Chapitre 22

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Le trajet pour atteindre la maison de Lugio ne fut pas très long, et les jumeaux furent soulagés de pouvoir enfin se reposer. L'habitation qui leur faisait face était plutôt grande, toute en longueur, certainement bâtie dans un bois spécial car celui-ci était d'un beau vert luisant. De grandes fenêtres rondes étaient, avec la porte, les seules ouvertures, cependant nous ne pouvions pas voir l'intérieur de la maison en raison des vitres qui reflétaient la forêt comme des miroirs. Le lieu en lui-même était chaleureux et respirait la tranquillité.

Lugio ouvrit la grande porte d'entrée, décorée d'arabesques aussi complexes qu'artistiques, et se retourna vers les jumeaux.

-Après vous, les invita-t-il à entrer. Mes parents ne sont pas là, ils travaillent dans le village voisin : Prechto. C'est assez loin, à pieds, c'est pourquoi demain je demanderai à mon père de nous emmener avec lui. Il possède une wirgn, ajouta-t-il, fier de lui.

Aless lança un coup d'œil d'incompréhension à sa sœur, laquelle lui répondit avec le même regard. Il devait certainement s'agir d'une automobile ou, au moins, d'un moyen de transport.

-Depuis Prechto, continua Lugio qui entraîna le frère et la sœur dans ce qu'il semblait être une grande salle à manger, nous louerons un jett, ça ne coûte pas très cher, et c'est assez rapide. Si tout ce passe bien, nous devrions être à Kaldia en deux jours maximum. Cela vous convient-il ?

-Oui, parfait ! S'exclama Madoka avec un grand sourire, merci beaucoup de tout ce que tu fait pour nous...

-Bien sûr, ce ne sera pas gratuit, répondit le jeune homme en relevant le menton d'un air hautain.

Les jumeaux se regardèrent, inquiets. Cela n'échappa pas à Lugio, qui laissa échapper un ricanement.

-Vous ne croyiez tout de même pas que j'allais faire cela par pur plaisir ? Surtout pour des inconnus qui, ne le voyez pas mal, m'ont l'air plutôt suspects !

-Merci, ça fait très plaisir, grommela Alessandro entre ses dents.

-Le problème, rétorqua Madoka en donnant un coup de coude à son frère, c'est que nous ne possédons aucun argent sur nous !

Le jeune homme croisa les bras et sembla méditer un instant, ses yeux vagabondant de Maddie à Aless. Enfin, il secoua la tête.

-Alors je ne peux rien pour vous, finit-il par répondre.

Alessandro se renfrogna et s'apprêta à repartir, quand sa sœur le retint par le bras avec force. Hors de question de laisser filer leur seul moyen d'atteindre la capitale pour de simples problèmes d'argent ! Il devait bien y avoir une autre solution, qui déciderait Lugio à les aider tout de même...

-Alors dis-nous ce qui te ferais plaisir, déclara-t-elle, sans perdre son assurance légendaire, quelque chose dont tu aurais besoin et dont nous pourrions nous approprier. Nous te le donnerons en échange de ton aide pour nous rendre à Kaldia.

Lugio plissa les yeux. La jeune fille espérait de tout son cœur qu'il accepterait - et que la chose qu'il leur demanderait alors ne serait pas très compliquée à trouver. Après tout, il représentait la seule personne capable de les conduire au palais. Et elle se voyait mal se rendre avec Aless à pieds à cette fameuse ville qui, d'après Lugio, semblait assez loin.

-Bon d'accord, finit par céder le jeune homme, j'accepte votre proposition.

Maddie laissa son visage s'illuminer d'un grand sourire, témoignant de son soulagement. Elle se tourna vers Aless, dont les bras croisés sur sa poitrine et dont les traits de visage étaient, eux, messagers de méfiance. Sans doute devait-il penser à l'aspect négatif des évènements, comme d'habitude.

-Ce que je veux, enchaîna Lugio, c'est une Blase.

Devant le regard perdu de Madoka, le jeune homme réprima un grognement.

-Vous ne savez pas ce qu'est une Blase ? Mais de quel monde débarquez-vous ? Une Blase est comme une sorte de badge, qui possède l'ADN de son porteur. Ainsi, celui-ci est directement connecté à sa Blase et peux lui commander toutes sortes d'ordres, en fonction de la modernité de celle-ci. Par exemple, elle peut envoyer des flammes, des courants d'air, des fumigènes, de l'eau, ainsi que de l'électricité. La toute dernière Blase à être sortie possède une capacité à détecter les mensonges en émettant un léger "bip" . Et moi, je veux celle-ci.

-Mais, euh... Marmonna Madoka qui déglutit avec difficulté, est-ce bien... Légal ? Tu n'es pas un peu... Jeune, pour posséder pareille objet ?

Lugio se passa la main dans ses cheveux en un geste d'agacement. Il avait l'air d'en avoir vraiment marre, de ces gosses ignares ! Il fallait tout leur expliquer !

-Je vais finir par croire que vous venez d'une autre galaxie ! S'énerva-t-il, vous ne savez donc pas que, ici, sur Aranïi, les adolescents atteignant l'âge de seize ans ont le droit de posséder une Blase pour se défendre en cas d'attaque ? Et cela vaut aussi bien pour Capréïa que pour Agapé !

Maddie se gratta le bras dans un geste de frustration. Quant à Aless, il leva les yeux au ciel et secoua la tête, comme pour se dire que cela ne servait à rien de chercher à s'énerver à son tour.

-Et concernant le prix ? Souffla la jeune fille en fixant le sol.

-A peu près deux cents calixtes et quatre-vingt-dix ylins.

Là, Alessandro laissa échapper un soupir d'agacement. Bien sûr, c'était évident qu'il allait leur donner l'unité de l'argent d'Aranïi ! Mais Maddie et lui n'avait aucune idée de ce que cela pouvait représenter, si c'était une grosse somme, ou s'ils pouvaient se procurer cet argent assez facilement. C'était tellement frustrant de ne rien connaître de ce monde et de son commerce. Peut-être même que Lugio avait vu clair dans leur jeu, et était-il en train de se moquer d'eux. Après tout, qu'est-ce qui leur disait que les habitants de cette planète ne possédaient pas des dons de télépathie, puisse qu'ils étaient capables de fabriquer des objets pouvant détecter les mensonges ?

Si seulement Célio leur en avait dit un peu plus, si seulement ces Goodrins n'avaient pas chercher à le kidnapper, lui et Maddie... Ils n'en seraient pas là.

-Aless ! Souffla pour la cinquième fois Madoka.

Celui-ci se tourna vers sa jumelle, laquelle le regardait avec inquiétude. Puis, ses yeux se posèrent sur Lugio, qui attendait leur décision.

-Je comprendrais si vous refusez, leur dit-il. Mais, si vous possédez de la famille travaillant au palais, vous n'aurez aucun problème à me payer ma Blase.

Madoka regarda Aless avec insistance. Celui-ci haussa les épaules, comme pour dire "Fais ce que tu veux". Enfin, elle ramena son regard vers le jeune Capréïen, qui attendait toujours, une lueur d'arrogance dans ses yeux cannelle.

-Nous acceptons, déclara-t-elle, nous t'achèterons donc une Blase, une fois arrivés à Kaldia.

-Bien ! S'enthousiasma Lugio, tout le monde y gagne, en fin de compte ! Nous partirons donc demain.

Il se tourna vers une sorte de pendule en fer, qui, au grand soulagement des jumeaux, avait l'air de fonctionner comme les horloges terriennes.

-Dix-huit heures vingt-neuf, conclut le jeune homme en guidant ses hôtes vers une grande pièce qui tenir lieu de cuisine, mes parents ne vont pas tarder à rentrer. Environ dans vingt à trente minutes. Vous allez m'aider à mettre la table et préparer à manger. Mais avant cela...

-Quoi ? Rétorqua Alessandro, déjà sur la défense.

-Allez prendre une douche. Vous empestez.


Aranïi tome 1 : Les héritiersOù les histoires vivent. Découvrez maintenant