Le Chemin du Cœur

CHAPITRE UN

Je ne pensais pas que ma simple vie serait aussi mouvementée.

Je jetais un œil vers la route qui défilait avec vitesse. Je soupirais en tournant la tête en direction du conducteur de la voiture. Il s'agissait d'un homme dans la quarantaine, les cheveux blonds courts et un regard brun sympathique.

Mon père.

Et une fois de plus je lui en voulais, non c'était bien plus que cela. J'étais dans une colère noire.

Il y a quelques jours de ça, j'avais appris que j'allais emménager dans une ville totalement inconnue, en pleine année scolaire. Même ce nom de ville m'était étranger, comme s'il s'agissait du trou du cul du monde !

Très réjouissant que d'arriver dans un lycée et se faire repérer...

Je n'aimais pas être le centre de l'attention. Pourtant, je devais suivre mon paternel, il se faisait muter dans des entreprises différentes et dans des villes opposées. Combien maintenant ? Trois ou quatre fois depuis ma seconde ? Une fois de plus je devrais recommencer à zéro et me faire de nouveaux amis. Je trouvais la chose de plus en plus difficile, trop timide j'avais beaucoup de mal à aborder les personnes. Et quand j'arrivais à sympathiser, j'avais peur du jour où mon père m'annoncerait encore un futur départ. Pourquoi se faire des camarades alors que la fin semblait si proche ? Je préférais rester dans ma coquille et à l'écart pour éviter les souffrances affectives.

Le paysage changea, passant de la ville à la campagne en quelques minutes.

Je soupirais une fois de plus en posant mon visage contre ma main. Mon père s'exclama d'une voix grave, me faisant sortir de mes pensées :

— Cesse de soupirer Lucy.

Piquée au vif je me tournais vers lui en le foudroyant du regard.

— Combien de fois allons-nous déménager ? demandais-je.

— C'est terminé après cette fois-ci, me rassura-t-il en activant soudainement son clignotant et en bifurquant à droite.

— C'est ce que tu dis toujours.

Je me retournais vers la vitre, ne voulant pas m'engager encore une fois de plus dans la même conversation. Je savais que j'avais tort et lui raison, de son point de vue bien entendu. Malgré ça, j'espérais que cette ville serait la dernière de ces déménagements répétés. Je ne pouvais pas grandir mentalement lorsqu'il fallait tout le temps partir et se reconstruire ailleurs.

Le trajet sembla durer une éternité et lorsqu'enfin la voiture s'arrêta, je me redressais avec curiosité. Nous étions arrivés dans un quartier avec des maisons, toutes identiques et simplement séparées par des haies. Notre nouvel habitat semblait être immense, la façade montrait deux fenêtres aux volets blancs, tout comme le portail et la clôture. Une allée en cailloux nous conduisait directement vers la porte d'entrée.

J'aperçus le regard de mon père lorsque je me dirigeais vers l'arrière de la demeure, il y avait un jardin. Un assez grand terrain d'herbe s'offrait à moi avec quelques arbres tout autour, je sentais que je passerais beaucoup de temps dans cet endroit.

Par la suite, je retournais vers la voiture, mon paternel était entré dans notre nouvelle maison. Il avait préalablement commencé à emporter des cartons, j'en fis autant avec mes valises.

Un miaulement plaintif me fit sursauter, je jetais un regard vers la caisse de transport en la sortant aussitôt.

— Je ne t'ai pas oubliée, murmurais-je.

Mon chat se prénommait Mistigris et il s'agissait d'une femelle Persan, sympathique et magnifique. Lorsque je m'étais rendue au refuge, j'avais directement apprécié cette femelle. Une morphologie forte avec un poil long et soyeux et surtout son museau, tout écrasé comme si elle s'était pris une porte en pleine figure. Je l'avais donc adoptée, malheureusement les nombreux déménagements la stressaient et elle avait du mal à s'habituer à une nouvelle habitation. Parfois il m'était arrivé de la poursuivre toute une nuit comme elle cherchait activement son ancienne maison.