Duperie augmentée

douze.

Au départ, elle me racontait ses débuts dans la terrible jungle qu'est la vie. Elle avait vécu une enfance heureuse, très entourée, son sourire était franc, brillant. Ses années collège étaient à peu près pareilles, seulement accompagnée de deux acolytes, c'était ses yeux qui brillaient dorénavant. Puis vint ses années lycée où sa gorge commence à se serrer. Ses deux acolytes avaient changé de fréquentations, elle était seule. Bien souvent, elle restait dans les couloirs entre les cours et même à midi, à lire un livre ou à pleurer à cause de la solitude bien trop lourde à supporter.

-    Puis, un jour, Gaspard m'a surprise en train de pleurer, il était venu discuter avec moi, m'avait réconforté, on a été « surpris » par sa petite copine, Mélanie, m'explique-t-elle alors sans doute la partie la plus dure de l'histoire, à partir de ce jour là, ma vie fut un véritable enfer, j'étais constamment ennuyée par leurs railleries, elles avaient affiché mon numéro de téléphone de partout, proposant aux garçons des services... peu catholiques comme si c'était de ma part... elle avale sa salive avec difficulté, quand je passais à côté d'elles au lycée, elles m'insultaient, une fois elles m'ont dépecée de tous mes biens sur la route pour rentrer chez moi...

Elle fait une pause, ne me regardant toujours pas. Ce que j'entendais déjà ne me plaisait pas et je haïssais Sophia de m'avoir menti et encore plus le Gaspard pour ne pas avoir porté ses couilles pour la défendre, car, on devait se l'avouer, il était la seule raison pour laquelle elle s'en était pris plein la tête...

-    Ce jour-là, mon frère m'a vu revenir sans rien et... c'est sans doute ses remarques qui étaient les véritables déclencheurs de... ce que tu sais... le plus gros harcèlement venait de lui, il leur donnait raison...

Je voyais bien qu'elle retenait ses larmes, elle me brisait le cœur et pourtant il m'en fallait beaucoup...

-    Ce genre de trucs se sont répétés pendant la moitié d'une année scolaire, c'est long... Et je savais que je n'étais pas au bout de mes surprises, j'avais envie d'en finir, d'autant plus lorsque je voyais que mon frère n'était pas de mon côté...

La suite n'était sûrement pas nécessaire au récit, j'en avais assez entendu. J'étais remonté contre toutes ces personnes qui avaient été contre elle. Mon instinct protecteur me dictait de les trouver tous un à un et la venger.

-    Seulement, y a pas très longtemps, j'ai appris que Sophia était la demie sœur de Mélanie et qu'elle ait essayé de te dissuader, ça me dégoûte encore plus... ajoute-t-elle tandis que ma mâchoire menace de se décrocher.

-    Comment ça « y a pas très longtemps » ? je demande, histoire de savoir combien de temps elle sait et qu'elle n'a rien dit.

-    Peut-être presque un an... elle hausse les épaules, j'me disais qu'elle n'était pas comme sa sœur mais bon... Apparemment pas...

Un silence prit place. J'emmagasinais tout ce qu'elle m'avait dit, non sans être choqué. Elle avait vécu tout ça pour qu'au final, de telles personnes inversent les rôles et la fassent passer pour la persécutrice ? N'avaient-ils pas honte ?

-    Et Gaspard dans tout ça ? Il s'était pas dit « tiens, je vais la défendre un peu ? » je demande, un peu sarcastique sur les bords à cause des nerfs qui menaçaient de lâcher.