Somniloquie (Partie 2)

608 37 3
                                    

La nuit dernière, j'ai à nouveau utilisé le dictaphone de mon portable. J'ai également décidé d'installer deux caméras numériques, une dans ma chambre, et une en face de la porte du grenier. Après avoir effectué la mise au point sur chacune des deux, je me suis senti confiant. Je n'avais pas le temps pour ces conneries, aussi voulais-je juste en finir. Malheureusement pour moi, ce n'était pas aussi simple.

J'ai dormi toute la nuit, comme d'habitude, mais j'ai fait un rêve étrange. Je sais bien que ce n'est que mon imagination débordante, et que ça n'a rien à voir avec ce qui s'est passé, mais je me sens quand même obligé d'en parler.

Dans ce rêve, j'étais chez moi. J'étais assis sur mon canapé à regarder la télé, quand j'ai entendu un grattement qui semblait venir d'en haut. Naturellement, j'ai supposé que c'était des rongeurs, mais le bruit devenait de plus en plus fort. Ça s'est finalement changé en une série de coups. C'est à ce moment que je me suis levé pour voir ce qu'il en était.

Le temps que je me rende devant la porte du grenier, le bruit avait cessé. Je suis resté planté là un moment, attendant qu'il reprenne. Je n'ai rien entendu du tout pendant ce qui m'a semblé être plusieurs minutes. Puis, sans crier gare, un cliquètement brisa le silence. C'était le pêne qui s'était déverrouillé tout seul. Et c'est là que je me suis réveillé.

Comme je l'ai dit, ce n'était qu'un rêve bizarre, sans importance par rapport à ce qui se passe, mais je ressens quand même le besoin de le mentionner. Je n'ai pas eu d'autre rêve de ce type, et j'ai dormi le reste de la nuit jusqu'à ce que mon alarme sonne quelques heures plus tard.

Après m'être réveillé, j'ai immédiatement rassemblé les caméras et mon téléphone. J'avais hâte de voir s'il y avait des résultats. Et il y en avait, mais ils m'ont laissé avec encore plus de questions.

À la moitié de l'enregistrement, sur mon téléphone comme sur la caméra de ma chambre, je m'entendais demander une fois de plus « Où es-tu ? ». Il n'y a pas eu de réponse, ni de bruit parasite, mais il y a eu un son, retentissant, le même que celui précédemment enregistré. C'était celui d'une porte claquée.

Dès que je l'ai entendu, j'ai attrapé la deuxième caméra pour voir ce qu'elle avait. La porte du grenier ne s'est jamais ouverte. On pouvait toutefois entendre le bruit en arrière-plan, très faible. Etant donné son volume sur chacun des enregistrements, il semblait possible qu'il s'agisse de la porte de la cave. Après n'avoir rien trouvé d'autre d'étrange, j'ai décidé d'aller vérifier une nouvelle fois la cave.

Avec un mélange de nervosité et d'adrénaline, j'ai couru jusqu'à la porte, et je l'ai presque défoncée en l'ouvrant. Je me suis précipité en bas des escaliers et j'ai allumé la lumière. Ça commençait à me gaver de penser que quelqu'un se fichait de moi. Cependant, lorsque la pièce s'est illuminée, elle n'avait rien d'autre à offrir que ce spectacle familier de cave vide, complètement vide. Pas d'intru, et pas de réponse.

Je me suis rendu au travail frustré, en essayant de ne pas penser à ce qui s'était passé. Plus facile à dire qu'à faire. Je n'ai cessé d'envisager différents scénarios toute la journée durant, sans qu'aucun ne soit cohérent. La seule explication qui me venait en tête était qu'il s'agissait d'un esprit, du grand n'importe quoi. Je ne voulais pas accorder de crédit à cette hypothèse, mais j'étais à court d'idées.

J'ai essayé d'en reparler à mes collègues, dans l'espoir qu'ils me rassureront. Mais ça a été le contraire. L'un d'entre eux m'a dit d'appeler les flics et de les laisser fouiller la maison à la recherche de traces d'effraction. Un autre m'a conseillé d'aller chez un ami. Bill m'a dit d'abandonner la maison et de m'enfuir dans les collines. Il blaguait bien sûr, mais ça ne m'a pas rassuré pour autant.

Les choses ont commencé à devenir bizarres lorsque je suis rentré chez moi.

A peine de retour, j'ai balancé ma veste sur le canapé et je me suis affalé dessus, pour décompresser. Immédiatement après m'être assis, j'ai entendu à nouveau le bruit. C'était clair comme de l'eau de roche. C'était le même son que celui de mes enregistrements, mais cette fois je l'entendais en vrai.

J'ai sauté du canapé, et mon regard s'est tout de suite dirigé vers la porte de la cave. On pouvait bien la voir depuis le canapé, elle n'avait cessé d'être dans mon champ de vision. Et même si je ne l'avais pas regardée directement, j'étais catégoriquement certain qu'elle n'avait pas bougé d'un pouce. Pourtant, c'est de là que venait le bruit. La curiosité l'emporta sur ma peur, et je décidai d'y retourner.

Je me suis approché prudemment et j'ai examiné la porte de la cave. Rien n'indiquait qu'elle avait été claquée. Le bois sur son pourtour était intact, et le sol en dessous n'avait pas une égratignure. J'étais désorienté. La seule chose à faire était de retourner à l'intérieur.

J'ai ouvert la porte et descendu les vieilles marches grinçantes pour ma troisième inspection de la cave. Arrivé en bas, j'ai allumé la lumière. Je m'attendais à la trouver vide une nouvelle fois. Et au premier coup d'œil, elle m'a semblé l'être. Cependant, en y regardant de plus près, j'ai remarqué qu'il y avait bien quelque chose de différent.

Au fond, au milieu du mur, il y avait une porte. Ça m'a fait frissonner. Ma cave n'avait pas de porte. J'en étais certain. Je le savais déjà avant d'acheter la maison, avec la visite. Et il n'y avait pas non plus de porte les deux dernières fois. Ça n'avait pas une once de sens.

Je m'en suis approché, abasourdi. Je ne savais pas d'où elle venait, mais je savais qu'elle était à l'origine de ces bruits. Il n'y avait aucune autre explication. Alors que je m'approchais de cette absurdité, j'ai remarqué quelque chose qui m'a donné la chair de poule. J'ai reconnu le bois, le style, et le pêne.

C'était la porte du grenier.

Don't Read at Night | Tome 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant