Gravel Ridge (l.s)

Chapitre 7 : ...We are adults now

Rose et Greg Maine rentrèrent le lendemain midi de Little Rock. Ils restèrent évasifs sur leur petit voyage, connaissant les relations tendues entre Harry et sa tante. Tout cela les chagrinait beaucoup, mais ils n'y pouvaient rien. Ils avaient essayé de raisonner Katie durant de nombreuses années mais avaient abandonné la partie, devant son entêtement. Peut-être qu'un événement particulier ferait que les deux sœurs se réconcilieraient un jour, en espérant que ce ne soit pas un événement triste comme c'était souvent le cas dans les familles en conflit. Parfois, seule une mauvaise, voire très mauvaise nouvelle, réussissait à rassembler des personnes qui ne se parlaient plus pour des raisons plus ou moins justifiées. Pendant le déjeuner, Harry aborda le sujet qui lui occupait l'esprit depuis la veille au soir :

- Au fait, j'ai croisé Louis hier.

- Oh, le petit Tomlinson ! s'exclama sa grand-mère.

- Plus si petit que ça, il est aussi grand que moi, précisa Harry en reposant sa fourchette.

- Qu'est ce qu'il devient ? demanda Greg.

- Je ne sais pas vraiment, on s'est croisés rapidement. Mais je vais aller le voir cet après-midi. D'ailleurs, je peux t'emprunter la voiture ?

- Harry, soupira son grand-père. Arrête de demander mon garçon, fait-le, c'est tout.

Harry reprit sa fourchette et piqua un morceau de dinde dans son assiette, un sourire timide collé sur les lèvres qui n'échappa qu'à lui.

Aux alentours de seize heures, il prit le volant après avoir demandé à ses grands-parents où se trouvait exactement le garage. Il ne lui fallut que quelques minutes pour le rejoindre. Tout était à quelques minutes de tout à Gravel Ridge. Il se gara sur le parking qui ne comptait que quelques voitures sous le soleil de l'après-midi. Le bâtiment qui se tenait en face de lui avait deux grandes ouvertures qui ressemblaient à deux bouches noires béantes se détachant des murs clairs, qui avaient du être blancs à l'origine. Il resta un moment sur le seuil à observer l'intérieur, puis se décida à entrer. Il s'avança entre les pneus neufs et usagés et les voitures qui attendaient que l'on s'occupe d'elles. Un juron étouffé l'interpella et il s'avança vers la voix qui trahissait un énervement grandissant.

-Putain de putain de clé de merde ! Fait chier !

Louis était penché sur le moteur d'une voiture dont Harry était incapable de reconnaître la marque, les mains plongées dans la machine. Brusquement, il se releva et jeta quelque chose derrière lui avec humeur, l'objet atterrit par terre avec un bruit métallique. Harry n'avait pas bougé et un sourire se dessina sur le visage de Louis alors qu'il l'apercevait.

- Hey !

- Salut, répondit Harry.

Ils avaient beau avoir été super copains, c'était dix auparavant et la timidité de Styles reprenait le dessus.

- Je vais fumer une clope, tu m'accompagnes ? enchaîna Louis en essuyant ses mains pleine de graisse dans ce chiffon toujours aussi sale.

Il le guida à travers l'atelier jusqu'à une porte qui donnait sur l'arrière du bâtiment, il l'ouvrit et ils s'installèrent sous l'arbre là où John et lui déjeunaient lorsque le temps le permettait, soit la plupart du temps.

- Tu fumes ?! s'exclama Louis en voyant Harry sortir une cigarette de son paquet.

- Toi aussi, fit remarquer le jeune homme.

Il souriait, de ce demi-sourire, un peu hésitant, un peu timide.

- C'est vrai, répondit Louis en regardant le bout incandescent de sa clope allumée. Alors qu'est ce que tu deviens ? J'arrive pas à croire qu'on ne se soit pas vus depuis si longtemps !

- Moi non plus, pourtant j'ai l'impression que c'était hier. Je fais des études de journalisme en Floride et toi ?

- Je travaille ici depuis un moment, c'est cool, répondit Louis en haussant les épaules.

- Comment vont ta mère et ta sœur ?

Louis s'agita un peu plus, son enthousiasme était contagieux, le sourire d'Harry s'agrandit.

- Ma mère travaille toujours à Sherwood, il exhala la fumée de sa cigarette avant e poursuivre. Emily est à l'Université !

La fierté débordait par tous les pores de sa peau.

- Wow, la petite Emy est à la Fac !

- Ca fait bizarre de la savoir si loin, elle est genre...adulte maintenant. Tu es revenu pour quoi au fait ?

Harry ne réfléchit presque pas avant de sortir la tirade qu'il avait apprise par cœur.

- Pour prendre l'air, sortir un peu du campus. J'avais besoin d'un endroit calme pour bosser avant ma dernière année. Et puis pour voir mes grands-parents.

- Et t'as laissé combien de filles éplorées derrière toi ? taquina Louis en souriant de plus belle.

- Comment ça ?

Harry avait froncé les sourcils, son attitude se modifia subtilement.

- J'regarde la télé, je sais comment ça se passe sur les campus !

Il lui fit un sourire entendu. Sourire que ne lui fut pas rendu.

- Aucune.

- Allez, fait pas le timide ! insista Louis.

- Non, personne. Emily étudie quoi au fait ?

Louis répondit sans relever le fait qu'Harry venait de changer de sujet avec aussi peu de subtilité qu'un éléphant affolé dans un magasin de porcelaine.

- Elle veut être professeur pour revenir travailler dans le coin.

- Cool !

- Tu devrais la voir si tu restes un peu, elle rentre bientôt.

- Et toi tu as quelqu'un ? demanda soudain Harry.

- Oui ! Elle s'appelle Leah, tu verras elle est top.

Louis lui fit un clin d'œil et jeta son mégot dans une vieille boite de conserve qui faisait office de cendrier.

- Bon il faut que je retourne bosser, mais donne moi ton numéro de téléphone, j'ai des potes à te présenter !

Harry lui donna et il se fit raccompagner jusqu'à sa voiture, Louis le salua et lui dit qu'il allait le contacter rapidement avant de retourner dans l'atelier après un dernier sourire éclatant.


Il était rentré à Hollyridge Court depuis une petite heure mais il avait toujours ce drôle de sentiment au coin du ventre. Les choses avaient été rapides. Louis avait tout pris en main, la conversation, les sourires, son numéro de téléphone, les initiatives. Et Harry se sentait un peu groggy. Tout aurait du être simple, mais il avait du mal à ne pas compliquer les choses. C'était étrange pour lui que ça se passe aussi facilement. Ce n'était jamais aussi aisé d'habitude. Du moins, ça ne l'était plus depuis le collège. Il soupira en levant les yeux au ciel, il était devenu un asocial paranoïaque. Ridicule.

Harry eut beaucoup de choses à raconter dans son journal ce soir là. Il ne parlait toujours pas de choses essentielles, mais Louis y était encore une bonne place sur la page du jour.