Chapitre XVII

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Je le voyais dans son regard, il n'attendait que cela, ce moment où je ferai l'action de trop. Il avait toujours son petit sourire aux lèvres, alors qu'il savait pertinemment que je m'apprêtais à le cogner, jusqu'au sang s'il le fallait, c'était tout ce qu'il méritait. J'y étais presque, mon visage à quelques centimètres du sien, sentant presque sa respiration sur ma peau, mais il avait fallu seulement une seconde, une seconde d'hésitation, pour que la voix de ma mère me ramène à la raison :

"Ethan je t'en supplie, ne fais pas ça !"

J'avais le point levé pourtant, j'étais prêt à le faire, mais il avait fallu que je lui jette un regard, que je vois son visage ruisselant de larmes pour m'abstenir de mettre son visage en sang. Sa sale face sarcastique qui me rappelait tellement celle de son fils. Est-ce que sa mère était aussi répugnante qu'eux ? Sûrement... Mais je n'avais pas envie de le vérifier.
La pièce était silencieuse, plus personne n'osait bouger ou parler. Je me tenais toujours debout devant lui, le bras tendu, légèrement tremblant, les phalanges de mes mains blanchies soudainement. Tout le monde semblait attendre une réaction, la mienne ou peut-être celle de Morelli. Mais je ne savais pas quoi dire, ou que faire, et lui semblait se délecter de la situation, ses yeux bruns brillants. Finalement, à ma plus grande surprise, ce fut Matthis qui coupa cette étrange torpeur, où le temps avait semblé s'arrêter. Il s'approcha de moi, se mettant sur la pointe des pieds pour attraper mon bras, toujours levé, et l'abaissa doucement.

"On sera plus avec maman si tu fais ça Thanou."

Mon cur se serra en l'entendant dire ça. Il ne semblait pas avoir compris... Je lui adressai un petit sourire triste avant de lui ébouriffer les cheveux. Je m'accroupis pour être à sa hauteur.

"Matthis, nous n'allons plus être avec maman.
- Pourquoi ?
- Parce que cet homme, je pointai Morelli du doigt, a décidé de nous pourrir la vie tant qu'il le pouvait."

Matthis cligna plusieurs fois des yeux, observant l'agent de police sans comprendre. Il était encore trop petit, et je préférais cela, qu'il ne réalise pas, il souffrirait moins.
Emilie s'approcha de nous, posant sa main sur mon épaule. J'eus d'abord l'idée de la retirer sèchement avant de me raviser, ce n'était pas à elle que j'en voulais. Je levai alors les yeux vers ma mère, elle avait enfoui son visage dans ses mains, son corps agité de sanglots. Mon coeur se serra un peu plus, certes ma mère n'était pas un exemple irréprochable en terme de parent, mais je savais qu'elle faisait du mieux qu'elle pouvait pour nous offrir la vie la plus descente possible. Ce n'était pas tant que cela pour moi que j'étais inquiet, dans un peu plus d'un an j'aurais la majorité et n'aurait pu à être sous la tutelle de quiconque, c'était pour mon petit frère. Matthis méritait d'avoir la belle enfance que je n'avais pas eu.
Me redressant, je me tournais vers l'assistante, qui était visiblement très mal à l'aise devant moi, fuyant mon regard. Ceci me fit sourire intérieurement, elle devait surement me prendre pour une de ces raclures incapables de contrôler son impulsivité. A vrai dire, c'était presque le cas parfois.

"On doit vous suivre je suppose ?" m'exclamai-je.

Ma voix sembla la faire tressaillir.

"N-non, vous pouvez passer la nuit ici. Quelqu'un viendra vous chercher demain soir vers 19 heures vous conduire au foyer, en attendant d'avoir des examens plus poussés."

J'acquiesçai en silence tandis qu'Emilie récupérait sa mallette, visiblement toujours aussi gênée. Elle nous salua rapidement avant de se diriger d'un pas rapide vers la sortie, suivie quelques instants après par Morelli, les mains dans les poches, sa démarche nonchalante ravivant ma haine envers lui et sa famille. Il nous adressa un petit signe de main, son grand sourire dévoilant ses dents étincelantes avant de se retirer lui aussi, claquant la porte d'entrée derrière lui.
Nous nous retrouvions seuls dans le salon, certainement pour la dernière fois. Ma mère avait relevé la tête, ses yeux bleus rougis. Elle me semblait tout à coup extrêmement fragile, comme-ci tout le poids du monde s'était subitement abattu sur ses épaules. Matthis restait près de moi, son regard rivé sur notre mère, la mine inexpressive. Son manque de réaction était presque inquiétant et je voulais croire qu'il était simplement trop jeune pour saisir la réalité des choses. Moi, j'étais debout, ne sachant que faire, mon regard oscillant entre mon frère et ma mère, cette journée qui avait plutôt bien commencé s'avérait être l'une des plus désastreuses de ma vie.

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