CHAPITRE XX

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-Sam-


Annabel se rapproche de moi alors que je me dirige avec Lucas vers sa voiture.Elle pose une main sur mon bras et me fixe du regard. Je m'arrête et Lucas suit mon mouvement avant de m'interroger d'un haussement de sourcils. Annabel me montre sa voiture d'un léger signe de tête et je sais que c'est le moment.

_ Je vais rentrer avec elle, dis-je à Lucas. On se voit demain !

Le blond sourit et acquiesce avant de s'éloigner tout en levant les deux pouces, son sourire goguenard toujours aux lèvres. Je me tourne alors vers la traqueuse.

_ Qu'est-ce-qu'il y a ? Je demande.

Annabel se met en route vers son véhicule avant de me répondre et je lui emboîte le pas.

_ Je te rappelle que nous avons une conversation inachevée.

Je comprends de laquelle elle parle mais décide de faire celui qui ne sait pas.

_ Ah bon ? Comment ça ?

_ Pourquoi est-ce-que tu étais dans les bois, en même temps que moi ? M'interroge-t-elle sans détour.

Dans ma tête je cherche plusieurs excuses tout en fuyant son regard inquisiteur avant d'opter pour la franchise.

_ J'ai peur pour toi.

_ Tu avais peur ? Pour moi ? Répète-t-elle.

_ Non, j'AI peur.

Ses sourcils se froncent et elle passe sa main dans ses cheveux d'un geste nerveux tandis que ses joues se colorent de rose. Elle voit où je veux en venir.

_ C'est normal... Dit-elle. On s'inquiète tous les uns pour les autres...

Je lui prends alors la main et entends mon cœur battre la chamade ainsi que son rythme cardiaque qui s'emballe mais elle n'offre aucune résistance.

_ Je m'inquiète pour les autres... Mais encore plus pour toi...


-Julian-


Je tire sur un de mes poignards logé en plein centre d'une cible. Je le fais tournoyer entre mes doigts tout en me frottant les yeux de l'autre main. Depuis que j'ai... Tué Corentin – disons les choses telles qu'elles sont – j'ai parfois des insomnies. Mes nuits blanches alternent souvent avec les cauchemars et le manque de sommeil se ressent. Cependant je mets à profit ce temps pour aiguiser mes sens ainsi que ma pratique.

Je place de nouvelles cible dans la cave et m'éloigne d'elles pus je me mets de dos, prends une inspiration et tout en tournant sur moi-même, je lance mes lames en une fraction de seconde. Comme toujours, mon esprit a tout analysé en un regard et les poignards sont tous fichés en plein milieu des cercles.

Je pousse un soupir et m'accroupis sur le sol avant de réprimer un bâillement et me dis que le sommeil va peut-être me gagner finalement. Je me remets sur pieds, prends la direction de l'escalier et gravis les marches. Lorsque je débouche dans le salon, je remarque le bip rouge de la messagerie du téléphone et m'étonne que Marley ne les ait pas écoutés. Je m'approche alors et enclenche le répondeur tout en m'asseyant sur le canapé.

_ Les enfants c'est Maman, ça fait longtemps je sais mais avec votre père nous avons eu quelques petits problèmes, rien de grave ne vous inquiétez pas. On est encore en France et je ne sais pas quand on va pouvoir revenir. En attendant, on vous embrasse.

La tonalité de fin résonne et je rejette la tête en arrière tout en fermant les yeux. C'est comme ça chez les chasseurs, dès que notre première mission est réussie, on estime que les apprentis peuvent se débrouiller seuls. C'est valorisant dans un sens mais on oublie que les enfants ont besoin de leurs parents et aujourd'hui je sais que j'aurais eu besoin d'eux. Pourtant, je sais aussi que s'ils étaient là en face de moi, je n'aurais pas été capable de leur dire ce qui s'est passé dans les bois. C'est pour cela que je suis reconnaissant d'avoir Marley. Elle assume son rôle à la perfection et sans elle je ne serais pas là aujourd'hui.

Je me lève du canapé et vais dans la cuisine prendre un verre d'eau que j'avale en un instant. Puis sur un coup de tête, je me dirige vers la chambre de ma sœur. Sa porte est entrouverte, comme une invitation à y entrer mais je sais que c'est parce qu'elle a peur de manquer quelque chose, comme si on pouvait venir la kidnapper pendant la nuit et cette pensée me fait sourire. Je pousse le battant en bois et marche sur la pointe des pieds jusqu'à son lit. Heureusement, elle ne se trouve pas en plein milieu du matelas donc je peux me glisser entre les draps sans risquer de la réveiller.

Pourtant, quand je finis de prendre place ses yeux sont ouverts et me fixent, scrutateurs.

_ Tout va bien ? Demande-t-elle.

_ J'avais juste besoin de toi, dis-je tout en hochant la tête.

Elle attrape alors ma main et y presse ses lèvres.

_ Je t'aime Julian, ne l'oublie pas.

Je ne réponds rien mais n'en pense pas moins. Elle se tourne dos à moi et je passe mon bras sur sa taille pour la serrer contre moi. Peu de personnes pourraient s'imaginer ces moments entre frères et sœurs que l'on vit tous les deux et pourtant...

 Si je suis triste de ne pas partager d'instants privilégiés avec mes parents,j'ai ma sœur qui les remplace aisément et finalement, si l'on me donnait la possibilité de changer cela, je n'en ferai rien : j'ai une jumelle qui tient plus que tout à moi et des amis sur qui je peux compter.

SOUS LA PLEINE LUNEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant