Chapitre XVII: Yellow

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Certains peintres transforment le soleil en un point jaune ; d'autres transforment un point jaune en soleil.

Pablo Picasso

La pièce est carrée, et vide.

Complètement vide. Pas un meuble, pas une tapisserie. Seul les murs jaunes canari ( il faut quasiment des lunettes de soleil pour regarder ces murs) apportent une touche d'humanité à la salle. Mais puisque la salle est vide, il n'y a plus personne dedans.

Ma conscience me souffle que je suis très intelligent d'une voix sarcastique. J'ai remarqué que puisque la pièce est vide, il n'y a personne dedans.

Mais si il n'y a personne dedans, où sont passés les propriétaires des deux voix ?

Alors, petite conscience ? On fait moins la maligne ?

Il faut vraiment que j'arrête de parler à ma conscience, sinon les gens vont commencer à croire que je suis fou ( du moins ceux qui ne sont pas déjà persuadé que je le suis).

Je m'avance pour entrer en remettant mes discussions philosophiques avec mon moi intérieur pour plus tard lorsque je sens une main se poser sur mon épaule.

Je sursaute et me retourne pour voir qui vient interrompre ces investigations hautement importantes. C'est l'infirmière de tout à l'heure :

-Qu'est-ce que vous faites là jeune homme ? Il est interdit aux élèves de se promener dans ces couloirs s'ils n'ont rien à y faire. Et il est d'autant plus interdit d'ouvrir des portes fermées !

Elle qui me prenait déjà pour un bagarreur, maintenant elle va être persuadée que je suis un terroriste.
Je baisse la tête et essaie de me défendre :

-Je suis désolé, j'ai cru entendre des voix et...

-Le fait d'entendre des voix ne justifie en aucun cas le fait d'ouvrir des portes fermées. Si elles le sont, c'est qu'il y a une bonne raison. Tu aurais pu interrompre une réunion importante. Cela aurait pu être n'importe quoi comme pièce, dit-elle en remettant une mèche de cheveux qui s'est échappé de son chignon derrière son oreille.

-A la prochaine incartade, je ne manquerai pas de faire un rapport complet à Mme la directrice. Tu mériterait même que je parle de ta blessure au nez.

C'est à partir de là que je décroche. N'importe quoi comme pièce!? Je n'ose pas imaginer la scène si j'avais ouvert la porte sur une salle de bain. Ou sur une chambre ! Ou un sauna. Bref, une salle avec des gens pas assez habillés pour mes yeux. Beurk !

Une voix me rappelle tout à coup à l'ordre :

-Dites donc, jeune homme, tu m'écoutes ?

Je cligne des yeux pour revenir à la réalité. L'infirmière me fixe de ses yeux noirs. Oups. J'ai comme qui dirait zappé. Concentration Nathanaël, concentration !

Je penche la tête vers l'avant pour montrer ma soumission.

-Je suis désolé, cela ne se reproduira plus. Je vous le promet.

-J'espère bien. Allez, viens avec moi.

Je la suis en me demandant bien où elle va m'amener. Dans une salle de torture ? Si ça se trouve elle voudra tester des nouveaux médicaments sur moi en échange de son silence. Ou alors elle va me découper en morceau et me revendre bout par bout au marché noir. Rien qu'à cette idée je frémis.

En fait, elle m'emmène jusqu'à la sortie. Elle veut être sûre que je sors bien et que je ne continue pas de fouiner partout avant de me quitter des yeux. Je sens son regard peser sur moi jusqu'à ce que je sois en haut des escaliers.

Je me retourne pour vérifier... et rougis lorsque je remarque qu'elle est encore là et que je viens de me faire griller.

Mais ça m'embête cette histoire de pièce vide. Je vais en parler à Ayumi, elle saura sûrement quelque-chose. En deuxième année, elle a fait une étude sur les architectures des différents bâtiments de l'école. Si passages secrets il y a, elle est au courant.

Je pars en direction de sa chambre. Je suis tellement concentré que je ne regarde pas où je vais. Ce qui entraîne ce que ça devait entraîner.

Je me prends les pieds sur une marche et me casse la figure. Aujourd'hui n'est pas mon jour. Je sens que ce n'est pas fini. Une ou deux tuiles vont encore me tomber dessus d'ici ce soir. Je lève la tête pour vérifier que ça n'est pas en train d'arriver littéralement.

En me relevant, je vérifie que personne ne m'a vu. C'est bon, ce n'est pas maintenant que je me fait filmer et que je vais passer dans un bêtisier quelconque.

Je m'époussète distraitement et reprends enfin mon chemin. Quand je suis en salle de sport, je me sens super vif, je me sens en adéquation avec mon corps, mais pour l'instant, qu'est-ce que je me sens empoté. J'ai l'impression d'avoir deux pieds gauches.

J'arrive enfin devant la porte d'Ayumi et je frappe délicatement du poing contre le battant.

Aucune réponse.

Je retape et demande :

-Ayumi ? Tu est là ? avant d'ouvrir la porte.

J'entends un sifflement puis tout devient noir.

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