Les Silences Du Passé Tome 2: Lily

Prologue

"La mort tombe dans la vie comme une pierre dans un étang : d'abord, éclaboussures, affolements dans les buissons, battements d'ailes et fuites en tout sens. Ensuite, grands cercles sur l'eau, de plus en plus larges. Enfin le calme à nouveau, mais pas du tout le même silence qu'auparavant, un silence, comment dire : assourdissant."

Christian Bobin

30 Novembre 2008

Lily :

Ce matin, lorsque j'ai ouvert les yeux, j'ai senti quelque chose d'étrange. Quelque chose avait changé en moi. Les minutes qui ont suivi mon réveil, m'ont enlevé progressivement le goût de vivre pour laisser doucement place à une profonde douleur sans vraiment savoir immédiatement pourquoi. Allongée sur mon lit, j'ai levé les yeux vers le ciel, et regardais la pluie tombée par la fenêtre dont j'avais oubliée de fermer les volets hier soir. Le ciel était sombre parsemé de gros nuages gris.

Ce matin, la météo reflétait parfaitement mon état d'esprit. 

J'ai pris une grande inspiration et j'ai passé délicatement mes deux mains sur mon ventre arrondi, comme j'avais pris l'habitude de le faire ces huit derniers mois. J'ai tourné la tête sur ma droite dont la place était libre depuis plus de trois mois maintenant. J'étais seule, définitivement seule. A cet instant j'ai repensé à la proposition d'Abby hier soir. J'aurais dû accepter de passer la nuit avec elle, entre filles. Une bonne soirée entre copines m'aurait sans doute fait le plus grand bien.

Etendu sur le dos, je me suis concentré un instant sur les sensations qu'habituellement je ressentais chaque matin. Habituellement, des petites vagues se former sur mon ventre, laissant apparaître une petites formes. Souvent j'essayé de deviner s'il s'agissait d'un de ces petits pieds ou l'une de ses mains miniatures. C'était vraiment magique de s'imaginer qu'une petite merveille était en train de grandir en moi. La sentir bouger, sentir également cette douce sensation de papillon virevoltant lorsqu'elle avait le hoquet. C'était vraiment une sensation formidable et unique.

Mais ce matin-là, rien...

J'ai attendu et encore attendu désespérément, d'avoir ou de sentir la moindre petite trace de ta présence, mais rien...  Et là j'ai compris. J'ai compris que quelque chose avait définitivement changé.

Je ne sais pas pourquoi, j'ai tout de suite pensé à toi, à elle. Quelque chose n'allait pas. Je le sentais au plus profond de mon cœur et de mes entrailles. J'ai attrapé mon téléphone portable posé sur ma table de chevet, composé le numéro que j'avais appris à mémoriser et attendu que quelqu'un me réponde. La peur au ventre, j'ai attendu qu'une personne décroche. J'avais un mauvais pressentiment, et je sentais quelque chose d'étrange m'envelopper. Des larmes coulaient le long de mes joues sans que je ne m'en rende réellement compte. Je ne comprenais pas pourquoi, je me mettais dans cet état, car il n'y avait rien de concret, juste ce mauvais pressentiment...

Après plusieurs longues tonalités qui paraissaient ne plus vouloir en finir, mon gynécologue a enfin répondu. Après lui avoir confié mes doutes, il m'a demandé de me rendre à la maternité immédiatement afin de pratiquer un contrôle. Je suis partie seule et effrayée. J'aurais pu appeler ma mère où Abby mais quelque chose m'en a empêché. Encore aujourd'hui, je me demande pourquoi ne pas l'avoir fait...

En arrivant à la maternité, j'ai été rapidement prise en charge par une étudiante sage-femme.

- Je vous laisse vous allonger et relever votre robe. 

Elle a recouvert mon abdomen de gel je tressaille. Elle pose le monitoring sur mon ventre, pour essayer de trouver le rythme cardiaque de ma petite princesse. En vain, pas le moindre petit bruit.