Ingrid

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INGRID

         Je déteste cette soirée. J'appréhendais qu'il vienne mais quand je l'ai vu accompagné c'était la fin de tout, d'autant plus qu'elle est au courant pour nous, ses insinuations ne laissent aucuns doutes. Elle joue avec moi, je le vois dans ses yeux quand elle pose les mains sur lui. Et lui, qui lui caresse la main, la nuque, le dos, je sais à quel point il peut être doux, ses caresses me brûlent encore aujourd'hui. Est-ce qu'ils ont couché ensemble? Oui, je suis sur que oui. L'imaginer me vrille les tripes. J'aurais du annuler, pourquoi ne l'ai je pas fait? Je m'attendais peut-être à le voir seul et désespéré, quelle naïve je suis.  Toutes les excuses sont bonnes pour quitter la table, je débarrasse au fur et à mesure, je prétexte une envie pressante, je sors fumer une cigarette...Christian me reprochera tout à l'heure d'être une mauvais hôte, mais je m'en contre-fout tant que je ne les ai pas sous les yeux.  Je suis occupée à la vaisselle quand la porte de la cuisine s'ouvre derrière moi:

"- J'arrive, dis je en soupirant."

Je pensant voir Christian en me retournant mais c'est Ben qui se tient devant moi, une pile d'assiettes dans les mains:

"- Ce n'est pas à toi de faire ça, dis je en refaisant face à l'évier. 

- Je me suis proposé, je voulais te parler."

Non, surtout pas. Je ne veux qu'une chose, c'est qu'il s'en aille. Il s'approche et pose les assiettes sur le plan de travail, à côté de moi. Il est trop près, sa chaleur m'irradie, son odeur m'enveloppe, il provoque chez moi des réactions incontrôlables, comme ces palpitations gênantes dans mon bas-ventre. Je devrais lui dire que je suis contente pour lui qu'il soit passé "si vite" à autre chose mais faire l'hypocrite n'a jamais été mon fort, ma jalousie se mue en colère:

"- Pourquoi lui as-tu dis pour nous?"

Je n'ose pas me retourner, j'ai peur de me laisser emporter en le regardant et que ma voix ne porte trop, il ne manquerait plus que les autres m'entendent:

"- Je ne sais pas, j'étais malheureux, besoin de parler sans doute...

- Tu n'avais pas à lui parler de moi. Toutes ces insinuations qu'elle me fait, vous prenez Christian pour un imbécile?"

Je garde obstinément les mains dans l'eau, je ne veux pas qu'il les voient trembler:

"- Ingrid, je..."

Il s'approche plus près, je dois absolument le tenir à distance:

"- C'est mieux comme ça Ben, le principal est que tu sois heureux.

- Et toi? Tu es heureuse?"

Comment ose t'il me poser cette question? Evidemment que je le suis. Qu'est-ce qu'il s'imagine? Qu'un coup de canif dans un contrat de vingt ans signifie la fin de mon mariage? J'ai eu un moment de faiblesse mais je vais me reprendre, j'aime toujours Christian, il n'y a donc aucune raison pour que ça ne fonctionne pas. Il doit comprendre mon silence comme une approbation car il fait demi-tour et retourne dans la salle. Je l'entend appeler Tom du bas de l'escalier. J'attrape un torchon pour m'essuyer les mains, je dois aller leur dire au revoir sinon Christian trouvera ça suspect. Il la tient serrée contre lui et me fixe avec un regard de défi...et elle qui minaude en l'embrassant dans le cou, qu'ils partent vite je n'en supporterais pas d'avantage. Je veux qu'il sorte et ne jamais le revoir.  Ben serre la main de Christian en le remerciant et m'adresse un signe de tête. Tom embrasse Laure sur la joue et rejoint son frère déjà sur le perron. La porte se referme sur lui...c'est terminé...bon débarra. Alors que Christian et Laure montent à l'étage pour se coucher, je retourne dans ma cuisine, j'ai encore de la vaisselle à nettoyer et ranger, ça m'aidera j'espère à évacuer ma rage. Je ne me rend pas compte du temps qui passe, car Christian fini par descendre ma chercher:

Ben (les loups 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant