Tu n'es pas seul

chapitre 6

21 septembre

Aujourd'hui c'est le dernier jour de trois mois de jeu. Nous allons enfin découvrir qui est le gagnant parmi les quatre finalistes.

Gagner n'est pas une finalité en soi mais j'apprécierai vraiment. J'aurai au moins accompli quelque chose dans ma vie. J'en suis venu à un point à vouloir gagner un jeu virtuel. Cela démontre bien la triste vie que je mène.

Chacun fait avec ce qu'il a.

Je suis plutôt de bonne humeur en cette soirée du mois de septembre. Être vendredi aide un peu. Demain je n'ai pas école, c'est une bonne chose.

Je n'ai pas oublié l'incident de lundi matin mais j'essaye de ne plus y penser, mais c'est quasiment impossible. Je sais que mes camarades de classe ne sont pas prêts à en faire abstraction. Pendant toute la semaine j'ai entendu quelques élèves de premières en parler dans les couloirs. Certaines personnes ont du raconter ce qu'il s'était passé. Je prétends ne rien entendre ou ne pas apercevoir les regards braqués sur moi, mais il n'en ai rien. J'observe tout; ne parler à personne m'a permis de développer cette capacité.

Désormais, je vais être catégorisé comme le garçon bizarre des Premières. Et ce n'est pas forcément comme cela que je souhaite être perçu, mais je ne peux m'en prendre qu'à moi-même. Et cela ne va pas être une tâche facile de faire changer l'opinion qu'ont de moi les autres élèves.

Néanmoins, je mets cette histoire dans un coin de ma tête; pour ce week-end entre temps. Je ne vais pas me gâcher les seuls deux jours où je peux être moi-même.

Comme à mon habitude, je joue la carte du garçon sans problème.

Je suis assis sur le canapé du salon, en compagnie de mes parents. On regarde le journal télévisé.

– Voilà comment le suspect a réussi à dérober le  plus précieux diamant du musée, conclu le présentateur à la fin de sa chronique.

Ma mère prend la parole, visiblement agacée.

– Je n'arrive pas à comprendre comment c'est possible de voler un joyau avec toutes les technologies qu'on a de nos jours. Et je ne comprends pas l'intérêt de faire cela. Ce n'est pas comme s'il allait vendre le diamant à un collectionneur.

J'hausse les épaules, je n'en ai aucune idée et cela ne m'intéresse pas.

Je ne peux m'empêcher de repenser au zéro que j'ai eu en cours d'histoire. Être avec mes parents me rappelle que je leurs mens constamment. Je préfère m'éclipser. Je me suis promis de ne pas y penser, la compagnie de ma mère et de mon père m'en empêche.

– Je monte dans ma chambre. Je vais commencer mes devoirs parce que j'en ai une tonne !

J'entends la réponse de mon père alors que je suis déjà dans le couloir.

– Si seulement tous les élèves étaient comme toi.

Ah.

S'il te plaît ne dis pas ce genre de chose. Cela me fait mal au cœur.

Si tes élèves étaient comme moi, tu ferais cours à des fantômes. Tu ne veux pas avoir quelqu'un qui me ressemble, je te le promets. Tu serais déçu si tu savais qui est tellement ton fils.