Le monstre aux désirs de luxure

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-Antoine ! s'exclama une voix bien connu.

L'intéressé se retourna, ravit de voir Gaston, jugé « homme le plus viril » par l'assemblée des femmes, se diriger vers lui.

Ce parangon de virilité lui envoya une tape « amicale » sur l'épaule qui le fit vaciller, et lui prit le bras pour l'amener à l'écart avec un air de conspirateur.

-Dis-moi, Antoine, pourquoi ne voit-on plus ton frère, ces temps-ci ?

-Bastien ? Répondit l'autre, qui savait pertinemment qu'il n'était pas question de lui.

Tous le monde n'arrêtait pas de leur demander des nouvelles de leur cadet, et cela leur portait particulièrement sur les nerfs. Mais Gaston lui envoya un regard à faire frémir un éléphant.

-Ah, Gracieux, tu veux dire ! Rectifia aussitôt Antoine. Il est resté s'occuper de notre père, à la campagne. Le pauvre a une santé tellement fragile...

-Vraiment ? Rétorqua Gaston, visiblement contrarié. Eh bien, dans ce cas, je ne te retiens pas.

-Mais...

L'autre était déjà partis. Aussitôt, une meute de jeune femme se jeta sur lui pour lui demander ce que l'incroyable Gaston avait bien pus lui dire. Il se fit un devoir de les baratiner, et oublia aussitôt l'accident...

Ce qui n'était pas le cas de Gaston.

À l'écart, sur un petit balcon, l'ancien chasseur ruminait, ses poings énormes serrés autour de la rambarde.

Depuis qu'il l'avait rencontré, à cette fête...

Depuis l'instant où ses yeux s'étaient posés sur lui...

Il ne pensait qu'à lui. Nuit et jour. Lorsqu'il couchait avec un homme. Lorsqu'il faisait l'amour avec une femme. Tout le temps.

Il voyait ses mains blanches, son visage pâle aux traits fins, fragiles.

Ses grands yeux bleus qui dévoraient le monde, comme s'ils étaient à la recherche d'un trésor ou d'un mystère à éclaircir.

La douceur qu'il posait sur toute chose.

Oh, oui, cet air de douceur bouleversait particulièrement Gaston, lui qui n'avait connu que l'adrénaline de la bataille, la rage du sang, la gloire de la conquête et les plaisirs effrénés de la chair. Soudain, il se trouvait à la merci d'un oiseau sans ailes, que tous empêchaient de s'envoler.

-Tu m'appartiendras, Gracieux... Murmura-t-il à la lune, la voix rendue rauque par le désir. Tu m'appartiendras... Je te couperais les ailes pour te garder prisonnier. Je te forgerais une cage. Je te posséderais. Je te ferai l'amour à t'en faire crier de douleur. Je te briserai, toi et tes airs si purs. Je laisserai ma marque sur ta peau. Tu seras mien, Gracieux... Où que tu ailles... Quoi que tu fasses... Où que tu cherches à fuir. Tu seras mien.

Quelques parts, à des kilomètres de là, un prince à l'apparence monstrueuse frissonna, et recouvrit d'une couverture le jeune homme endormit sur ses genoux.

Le vent, ce soir, sifflait des airs menaçant en s'infiltrant par les pierres descellées, comme pour les mettre en garde.

Les véritables monstres ne ressemblent jamais à ce qu'ils devraient être.

La Bête (MxM)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant