Chapitre 2 - Duel

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 Kerrick sur mes talons, je me dirigeai vers les gradins pour poser mon bâton, avant de me rendre vers le tableau des duels pour voir si quelqu'un m'avait provoqué en combat. Malheureusement, hormis celui du garçon que je venais de terrasser, aucun symbole n'était inscrit à côté du mien (comme la grande majorité des rauthrsandiens, je ne savais ni lire ni écrire, particularité qui faisait qu'en même temps que ma cicatrice rituelle, j'avais dû choisir un symbole pour me représenter –j'ai opté pour une sorte de dague). Devant mon regard déçu, Aileen Martel -surnommée ainsi à cause de son habilité dans le maniement du marteau-, la responsable des duels, éclata de rire.

 -Tu es en manque de chair fraiche, Sheitan ?

 « Chair fraiche » était un terme désignant les guerriers venant d'autres villes, en général des jeunes en cours de formation. Etant donné que je les affrontais pour la première fois, cela me donnait une occasion de déployer un peu plus de mes capacités. Et de me battre tout court : personne à Stanja n'osait m'affronter.

 -Pas seulement de chair fraiche.

  Comprenant mon sous-entendu, elle me tendit l'argent de mon dernier combat. Trois bronzes. Pas grand-chose. Je retins un soupir et tâchai de garder un air neutre.

 Dans un coin de mon esprit, une petite voix commença à susurrer : « Il te faut cent platines. Cent platines. Tu n'y arriveras jamais à temps, Hunter. ».

 Comme toujours quand je l'entendais, je sentis un étrange pincement au cœur, comme si ce dernier se resserrait dans ma poitrine. J'étais incapable d'expliquer ce qui m'arrivait, ni pourquoi. Mais c'était là, ancré en moi.

 -Eh, Hunter !

 Tiré de mes pensées, je manquai de sursauter. Par chance, j'avais un assez bon contrôle de mon corps pour éviter ce genre d'incidents malheureux. Je levai la tête pour voir une comète rousse se précipiter vers moi.

 -Salut, Wanda.

 L'adolescente s'immobilisa devant moi. Je pris le temps d'admirer ce magnifique spécimen de femme rauthrsandienne. Svelte, les formes racées, le teint bronzé par les heures d'entrainement au soleil, les cheveux ondulés, elle était tout simplement superbe. Et pour ne rien gâcher, c'était une excellente guerrière, bandes vertes à dix-sept ans. Ses yeux plus bleus que le ciel me foudroyèrent.

 -Hunter, si tu me reluques encore comme ça, je vais devoir te faire comprendre que tu es tout sauf un surdoué.

 -Voyons, Wanda, je ne voudrais pas abîmer ton joli minois...

 Kerrick, mal à l'aise, s'éclipsa discrètement –enfin, c'est ce qu'il croyait... Passons-. Les discutions entre moi et Wanda pouvaient se montrer plutôt dures à suivre, échange ininterrompu de piques cruelles et de plaisanteries vexantes. Mais c'était notre façon de s'adresser l'un à l'autre. En fait, elle était pour moi ce qui se rapprochait le plus d'une amie. C'était d'ailleurs une bonne chose, car étant les deux meilleurs combattants de notre génération, nous avions été couplés. A partir de nos dix-huit ans, nous allions avoir le devoir de faire six enfants ensembles. Etant donné la forte mortalité des rauthrsandiens, ce genre de mesure était obligatoire, et permettait, de surcroit, de donner des enfants prédisposés au combat.

 Au fond de moi, j'espérais que nos fils et filles lui ressembleraient plus qu'à moi. Non pas que je sois laid, hein ! J'étais même, et je le dis en toute humilité –si, si !-, le plus beau garçon de Rauthrsandr. Mais je n'ai pas le physique typique.

 Comme vous l'aurez compris, le rauthrsandien de base a le teint halé, des cheveux allant du blond au roux, et des yeux clairs –en général, bleus, verts ou gris-.

Hunter's shadeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant