Les Gardiennes d'Aclosia

Chapitre 15

L'aurore trouva les trois gardiennes endormies dans la caverne, enroulées chacune dans une couverture. Elles avaient toutes les trois dormi la tête reposant contre le cuir de leur dragon, protégées par la chaleur de ces derniers et l'oreille aux aguets d'un cœur battant lentement.

Ce furent eux qui s'éveillèrent les premiers, poussant du museau leurs cavalières pour les sortir des limbes du sommeil - opération plus ou moins délicate selon la personne à réveiller. Elles finirent néanmoins par toutes se lever, plier les couvertures et les fixer à nouveau sur les selles. Elles démontèrent le camp après avoir avalé le reste du repas de la veille en guise de petit-déjeuner.

Ce furent Arukan et Anaca qui décollèrent en tête, lorsque tout le monde se fut assuré qu'il ne resterait pas de trace de leur passage derrière eux, dans la grotte. La jeune fille eut besoin de quelques minutes pour monter à nouveau sur le dos de son compagnon, s'agrippant une fois de plus fermement aux sangles de la selle. Elys et Klei furent les suivants, laissant Ven et Leya fermer la marche.

Une fois tous en vol, les dragons prirent tous les trois la direction d'Aosthan, à un rythme rapide, la blessure de Kleïark ne gênant plus ce dernier, grâce aux soins d'Anaca. Il leur fallu une journée et plus de la moitié du lendemain pour atteindre la ville, plus éloignée des falaises que la capitale Lisanthis, qu'ils dépassèrent en faisant un détour pour éviter de se faire repérer.

Arrivées en vues de la cité, les trois dragons se posèrent à quelques lieues de la ville. Lorsque leurs cavalières furent descendues, il fut décidé qu'ils resteraient à portée de pensée de la ville, afin que les trois cavalières puissent les prévenir lorsqu'elles seraient de retour. En attendant, ils se cacheraient dans un vallon non loin pour rester le plus discrets possible.

- Est-ce qu'on doit vous retirer vos selles ? s'enquit Leya à haute voix.

- Et que voudrais-tu faire avec ? Vous balader dans la ville en les portants à bout de bras ? Très discret ! Non, nous allons les garder encore un moment, on verra ce qu'on fera lorsque vous reviendrez, il sera peut-être temps de les retirer à ce moment-là.

- D'accord, Ven.

- Mais... merci quand même de ta sollicitude, petite sœur ! ajouta-t-il avec un clin d'œil.

Elles partirent donc à pied en direction de la ville, dont la silhouette se dressait au loin. Il leur fallut moins d'une heure pour atteindre la porte et entrer à l'intérieur, puis traverser les faubourgs. Lorsqu'elles arrivèrent aux abords des quartiers riches, le soleil de l'après-midi tapait fort sur leur tête. Si bien que ce fut trois gardiennes transpirantes qui s'arrêtèrent devant la porte d'Aglia. Elys frappa poliment au panneau de bois, attendant quelques minutes avant qu'un domestique n'ouvre.

Un domestique qui parut bien étonné en la reconnaissant.

- Dame Elys ? Mais...

- Bonjour, le coupa-t-elle d'un ton calme. Nous devons voir dame Aglia, mes amies et moi. Est-elle disponible ?

- Je... Oui mais, comment dire...

- C'est une urgence.

Le ton sans réplique de la jeune fille récolta un hochement de tête de son interlocuteur. S'inclinant une fois de plus, il ouvrit la porte un peu plus grand en s'écartant, laissant les trois invitées pénétrer dans la maison. Ces dernières le suivirent jusqu'à une petite véranda où trônait une table à quatre places.

Une pièce qu'Elys connaissait bien, puisque c'était là qu'elle avait passé deux ans à apprendre à maîtriser la lumière... et à mieux connaître l'Histoire qui avait mené ce monde-là où il en était. À mieux observer et comprendre ce monde qui l'entourait et qu'elle était censée protéger. C'était bien étrange qu'elle se retrouve ici aujourd'hui avec les deux filles de celles qu'Aglia lui avait appris à ne pas forcément voir comme des traîtresses. A vrai dire, c'était même presque ... ironique.