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Point de vue de Benoit
La journée et la nuit ont été horribles. Hugo est salement amoché. Sa jambe est dans un sale état et il souffre le martyr. Le pire, c'est qu'on ne peut rien faire pour le soulager. On n'a pas de médicament à lui donner. La seule chose qu'on a pu faire, c'est lui mettre une atelle faite à notre façon, enfin celle de Gracia. Elle avait fait la même chose pour le genou d'Antoine qui s'est plutôt remis alors pourquoi pas ? De toute façon, c'est ça ou rien.
C'est une horreur de voir un de ses meilleurs amis souffrir à ce point. Au foot, on peut se blesser, ça arrive, mais ce n'est pas douloureux à ce point. Et puis, on est tout de suite pris en charge par une équipe médicale. Là, on ne peut rien faire du tout à part être à ses côtés et lui changer les idées pour ne pas qu'il pense à la douleur, chose plus facile à dire qu'à faire.
— C'est si horrible que ça ?
Je lève la tête vers Hugo qui vient de prendre la parole pour l'une des rares fois depuis hier. Sa voix est serrée et il parle difficilement. Sûrement à cause de la douleur.
— C'est pas le top.
— Ben, dis-moi la vérité.
— Ta jambe est dans un sale état.
C'est la seule chose que je peux lui dire. Je veux pas entrer dans les détails, parce qu'il prendrait peur même si c'est Hugo Lloris le gars super calme et qui sait comment ne pas dramatiser. Là, je pense pas qu'il puisse rester calme s'il comprenait à quel point sa jambe était affreusement horrible. Saleté de tempête à la noix.
— Je t'ai ramené de l'eau.
— Et moi à manger.
Malia fait son apparition avec Adrian. Ils s'assoient à côté de mon coéquipier et la brune coupe la liane pour que l'eau sorte. J'en profite pour me lever et sortir de la grotte. La tempête s'est calmée depuis hier, mais le vent persiste. Ce n'est plus aussi violent, mais le calme n'est pas vraiment là encore. Combien de temps va-t-il falloir qu'on tienne pour qu'on nous retrouve ? Enfin, si les secours n'ont pas arrêté les recherches. Ça fait bientôt un mois qu'on s'est crashé et qu'on survit comme on peut dans cet endroit inconnu. On a vu qu'un seul avion par ici depuis qu'on est ici et c'est tout. Est-ce qu'ils sont assez stupides pour s'éloigner de la zone où a eu lieu l'accident ? On n'a pas pu aller bien loin de l'avion alors pourquoi mettent-ils autant de temps merde ? C'est pas compliqué de survoler une zone en long et en large !
Après Antoine, Malia, Hugo, à qui ça sera le tour ? Ils ont tous eu un problème, le genou, la fatigue qui les abat, un putain d'arbre qui lui tombe dessus, ça sera quoi la prochaine chose ? Est-ce qu'il va vraiment falloir qu'ils nous arrivent tous quelque chose pour que les secours se bougent le cul et nous retrouvent ? On dit qu'il ne faut pas perdre espoir, que l'espoir fait vivre, mais comment avoir de l'espoir lorsque nos chances de survivre sont si minimes ?
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Point de vue de Gracia
Il y a des moments où il faudrait oublier les vieux espoirs et s'en créer de nouveaux. Depuis l'accident, on a toujours espéré que les secours nous retrouvent, mais maintenant, les choses doivent changer. Notre espoir doit changer. Il n'est plus question d'être secouru, mais de survivre. C'est l'espoir de survivre auquel on doit penser. Ça fait un mois, un putain de mois qu'on est dans cet endroit inconnu et désert et on n'a pas été secouru. On ne le sera jamais. Au bout d'un mois, ils ont arrêté les recherches. On ne peut désormais que survivre et espérer avoir une vie un minimum normale. Enfin, ça ne pourra jamais être normal, mais on a réussi à vivre un mois alors pourquoi pas six de plus, ou même des années ?
Le monde est rempli de possibilités, et du moment qu'il y a des possibilités, il y a de l'espoir. Nous pouvons seulement perdre espoir lorsque nous refusons de voir les possibilités. C'est un certain Leo Buscali qui a dit ça, sûrement un de ces poètes qui avait perdu la boule en fumant un joint, les pieds sur le divan, l'appartement enfumé. Mais dans tous les cas, il n'a pas tort. Faut voir les possibilités qu'ils nous restent : se créer une vie ici, survivre, attendre les secours qui ne viendront certainement jamais, ou se laisser mourir. Ce sont nos possibilités.
— Gracia ?
— Qu'est-ce que tu veux, Antoine ?
— T'as disparu sans rien dire à personne et...
— Je suis grande et je suis pas en sucre.
— Des fois, je me le demande...
— Mais c'est quoi ton putain de problème ?
— Je t'ai encore entendu cette nuit. Tu n'as pas arrêté de pleurer dans ton sommeil.
— Qu'est-ce que ça peut te foutre ? C'est mes histoires, mes problèmes, pas les tiens. T'es bien gentil, mais tu me les casses légèrement.
Il ne répond rien et se contente de croiser les bras sur son torse. On est pas dans le monde des Bisounours où tout va parfaitement bien, tout est rose.
— J'essayais juste de te prévenir que les autres avaient aussi entendu et qu'ils allaient certainement te poser des questions sur ça, mais t'inquiètes pas, le gentil petit Antoine ne viendra plus te faire chier.
Il tourne les talons. Et merde... Je pensais pas à ça moi. Comment j'aurais pu savoir qu'il allait me dire ça ? « Antoine ? » Il ne répond rien et continue de marcher en direction de la grotte. Je le rattrape rapidement et saisis son bras afin qu'il se retourne. Ses yeux braqués sur moi, je me sens légèrement idiote.
— Quoi ?
— Au cas où on ne survivrait pas.
Sans attendre une seconde plus, je pose mes lèvres sur les siennes, le surprenant certainement étant donné que j'ai toujours été distance. Plus avec les autres que lui, certes, mais je l'étais depuis le tout début.