Emily était repartie depuis quelques jours et la vie continuait tranquillement à Gravel Ridge. Le cœur d'Harry battait seulement un peu plus vite lorsqu'il pensait à Louis ou lorsqu'il était avec lui. Il était persuadé que le feu s'éteindrait aussi vite qu'il s'était allumé, aussi vite qu'il partirait de Gravel Ridge. Même s'il n'avait aucune envie de rentrer en Floride. Pourtant, il allait devoir bientôt songer sérieusement à son retour.
La journée commença par le jogging quotidien accompagné par Louis puis se poursuivit tranquillement entre jardinage avec son grand-père et écriture. Le soir, il se rendit au Sonic, là où le groupe avait rendez-vous et ils partagèrent leur repas dans la bonne humeur. Soudain, Louis prit la parole un peu plus fort.
- J'ai quelque chose à vous dire. Hé, Ash, ferme là !
Il se tut un instant, très sérieux, puis un sourire illumina son visage et il se lança en attrapant la main de Leah.
- On va se marier !
Les cris de joie fusèrent autour de la table tandis qu'Harry reposait son burger doucement. Il lui fallut quelques secondes pour réussir à se recomposer un visage de circonstance et féliciter le jeune couple.
Le repas se poursuivit dans la bonne humeur générale, Ash ne cessant de prendre son meilleur ami dans les bras de façon bourrue pour lui signifier sa joie. Leah était rayonnante et Harry remarqua effectivement une jolie bague qui brillait à son annulaire.
Lorsque les jumeaux proposèrent qu'ils aillent tous aux tables pour poursuivre la soirée, Harry déclina poliment arguant qu'il était un peu fatigué. Louis le raccompagna jusqu'à sa voiture après qu'il ait salué les autres.
- T'es sur que ça va ?
- Oui, très bien, c'est juste que j'ai mal dormi la nuit dernière et que je suis claqué.
- Okay, rentre bien alors, répondit Louis en souriant.
Harry s'avança et le prit brièvement dans ses bras pour une accolade rapide en le félicitant à nouveau.
- Merci mec, j'apprécie, t'as intérêt à revenir pour le mariage !
- Compte sur moi.
Le sourire d'Harry s'éteignit aussitôt que Louis eut tourné le dos. Il roula longtemps sur les routes de l'Arkansas, musique à fond, conduire avait toujours été un moyen pour lui de se vider la tête. Il était près de vingt-deux heures lorsqu'il se décida à rentrer. Son allure était soutenue mais ne dépassait pas la limitation légale. Soudain, surgi de nulle part, un obstacle lui barra la route, il ne put distinguer précisément ce que c'était mais sa taille était conséquente. Harry freina de toutes ses forces mais pourtant le choc arriva. Moins violent que ce à quoi il s'était attendu. A peine arrêté sur le bas côté, il détacha sa ceinture et bondit hors de la voiture. Il tremblait comme une feuille et courut pour aller voir ce qu'il avait heurté. A la lueur de la lune, il vit que c'était un petit wapiti, un jeune, qui se relevait difficilement et qui détala en claudiquant alors qu'Harry s'approchait. Il disparut de la route avant que le garçon ne puisse l'atteindre et celui-ci fit demi tour en essayant de se calmer. Il s'alluma une cigarette en tremblant et alla constater les dégâts. Le choc n'avait pas été violent, il avait eut suffisamment de réflexes pour ne pas finir dans le décor, mais la carrosserie de la voiture était bien amochée et il avait eut peur. A la lueur de son portable, il essaya de vérifier que rien n'était trop abîmé et qu'il pouvait reprendre la route. Il roula doucement jusqu'à Gravel Ridge et prévint son grand-père dès qu'il fut arrivé. Ils firent le tour de la voiture ensemble et Greg décréta que ce n'était rien d'autre qu'un peu de tôle froissée, ils n'auraient qu'à l'emmener chez John le lendemain.
Les tremblements l'accompagnèrent longtemps après son retour. Et il se calmait à peine lorsque son portable se mit à vibrer, signalant l'arrivée d'un message.
« Ca va ? », c'était Emily.
« A peu près » répondit Harry.
Il lui relata les derniers événements et ils parlèrent longtemps cette nuit là. Ca ne faisait que quelques jours qu'elle était repartie mais ils échangeaient des dizaines de messages tous les jours. Harry avait trouvé en elle une confidente, une oreille attentive et légère quand il le fallait et la réciproque était vraie. Ils pouvaient aborder tous les sujets, du plus futile au plus sérieux et Harry avait du mal à croire à la vitesse à laquelle s'était nouée cette relation. Il ne comprenait pas pourquoi tout le monde était si gentil avec lui. Mais il décida d'en profiter. Septembre changerait la donne et il faudrait qu'il oublie tout ça, mais pour le moment, c'était à lui, rien qu'à lui.
Le lendemain, il emmena la voiture chez John et ce fut évidemment Louis qui la pris en charge.
- Merde, mais qu'est ce qu'il s'est passé ? demanda le jeune homme en se baissant pour évaluer les dégâts.
- J'ai tapé un wapiti hier en rentrant, répondit Harry.
- Un wapiti dans Gravel Ridge ?!
Louis se redressa, les sourcils froncés.
- Non, j'ai été rouler un peu.
- Je croyais que tu étais fatigué, le ton de Louis n'était pas accusateur, c'était une simple constatation, il cherchait juste à comprendre.
- Je l'étais et j'avais pas le moral, ça me détend de rouler, éluda Harry.
- Okay, ben écoute, je pense que j'aurai fini ce soir. Au fait, ce weekend chez les grands-parents des jumeaux, ils ont un chalet près d'un lac à trois heures de route d'ici, tu viens hein ?
- Oui, répondit Harry en souriant. Bien sûr. Merci pour l'invitation.
- Ben c'est normal. On prend ma voiture avec Leah et les autres se débrouillent, départ à huit heures samedi matin.
- Ca marche. Je repasse ce soir alors ?
- Ouais, je vais m'occuper de ça, elle sera comme neuve.
Il lui sourit une dernière fois et se plongea dans la contemplation de la voiture, son esprit était déjà au travail.
Lorsqu'Harry revint le soir même la voiture était effectivement comme neuve. Louis refusa d'être payé mais Harry insista tellement qu'il finit par accepter les quelques billets.
Harry rentra chez lui après avoir qu'ils se soient donnés rendez-vous le lendemain pour aller courir. Il avait reçu un message d'Emily sur son portable.
« Skype à 21H ? »
« Yes, mon pseudo est très original : Harry_Styles »
« Ok, je t'ajoute, à toute »
A l'heure dite, ils se retrouvèrent en conversation vidéo via leurs ordinateurs, Harry affalé sur son lit et Emily installée sur son canapé. Ils parlèrent de leur journée et puis la conversation s'orienta sur Gravel Ridge.
- Pourquoi tu es revenu au fait ? Louis n'a pas su me dire.
Harry détourna les yeux de l'écran, cherchant instinctivement son paquet de cigarettes.
- J'avais besoin de changer d'air.
- Oh, j'ai touché un point sensible.
- Non, enfin ouais, peut-être, répondit Harry en se tortillant, mal à l'aise.
- Balance, Harry. Je suis sûr que tu n'en as pas encore parlé.
Et il la regarda à travers l'écran, paisible, souriante, douce et un peu trop perspicace. Et il se dit qu'effectivement pour la première fois, il pourrait parler, parce qu'il n'était pas vraiment en face d'elle mais qu'il l'était quand même. Oui, la situation n'était pas trop franche, juste ce qu'il fallait pour qu'il mette quelques mots sur toute cette merde.
- Ouais, c'est vrai.
- Je t'écoute, dit-elle en se penchant vers l'avant.
Et Harry sut que c'était vrai. Elle allait l'écouter, vraiment. Pas seulement entendre, non. Prendre en compte ce qu'il disait, sans le juger, en comprenant. Et il se lança d'une seule traite.
- Je suis allé à une soirée avec mon ex, sur le campus. Une soirée pour la fin d'année. C'était dans le bâtiment d'une fraternité. J'ai pas mal bu, et apparemment Sasha mon ex, aussi. Au bout d'un moment, il a balancé qu'il me baisait. Oui, en ces termes. Pas qu'on était ensemble, ou quoi que ce soit, juste qu'il me baisait. Et à un moment donné, sans que je comprenne bien comment, j'étais vraiment dans un sale état, je me suis retrouvé dans une chambre avec quatre ou cinq mecs, qui m'ont coincé. Ils ont commencé à me bousculer en m'insultant. Des trucs du genre « pédé, enculé, tapette, fiotte », tu vois le style, ils ont commencé les insinuations dégueulasses. Au final, ils m'ont bien tabassé, j'ai perdu connaissance. Quand je me suis réveillé, j'étais dans une ambulance. D'après, ce que j'ai compris, ils ont flippé au bout d'un moment et m'ont sorti, déposé assez loin, et ont appelé les pompiers. Ils ne voulaient pas avoir de problème. Je te dis au bout d'un moment, parce que le lendemain, j'avais pas seulement mal aux côtes, puisque deux étaient cassés, ou des bleus, mais disons que...comment dire...ils m'avaient bien fait comprendre que j'étais effectivement un enculé.
Il insista lourdement sur le dernier mot.
- Ils ont pas fait ça ? demanda Emily d'une voix blanche.
- Si, répondit Harry en levant enfin les yeux après sa longue tirade.
- Tu as porté plainte ?
- Non et je ne le ferai pas.
- Pourquoi ? Il faut qu'ils soient punis, tu ne voudrais pas que ça arrive à d'autres ?
- Honnêtement, Emy, les autres c'est pas ma préoccupation première. Je refuse de revivre tout ça, je refuse que ça soit rendu public et d'être le mec qui s'est fait...je sais pas, sur le campus. Ca va se tasser.
La voix d'Harry était neutre, comme s'il était totalement détaché de tout ça.
- Okay, c'est okay Harry, je comprends.
- Merci.
- Je suis désolée.
- De quoi ?
- De pas être là pour te prendre dans mes bras.
- Tu fais déjà énormément.
- Je vais rentrer la semaine prochaine pour te voir avant que tu ne repartes. T'as pas à être seul à porter ça. Y'a aucune honte à avoir, rien n'est de ta faute. C'est eux qui sont fautifs, immondes et répugnants. Je veux que tu m'en parles chaque fois que c'est nécessaire. Okay ? N'importe quand, je suis là, juste là.
Harry chassa une larme qui s'était échappé.
- Tu sais quoi Emy ? J'ai bien fait de venir ici. Je vais mieux, vraiment. Je suis juste en train d'oublier cette merde. Enfin, je sais que je vais pas oublier. Mais je vais juste l'accepter et continuer.
- C'est ça.
- Et donc, tu n'es plus avec Sasha ?
- Non, il m'a largué avant les vacances, je sais même pas si on a déjà été vraiment ensemble.
- Tu l'aimais ?
- Non j'étais attaché à lui, je pensais l'aimer, mais maintenant je sais que c'était pas de l'amour.
- Comment tu le sais ?
Elle essayait de changer un peu de sujet, il semblait avoir déjà beaucoup donné pour ce soir.
- Parce que je me rends compte tous les jours qu'il y a une différence entre être attaché et ressentir quelque chose.
Emily le regarda bizarrement à travers l'écran et un sourire illumina son visage.
- Comment il s'appelle ? C'est quelqu'un de ton campus ?
- Quoi ?
- Me prend pas pour une idiote.
Il leva les yeux au ciel, il avait été trop explicite et elle était loin d'être idiote.
- Tu vas pas aimer.
- Rien ne peut me choquer Harry, tu l'as bien compris.
- Ouais, mais là...
- Allez, balance ce que tu as sur le cœur, tu vois bien que ça ne peut pas te faire de mal.
Il resta silencieux quelques secondes.
- Louis.
- Merde, Harry, répondit Emily après un silence, son sourire était retombé.
- Je sais, oui, désolé.
- Okay, alors t'excuses pas parce que ça va être toi le plus malheureux dans cette histoire. Tu te rappelles de ce que je t'avais dit le premier soir au lac ?
- Je ne voudrais pas tomber amoureuse de quelqu'un que je ne peux pas avoir, quelque chose comme ça.
- Et bien, c'est tout à fait le cas là. Il y a Leah et quand bien même, à ce que je sache, Louis est tout ce qu'il y a de plus hétéro.
- Je sais tout ça. Mais je sais pas, tu vois je viens de te dire ça, alors que je ne me l'étais même pas encore dit à moi-même. J'en étais même pas conscient jusqu'à il y a quelques jours. J'ai rien fait pour. Rien du tout, je te promets.
- Hey, calme toi. Elle entendait les larmes monter dans sa voix. Il faut juste que tu calme le jeu avec toi-même et ça va passer, ne te fais pas de mal inutilement.
- Je vais essayer.
Et ils continuèrent à discuter longuement. Jusqu'à ce que la fatigue les gagne. Les sujets furent plus légers. Harry se sentait étrangement bien. Parce qu'il avait parlé de tout ce qu'il avait sur le cœur avec quelqu'un qu'il ne connaissait pas depuis plus de dix jours mais en qui il avait entièrement confiance. Parce qu'on lui avait dit que ce n'était pas de sa faute et qu'il avait besoin de l'entendre. Et parce qu'il avait mis des mots sur Louis, et que même si c'était une catastrophe, il se sentait apaisé d'avoir des idées concrètes sur ses ressentis. Ca n'allait pas être facile, mais à partir de maintenant, il savait qu'il allait remonter la pente, même s'il y avait d'énormes pierres dans son sac à dos pour le tirer vers l'arrière. Il était attendu à l'arrivée.
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Gravel Ridge (l.s)
ФанфикCETTE FICTION NE M'APPARTIENT PAS DU TOUT Je NE FAIS QUE LA METTRE SUR WATTPAD CAR JE PENSE QU'ELLE MÉRITE D'ÊTRE LUE PAR TOUT LE MONDE. Bienvenue à Gravel Ridge, Arkansas. 2500 habitants. Quelques commerces, des rues sans trottoir. Une ville où i...