2173.
Quelque part en mer.
Le pont sentait le poisson pourri, l'urine et les déjections. Cela faisait six jours que les matelots n'avaient rien pêché. Le filet s'était déchiré pendant la tempête, les pièges à crabes avaient été emporté au loin et ils étaient à cours d'hameçons. L'eau manquait cruellement. Il ne restait plus qu'une seule citerne pour l'ensemble de l'équipage. En revanche, les barils de vin et de rhum avaient survécu aux conditions climatiques.
—Ça pue ! hurla le capitaine. J'ai l'impression de baigner dans la bouse !
Il longea le pont de long en large bousculant les matelots endormis. Un frottement énergique vint résonner à ses oreilles.
Toujours les mêmes qui travaillent, pensa-t-il en observant un adolescent frotter le plancher à la brosse.
—Par moments je me demande ce que je ferais sans toi Morgan.
Lejeune homme lui sourit en essuyant des gouttes de transpiration et l'observa s'éloigner.
—Arrête voir deux secondes l'orphelin ! répliqua un mousse au départ du capitaine. Tu nous fais passer pour des incapables !
—T'a qu'à t'y mettre plutôt que de rester assis à renifler ta merde, maugréa Morgan.
Le moussaillon, vexé, attrapa le seau d'eau crasseuse et le déversa sur la tête de l'adolescent. Morgan se releva en furie et fracassa sa brosse sur la tempe du matelot qui tomba à terre. Il le toisa un long moment avant de lui tendre la main pour l'aider à se relever.
—Occupe-toi de ta partie du bateau et laisse moi m'occuper de la mienne tu veux ? dit-il sur un ton calme. J'ai pas l'intention de vivre une journée de plus sur cette poubelle flottante.
—Alors barre-toi ! Personne te force à rester. Retourne faire la potiche dans tes familles d'accueil et laisse la navigation aux vrais hommes !
Morgan s'éloigna sans sourciller et partit remplir de nouveau son seau. Il plongea la brosse dans l'eau salée jusqu'à faire disparaître les traces de sang.
Le capitaine lui fit signe de le rejoindre. Il passa un bras autour de l'épaule du garçon.
—Tout va bien ? lui demanda-t-il sur le ton de la confidence.
Nonça va pas, songea Morgan. Ça fait douze ans que je navigue sur ce rafiot pourri.
—Ça va, se contenta-t-il de répondre.
—L'équipage peut être blessant parfois, il ne faut pas tenir compte de tout ce qu'ils racontent.
—Je me moque de ce qu'ils racontent.
Morgan n'avait jamais été un enfant modèle, loin de là. Depuis son abandon à sa naissance il n'avait cessé d'être ballotté de familles en familles. Il avait tout d'abord été accueilli par les nonnes et passé ses trois premières années au sein d'un couvent.Puis, quelques mois après l'éclipse de l'apocalypse, les nonnes avaient confié le petit garçon à des marchands contre bons soins.Dès lors, la vie de Morgan, plutôt paisible, avait basculé du tout au tout. Les marchands en avait fait leur monnaie d'échange. Les eaux avaient recouvert la quasi-totalité des continents et les marchands parcouraient le monde à bord de leur navire à la recherche de vivres et d'armement. Dès que Morgan fut en âge de travailler, il échangèrent ses services contre du matériel de survie, de la nourriture et de l'alcool. Morgan passait quelques mois dans une famille, contraint aux pires corvées, avant de retourner auprès de ses propriétaires.Mais les marchands n'avaient pas fait une si bonne affaire. Morgan était désinvolte et capricieux, très souvent fugueur. Il ne supportait pas l'autorité et ses familles d'accueil se plaignaient souvent de son travail et de son attitude. Les marchands comprirent vite que le garçon était plus un fardeau qu'une bénédiction. L'un des matelots avait proposé de le battre jusqu'à obéissance mais le capitaine s'était opposé à ces pratiques barbares.
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La Plateforme
Fiksi IlmiahTerre 2157. Suite à la disparition du soleil, la quasi-totalité des continents est engloutie. Une unité satellitaire "La Plateforme" est mise en place afin de palier à la source d'énergie manquante. Vingt ans plus tard, sur l'île de Xiland, de nouve...