Chapitre 19

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Ils tombaient. Toujours plus bas. Ou plus haut, ils ne pouvaient le dire. Ici, les notions d'espace et de temps ne voulaient plus rien dire. Ils auraient très bien pu être propulsés dix milles ans en arrière, ils n'auraient eu aucun moyen de le savoir.

Leurs corps étaient comme scindés en deux. Tantôt ils avaient l'impression de filer à une vitesse vertigineuse, au point de sentir l'adrénaline faire battre leurs cœurs, tantôt la lenteur et le poids de leurs muscles leurs paraissaient insupportables. Leurs esprits ne comprenaient se qu'il se passait, si bien que les jumeaux ne pouvaient même pas aligner deux pensées correctes. Ils étaient perdus entre évanouissement, somnambulisme et éveil. Pendant une seconde, ils étaient en proie avec une terrible torture, et la seconde d'après, un merveilleux sentiment de bien-être les submergeaient.

On ne pourra pas tenir...

Nos corps vont lâcher !

A chaque nouveau bon dans l'espace, des chuchotements, à peine audibles, parvenaient à leurs oreilles et s'assemblaient entre eux pour produire un bruit de fond irritant, comme un bourdonnement d'insectes incessant. C'était... Intenable. Il fallait que cela cesse. Immédiatement !

Et c'est là que le temps paru se figer. Alors que, jusqu'à là, les jumeaux baignaient dans une sorte de lumière blanche tellement éblouissante qu'on avait l'impression qu'elle n'existait pas, des formes et des couleurs se détachèrent, difformes et mélangées, si bien qu'elles n'avaient pas vraiment d'identification. Enfin, elles se précisèrent et les jumeaux purent nettement voir un décor de forêt prendre forme tout autour d'eux. Les grands arbres verts, l'herbe et les fleurs, les cailloux, des chemins étroits, les buissons, les arbustes et quelques oiseaux apparurent, donnant au paysage des allures de peinture.

Soudain, les jumeaux furent projetés dans ce décor à peine terminé. Ils s'écrasèrent au sol, leurs têtes tournant dangereusement. Ils restèrent allongés sur l'herbe tiède pendant plusieurs minutes, complètement retournés par leur voyage dans l'espace qui leur avait parut interminable. Autour d'eux, tout n'était que calme et sérénité, le ciel brillait d'un orangé vif, très différent des couleurs du ciel de la Terre. Cependant, rien, ni dans l'air, ni dans le paysage ne pouvait montrer que Madoka et Alessandro se trouvait sur une autre planète, certainement à l'autre bout de l'univers. Pendant un instant, les deux adolescents restèrent là sans bouger, sans parler, à regarder ce ciel, presque jumeau de celui de leur bonne vieille planète Terre. La Terre...

Nous sommes sur Aranïi...

Cette pensée fit se lever brusquement Alessandro. Oui ! Ils avaient réussi ! Ils étaient parvenu sur la planète, Aranïi ! Tout c'était passé sans encombres, comme Célio le voulait...

En pensant à son père, le jeune garçon sentit une énorme boule lui comprimer l'estomac et les intestins. Leur père... Qu'ils avaient abandonnés aux griffes des Goodrins. Il était probablement... Alessandro gémit rien que de penser à cela. Sa sœur posa une main réconfortante sur son épaule.

-On a réussit, murmura-t-elle.

Son frère acquiesça.

-Et... Et papa ? Demanda-t-il, hésitant.

Au regard que lui adressa Madoka, il sut qu'elle pensait la même chose que lui. Il devait y avoir très peu de chance que Célio ai pu s'en sortir. Alessandro détourna la tête. Il inspira et expira profondément, ses narines se remplissant de l'ai frais et épicé des arbres autour d'eux.

-Que fait-on maintenant ? Questionna-t-il.

Maddie se leva et regarda tout autour d'elle. Ils se trouvaient sur une planète inconnue, et ne possédaient aucun repère. Il y avait de quoi paniquer... Mais la jeune fille ravala son angoisse. Cette planète, il fallait la sauver, et pour cela ils devaient garder leur sang froid.

Elle tendit la main à son frère.

-Commençons par sortir de cette forêt et regagner une ville ou un village. Ensuite, nous improviserons.

Aranïi tome 1 : Les héritiersOù les histoires vivent. Découvrez maintenant