, la rassura-t-elle, tu sais qu'Alessandro est un peu... Spécial. Laisse le réfléchir quelques temps, et tout se passera bien.

-Le problème, c'est qu'il est tout le temps seul, enchaîna Madoka. Et il souffre, ça se voit bien ! Je ne veux pas le laisser dans cet état.

Cordelia regarda son amie, laquelle aussi souffrait. Elle s'inquiétait toujours trop pour tout le monde, en particulier pour son frère.

-Et que penses-tu faire ? La questionna-t-elle.

-Je vais retourner le voir, décida Maddie. Je dois aller m'excuser.

-Je ne suis pas sûr que tu m'aies...

-Bon, Cordelia et Madoka ! S'énerva alors Mr Hens, c'en est assez de vos bavardages ! Je vous entends depuis tout à l'heure, c'est inadmissible ! Madoka, vous qui êtes une jeune fille sérieuse, je m'étonne de votre comportement ! Alors veuillez vous réveiller et revenir parmi nous, si vous ne voulez pas vous retrouver avec une punition !

Les deux amies baissèrent la tête, et restèrent silencieuses jusqu'à la fin du cours.

Madoka s'extirpa tant bien que mal de la foule qui peuplait le hall. Elle fut aussitôt rejoins par ses quatre amies, lesquelles bavardaient joyeusement. Seule Cordelia voyait bien le trouble dans les yeux de Maddie.

-Ne me dis pas que tu compte aller lui reparler ! Gronda-t-elle, je t'ai dit que tu devais le laisser réfléchir !

-Il n'a pas besoin de réfléchir, il a besoin que je lui parle, insista la jeune fille.

Cordelia leva les yeux au ciel. Ce que son amie pouvait être bornée, parfois !

-C'est ton droit ! Finit-elle par céder, mais ne vient pas te plaindre s'il te braille encore dessus !

Madoka sourit et courut vers les toilettes des garçons. Après s'être assurée que personne ne la voyait, elle y pénétra. Alessandro avait bien choisi son endroit pour rester seul. Aucun élève ne venait dans ces toilettes froides et crasseuses, préférant nettement rester au chaud dans celles du hall. Cependant, quand Maddie y entra, elle ne vit personne. Aless n'était plus adossé au mur. Et toutes les portes des toilettes étaient ouvertes.

-Aless ? Demanda Madoka d'une voix tendue, Alessandro ?

Mais il n'était plus là.