Chapitre 8 : Nolan

19 1 2
                                    

Je referme l'écran de mon ordinateur. Il est presque minuit. Ça fait quasiment une heure et demie que je discute avec Lyzia, et je commence à vraiment l'apprécier. Eh, oh ! Ne vous faites pas d'illusions, hein ! Pas apprécier à ce sens du terme. Juste... Elle est sympa, quoi.

Je repousse ma chaise et baille largement en m'étirant. Je commence à être fatigué, et j'ai cours de 8h à 17h demain.

Je me lève, me déshabille, et me prépare à aller au lit (dédaignant, comme souvent, de me brosser les dents) quand un léger bruit provenant de dehors attire mon attention. Curieux, j'ouvre ma fenêtre et me penche pour regarder...

J'ai juste le temps de me jeter de côté.

Une chose noire pénètre dans ma chambre à une vitesse ahurissante et vient se coller au mur qui fait face à la fenêtre. La chose en question possède une silhouette semblable à celle d'un gros félin, mais nettement plus musclé, et anormalement floue. Je ne sais pas si c'est une ombre ou une créature physique. Tout ce que je sais, c'est que c'est une menace de taille.

Le monstre ne me laisse pas le temps de me remettre et se jette sur moi. Poussé par mon instinct, je l'esquive en plongeant sous mon lit. J'en ressors de l'autre côté et fais à nouveau face à la bête. Une fois de plus, elle m'attaque ; mais cette fois, je n'ai pas le temps de l'esquiver totalement. En un éclair, une sensation de douleur me traverse le bras, et une large blessure s'y dessine à vue d'œil. Curieusement, la plaie ne saigne pas ; la chair semble plutôt carbonisée. Mais c'est tout aussi douloureux.

Ne jamais perdre sa concentration pendant un combat, voilà la règle d'or de l'escrime. Et voilà pourtant ce que je viens d'oublier, malgré mes trois ans de pratique de ce sport.

La même sensation de brûlure me lacère le dos. Je me retourne d'un bond, mais mon adversaire est déjà ailleurs.

Je commence à prendre conscience que je dois réagir si je ne veux pas finir en petits morceaux (carbonisés). Je comprends également que c'est mon pouvoir que je dois utiliser. Cette chose ne sera pas sensible à des armes, disons... Humaines.

Mais comment ???

Tout ce que je sais de mon pouvoir, c'est qu'il consiste à guérir des blessures.

Et je ne vois pas en quoi ça va m'être utile pour me débarrasser de ce monstre.

J'avais bien raison de trouver mon pouvoir inutile.

La sensation de brûlure me lacère cette fois le bas-ventre. Affaibli par la triple blessure, je m'écroule au sol.

Aussitôt, la bête semble se concrétiser. On dirait en effet un félin, une panthère peut-être, toute en muscles. Son pelage n'est pas noir, mais argenté, piqueté de taches sombres. Sa gueule grande ouverte découvre des canines tranchantes comme des rasoirs. Et elle se ramasse sur elle-même, prête à bondir.

Je comprends qu'elle va donner le coup de grâce. 

Je comprends aussi que je n'ai aucune chance d'en sortir vivant.

Alors je ferme les yeux, et me prépare au choc.

Je rouvre presque aussitôt les paupières. Je veux affronter la mort en face.

L'animal bondit.

Le temps semble se ralentir.

Je vois le monstre en plein saut se rapprocher de moi.

Ses dents sont vraiment pointues.

Mu par un réflexe incontrôlable et dérisoire, je tends une main en avant pour me protéger...

Un flash lumineux m'éblouit. Une sorte de boule d'énergie a jailli de ma paume ouverte.

Et le prédateur s'effondre, fauché en plein vol.

Ébahi, je n'arrive pas à recouvrer mes esprits. Et, pour ajouter à mon total ahurissement, une lueur entoure soudain, comme un cocon protecteur, mon étrange adversaire.

Bientôt, la lumière s'intensifie, devient aveuglante. Puis, tout disparaît : la lumière, la bête, le désordre dans ma chambre. De ce terrible combat, il ne reste que mes douloureuses blessures.

La douleur m'envahit. Je lutte pour ne pas m'évanouir. Cependant la souffrance est intolérable...

Une douce chaleur m'entoure. Peu à peu, la douleur s'estompe. Je sens que mes blessures disparaissent...

J'avais tort de trouver mon pouvoir inutile.

***

Je ne sais pas comment je me suis traîné jusqu'à mon lit. Je sais encore moins comment il se peut que, le lendemain matin (donc ce matin), j'aie les idées assez claires pour me dire qu'il faut absolument que je prévienne Lyzia, Ombrine et Ely de ce qu'il s'est passé. En plus il est à peine six heures.

Oui, mais je ne peux pas écrire ça... Si quelqu'un le trouvait, je passerais pour un dingue. Et d'ailleurs, comme dirait Ombrine, il ne faut pas prendre de risques.

Après vingt bonnes minutes passées à réfléchir, je décide finalement de deux choses :

- Premièrement, coder les messages à glisser dans leur casier ;

- Et deuxièmement, leur donner un rendez-vous, non pas dans, mais en-dehors du collège, loin du collège, et surtout, hors temps scolaire, pour éviter d'être vus ensemble.

Aussi, en attendant 7 heures (l'heure à laquelle je me lève), je rédige trois messages différents, et les code de trois manières différentes. Puis je note un nombre au dos de chaque papier : le numéro de casier de son destinataire. Je range les messages dans mon cartable.

Et je pars au collège, encore plus perturbé qu'hier, et bien déterminé à en savoir plus sur cette fichue Ligue qui a failli me tuer.

De toutes les couleursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant