Xiumin - Les erreurs du passé

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« L'obscurité n'est pas synonyme de mal, tout comme le mal n'est que purement relatif »

Comment peut-t-on le définir ? Est-ce possible de noter une action de un à dix selon sa méchanceté ? Une petite fille commettant un vol peut être perçue comme sournoise, mais une petite fille commettant un vol pour nourrir sa pauvre famille malade est considéré comme un geste mignon. Le mal n'est qu'une question de perceptions. Un meurtrier en série est comme le pire des démons, n'éprouvant aucuns sentiments. Pourtant, son enfance a été des plus malheureuses, toujours seul et ignoré des autres, subissant leurs moqueries. Derrière tous les actes se trouvent une raison. Les raisons poussent désormais chacune de mes actions, mais je ne le savais pas autrefois. Je ne savais rien.

Avant de dire si une personne est bonne ou mauvaise, il faut d'abord la connaître, n'est-ce pas ? Ne jamais mettre une personne dans un camp ou l'autre parce qu'il préfère la lumière ou l'obscurité. Cela n'a aucune incidence. Pendant trop longtemps, j'ai fait cette erreur. En me mettant une idée derrière la tête, vint un temps où je l'ai cru. Qu'importe à quel point elle était erronée. En le voyant brûler l'école, le village et toutes les personnes innocentes qui s'y trouvaient la seule chose que j'ai pu penser de lui est qu'il était mauvais. Alors que je pleurais de désespoir en voyant tous ce que j'ai toujours connu flamber, il souriait d'un air satisfait.

Des sens surdéveloppés, une nouvelle alimentation, l'immortalité. C'est ce qu'il m'avait donné peu avant de changer et de partir pour de bon. Je ne savais presque rien de ce monde. Cela avait tout d'un cadeau empoisonné. J'ai du tout apprendre de mes propres moyens. À la dure. La soif était très difficile à maitriser au début. Errant de villages en villages, la rumeur des deux nouveaux dirigeants du monde se répandait. Peu importe où le vent me portait, les noms Hakai et Osore se faisaient constamment entendre. La haine ne faisait que grandir. Être son gardien était absolument insupportable : j'avais à la fois envie de le tuer et de le protéger.

Les années passaient. La seule chose qui restait inavouée du temps passé fut à quel point sa présence me manquait. Malgré la haine. Les succès toujours plus nombreux de la SM ont soumis la majorité des vampires. Leur plus grand exploit est d'avoir exterminé une population complète de lycanthrope avec un seul vampire. Hakai. Comment osait-t-il tuer des milliers de pauvres bêtes innocentes uniquement pour du pouvoir, me demandais-je. C'est avec d'un élan de rage que je créai un groupe de rebelles. Le premier à oser faire une rébellion.

À cette époque, je n'avais pas réalisé que mon précieux protégé était sous l'influence de l'obscurité, de son frère. Avec du recul, cela est plus qu'évident, comment aurait-t-il pu faire des choses aussi atroces de sa propre conscience ? J'étais si jeune et inexpérimenté... Je m'étais convaincu que Chen n'était qu'un vil démon capable uniquement de faire souffrir et de détruire. Que ce que nous avions vécus ensemble n'était qu'un gros mensonge. Y croire avait été le seul moyen de vaincre mes propres démons intérieurs. Un sentiment profond de tristesse m'aurait anéanti dans le cas contraire. La mort aurait alors été ma meilleure option. Peut-être alors que ce que j'ai fait était bien ? Ou cela reste-t-il mal ? Avec les rebelles, j'ai beaucoup tué de vampires qui étaient sous l'emprise d'Osore. Je ne savais pas qu'on pouvait leur réapprendre le bien. Pas encore.

Leur pouvoirs grandissait si vite que le Conseil ne pouvait plus rivaliser avec eux. Le seul choix qu'ils avaient était de les laisser faire. Nous étions de moins en moins nombreux à oser se rebeller et seule la mention du nom Hakai était maudite. Tout le monde le connaissait, les humains compris. Bien sûr, ils ne savaient pas qu'il était un vampire. J'ai alors eu l'occasion de le revoir, de loin. Me promenant dans un champ, j'entendis des bruits. En avançant prudemment, je commençais à distinguer plusieurs personnes. Osore et un vampire inconnu d'un côté, et une centaine de mètres plus loin Hakai en train de tuer des dizaines de villageois. Agir aurait été stupide, je serais mort. En veillant à rester caché sous les hautes herbes, je m'approchais encore un peu d'Hakai. Son regard était noir et ne reflétait aucunement le bien. Ses mains en sang témoignaient de la cruauté des gestes qu'il commettait. Les hurlements de terreur s'échappant par moments de la bouche des pauvres victimes lui dessinaient un sourire démoniaque au visage. Pourtant, à ce moment précis les seules choses que je pouvais voir en lui était la tristesse et la solitude. Ses mouvements étaient presque mécaniques, blasés. J'eu alors la certitude que Hakai et Chen n'étaient définitivement pas la même personne. Mes doutes et mes incertitudes envolés, je ne pus que me rappeler à quel point il me manquait. J'avais passé plus de temps sans lui qu'avec lui, mais le manque me comprimait de plus en plus le cœur. Mon instinct de gardien n'avait jamais été aussi fort qu'en cet instant. La seule chose que j'avais envie de faire était de l'aider. Qu'importe le reste. Le mal ne l'habitait pas, il ne faisait que contrôler son enveloppe corporelle c'est seulement là que je le réalisais.

Après cette journée, je n'abandonnai pas pour autant les rebelles. La SM restait une menace et j'avais un plan. Un soir tranquille, quelques volontaires décidèrent d'aller directement là-bas. Cette opération spéciale visait initialement à découvrir les prochaines cibles qu'ils avaient prévus abattre. Malheureusement, Hakai nous prit en flagrant délit. Enfermés, la majorité d'entre nous craquèrent. Hakai les extermina sous mon regard indifférent. À présent je pouvais voir au-delà de ce masque de cruauté. Son signal de détresse était finalement parvenu à moi. La conversation qui a suivi a été tout ce qu'il lui fallait pour revenir. N'en pouvant plus d'attendre, je pose mes lèvres sur les siennes. Je ne m'attendais pas du tout à ce qu'il y réponde, mais ma joie n'en fut que décuplé.

Pour effacer son passé, Chen avait pris possession du bâtiment de la SM et était allé au Japon. Là-bas, il avait tout brûlé, il avait exterminé je ne sais combien de vampires et ruait son frère de coups. Cet être démoniaque ne méritait pas de vivre après tout ce qu'il avait fait, mais... Puisque tout le monde a une raison qui les pousse à devenir ce qu'ils sont, quel est donc la raison qui a fait de lui ce qu'il est ? Cette pensée m'obsédait au point que je ne pouvais me résoudre à le laisser mourir. Il fallait que je le découvre. Et pour ce, j'ai empêché Chen de le tuer. Nous sommes tout simplement retournés en Corée et avons fait de la SM une maison habitable. Tout le mobilier fut remplacé pour lui permettre de vraiment recommencer à zéro.

Chen m'a demandé en mariage lorsque son côté maudit laissa ressurgir cet être merveilleux. Chaque jour était magnifique. Chaque jour durant cent années, en réalité. C'était avant qu'on ne me tue...une première fois.

Dans ses bras, désormais, je me vide de mon sang. Je sais que ce n'est pas sa faute, je ne lui en veux pas. Jamais je ne pourrais lui en vouloir, peu importe à quel point je souffre. Je l'entends m'appeler. Si ma mort aura au moins permis de le faire revenir...j'en serai heureux.

Il ne veut pas me voir sourire alors que j'ai si mal. Ça me donne encore plus envie de pleurer, mais je connais mieux Chen que le fond de ma poche, et ses remords ne feront que doubler si je cède. Je ne veux pas que ce qui lui reste de moi, ce soit des larmes.

On s'embrasse, il pleure, je meurs. Les choses se répètent, il est impossible d'échapper à sa destinée. Cette fois je ne reviendrai pas, il le sait. Je le sais. J'observe Luhan. Une part de ma conscience me dit d'être égoïste. Même si je pars, je continuerai à l'aimer. Ça fera mal de le voir avec lui...lorsque je serai un gardien, un autre type de gardien, ceux qui veillent sur les vivants. Peut-être que ma forme, mon apparence, mon sexe changeront, mais mon âme restera la même, avec tous ses souvenirs.

- ...je t'aimerais pour deux alors maintenant...

Je réussis à tourner sa tête dans la direction de Luhan, au sol. Il me regarde lui aussi. Il s'en veut. Ça aurait dû être lui, mais ma place n'est plus parmi les vivants. Ma phrase reste en suspense si longtemps, car le dire est si douloureux. Je sens la fin proche, alors dans un dernier soupire, je le souffle

- ...vis.

Qu'importe ce qui se produit, il m'a offert plus ce que je n'ai jamais espéré alors même que j'étais toujours un homme. De quelque chose d'éternel...Il m'aura donné...

Il m'aura offert cent ans d'un amour éternel.

100 Ans D'un Amour ÉternelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant