CHAPITRE XIII

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-Annabel-


Immobile devant la forêt, j'entends son appel. Je n'ai toujours pas les réponses à mes questions et j'ai la nette impression que je les trouverai dans les bois. Ma sacoche à dessin sur l'épaule, j'avance un pied puis l'autre tout en jetant un coup d'œil par dessus mon épaule avant de m'enfoncer dans les bosquets. J'ouvre mon esprit pour mettre tous mes sens en alerte et c'est là que je l'aperçois.

La volute rouge sang traversée de fils noirs oscille devant moi, comme une invitation à la suivre. Je ne cherche pas à résister et m'engage sur cette piste qui est la seule que j'ai tout en faisant craquer quelques branches au passage. Je change ma besace d'épaule pour me rééquilibrer et ainsi éviter de faire trop de bruit. L'auras'entortille et s'enroule autour des arbres. Sa trajectoire est tout en courbes mais je coupe à travers les bois pour gagner du temps car même si j'ai très envie de découvrir ce qui se cache dans cette forêt, l'obscurité qui tombe me met mal à l'aise. Après une petite randonnée j'arrive dans une clairière mais je ne sais pas du tout s'il s'agit de celle de la dernière fois ou non parce que pour moi, tous les arbres se ressemblent dans cette foret. J'entends un craquement et tourne brusquement la tête.

Je ne suis pas seule.


-Sam-


Lucas chante à tue-tête alors qu'il me ramène en voiture après la fin des cours. Je souris tout en regardant le paysage. Chanter à s'en casser la voix, c'est pas vraiment mon truc mais de le voir s'amuser autant me fait sourire.

Soudainement quelque chose de flou passe devant la voiture à toute vitesse et le blond pille brusquement tandis que je m'accroche au siège.

_ LUCAS ! Je m'exclame.

La voiture est arrêtée depuis quelques secondes déjà mais mon pote n'a toujours pas desserré les doigts du volant. Je pose ma main sur son épaule et le secoue un peu. Il tourne alors vers moi des yeux agrandis par la peur.

_ C'était quoi ça ?

_ Je sais pas, je réponds puis jette un regard derrière nous. Par contre tu devrais bouger. Faudrait pas qu'on se fasse emboutir.

Nous sommes seuls sur la route mais Lucas tourne les clés et remet le contact le temps de se garer sur le coté. Après avoir éteint à nouveau le moteur, il se tourne vers moi et me sourit de toutes ses dents.

_ On va voir ?

Je le fixe surpris et hausse les sourcils.

_ On va voir ? Je répète.

Pour toute réponse, Lucas retire ses clés, ouvre la porte et sort avant de se diriger vers la forêt. Je soupire et l'imite en prenant sa suite quand un tit tit retentit derrière moi. Je regarde Lucas ou plutôt son dos avant qu'il n'agite ses clés sans ralentir puis les fourre dans sa poche. Je trottine pour me remettre à son niveau et nous marchons en silence à travers les buissons.

Après quelques pas une odeur étrange se met à titiller mes narines et je m'arrête le temps de voir si je la reconnais. Le problème, c'est que d'autres s'y mêlent alors. Lucas qui m'attend me jette un regard interrogateur.

_ Un problème ?

_ Des odeurs qui se mélangent, je n'arrive pas à voir si je les ai déjà senties.

Je lui passe devant et lui fais signe.

_ Alors toujours partant ? Je le questionne.

Mon meilleur ami hoche la tête.

_ Suis-moi !

Je l'entraîne un peu plus profondément dans les bois et nous débouchons dans une clairière. Ce que nous y trouvons nous bloque instantanément.


-Albérie-


Alors que j'ai été recrutée pour aider à trouver le meurtrier qui se fait toujours aussi discret et j'ai été désignée pour faire équipe avec Marley. Cette dernière avance d'un pas décidé et maintient toujours une certaine distance entre nous deux que de temps en temps je m'amuse à raccourcir pour la voir faire un pas de coté. Je pourrais la faire entrer dans les fougères si je le voulais. Je hume l'air pour voir si je flaire une odeur et secoue la tête en prenant garde à ne pas regarder Marley qui risque de lever les yeux au ciel. Soudain, j'entends un craquement et une bourrasque de vent me porte une senteur qui me fait froncer le nez.

_ Qu'est-ce-que tu sens ?

Je tourne la tête vers la chasseuse qui me jette un coup d'œil interrogateur.

_ Il y a quelque chose de bizarre, dis-je.

Un hurlement déchire alors l'espace nous figeant sur place. Quasiment en même temps, je me mets à frissonner des pieds à la tête de manière incontrôlable. Marley de son coté sort une flèche de son carquois et l'encoche dans son arc. Un second cri retentit tandis que je sens mon coté lupin se déchaîner et me tirailler de l'intérieur d'une douleur que je n'avais jamais éprouvé auparavant. Je tombe au sol, terrassée sous le regard inquiet de la jumelle qui laisse son arc tomber par terre avant de se précipiter vers moi mais je l'arrête d'un geste.

En l'espace d'un instant je laisse mon enveloppe humaine pour revêtir ma fourrure. Mais étonnamment je ne perds pas mes esprits alors que la douleur était déchirante. Je me relève sur mes quatre pattes et secoue la tête. Je croise le regard de Marley qui se tient sur ses gardes et courbe l'échine dans l'espoir qu'elle comprenne.

_ D'accord, dit-elle en passant ses doigts sur la corde de son arc qu'elle a repris en main en me voyant me métamorphoser. Tu sais pourquoi tu es comme ça ?

Je secoue la tête négativement et essaie de me retransformer sans réussite. Je fais quelques tentatives puis voyant que je n'arriverai à rien je décide de prendre les choses en mains – ou en pattes. Je me mets donc en route pour suivre l'odeur que j'ai repérée à toute allure car je sens que quelque chose ne va pas.

_ Attends-moi ! Crie Marley – loin – derrière moi. J'ai pas quatre pattes !

Je grogne d'impatience en l'attendant et entends des craquements. Dès que la chasseuse me rejoins je repars en quatrième vitesse. Nous débouchons sur une clairière où nous attend déjà pas mal de monde. Mon regard s'attarde sur Nathan et Julian qui se trouvent sur notre droite, Sam et Lucas sur notre gauche. De l'autre coté du cercle végétal se trouvent Annabel et un garçon que je connais du lycée ainsi un loup au pelage couleur châtain qui leur tourne autour en nous montrant les crocs.

Nathan esquisse un pas en avant et le loup tourne la tête vers lui en retroussant ses babines de plus belle. Une lueur rouge vient illuminer ses yeux.

_ Matthew, lâche alors mon petit ami d'une voix froide.

Le loup arrête ses vas et vient et son corps se met à se secouer de tremblements pour laisser sa place à un garçon de notre age aux cheveux châtains comme son pelage. Lorsque ses iris perdent leur couleur surnaturelle elles deviennent noires. Le fameux Matthew se relève et me dévisage avant de regarder Nathan et c'est là que je reconnais l'odeur.

_ Salut vous deux, dit-il en nous fixant tour à tour du regard. Je vous ai manqué?

SOUS LA PLEINE LUNEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant