Chapitre 22 : Lyzia

7 0 0
                                    

Karine s'assied en tailleur sur le sol. Je l'imite.

- Tu t'es bien battue, dit-elle en souriant. C'était la première fois ?

- Pas exactement... J'ai déjà eu à me défendre contre des garçons... Intrusifs.

Un petit sourire se dessine sur le visage de mon Mentor, bien vite effacé par le souci de "débriefer" correctement l'exercice.

- Est-ce que tu as ressenti quelque chose de particulier pendant le combat ?

Je réfléchis.

- Oui... Deux fois. La première, c'est quand j'étais contre Jo. Au début, je me battais avec Nolan, et je voyais Ely qui était contre Sara. Il se battait de façon super fluide... Et ça m'énervait, parce que nous, on avait du mal même si on était à deux contre un. Et puis... Nolan est parti aider Ely... Et je me suis retrouvée seule contre Jo... Et je galérais encore plus... Et ça m'énervait, je comprenais pas comment Ely avait fait. Puis j'ai compris qu'il utilisait son pouvoir...

J'essaye de revoir les moindres détails de ce moment.

- C'était comme... Comme si j'avais enfoncé une porte, dans ma tête. J'étais... Je n'étais plus en phase avec la réalité. J'étais décalée. C'est comme si je voyais les choses avec une ou deux secondes d'avance. Je savais ce que Jo allait faire... Puis à un moment j'ai vu quelque chose, et Jo a fait le contraire et... C'est ça qui m'a perdue.

Karine fronce les sourcils.

- Hmm... Rappelle-moi ta Couleur ?

- Lilas.

- Ouais...

Elle réfléchit un moment.

- Ouais... Ça doit être ça. Et puissant, avec ça...

- Qu'est-ce que c'est ?

- Je pense que ce que tu as vu, c'était les pensées de Jo.

Je manque de m'étouffer.

- C'est possible ?!

- La preuve.

- Mais... Mais ce moment où il a fait le contraire ?

- Il a probablement compris ce que tu faisais et t'a fait croire qu'il allait faire quelque chose, alors qu'il comptait faire le contraire.

- Mais comment ? Je veux dire... Si je lisais dans ses pensées, j'aurais vu ça, non ?

- C'est une question de degrés de pensée. Tout Artiste apprend à contrôler ça.

- Je ne comprends pas.

- Pense à quelque chose.

Je ferme les yeux et réfléchis. Je prends la première image qui me passe par la tête.

- C'est bon.

- Qu'est-ce que c'est ?

- Une girafe.

Karine pouffe de rire.

- Bon, concentre-toi bien maintenant. Tu vois l'image de la girafe ? Est-ce que tu la vois clairement ?

- Oui...

- Est-ce que tu arrives à ressentir où se situe ta pensée ?

- Comment ça ?

- À quel endroit dans ton cerveau se trouve l'image de la girafe ?

Je serre les paupières, cherchant à ressentir ce dont elle me parle. Enfin, je décèle une vague sensation dans l'avant de mon cerveau.

- Euh... À l'avant. Je crois.

- Bien. Concentre-toi sur l'arrière de ton cerveau. Tu le ressens ?

- Oui... 

- La girafe est où maintenant ?

- Là où je suis... À l'arrière. Mais moins précise.

Je rouvre les yeux, secoue la tête.

- Wouf ! C'est bizarre...

- C'est normal. On s'entraînera, ne t'en fais pas. Tu avais parlé d'une deuxième fois...?

- Oui... Enfin je ne suis pas sûre... 

- Dis toujours.

- C'était plus tard, quand j'ai été éliminée. Ou plutôt juste avant... J'étais face à Samuel. Je sentais qu'il était meilleur que moi et... Ça me met en rogne, admets-je. Il y a eu comme un... Un flash... Et j'ai ressenti un... flux d'énergie... Et...

Je m'arrête, ne trouvant pas mes mots, mais Karine me vient en aide.

- Je m'en souviens. J'ai remarqué ça, je me demandais justement si tu t'en étais rendue compte.

- Voilà. Et puis je me suis dit que c'était totalement dérisoire, et j'ai perdu.

- On appelle ça l'Énergie du Désespoir.

Je me mords la lèvre.

- Ouah, l'expression clichée...!

- Je sais, je sais, je sais, c'est bon. Mais tu ne crois pas qu'il y a plus important que le nom ? Je veux dire, si tu es en train de te battre et que tu trouves une arme, tu t'en fiches que ce soit un pistolet ou un revolver ou n'importe quoi d'autre, tant que ça te sauve la vie...

- C'est pas la même chose, un pistolet et un revolver ?

- Aucune idée. Tu sais, moi et les armes à feu...

À vrai dire, moi non plus je n'ai absolument aucune idée de la différence entre un pistolet et un revolver, je ne sais même pas s'il y en a une ou non.

- Mais ce n'était pas le sujet de mon propos. Et le principal, c'est que tu aies compris mon propos.

Elle semble légèrement agacée et je prends conscience qu'elle n'est pas seulement une amie mais aussi un professeur.

- Oui, pardon.

- Cette énergie peut te sauver la vie si elle est bien utilisée, ça va faire partie de ta formation.

J'en suis à hésiter à relever ce futur incertain que nos Mentors, et Diane, emploient un peu trop souvent à mon goût, mais notre Encadrante intervient :

- Très bien, je suis désolée de vous couper, mais vous devez rentrer maintenant. Il se fait tard et vous risquez d'avoir du mal à expliquer un retard trop important. 

Nous nous levons tous les sept pour sortir. Je me tourne vers Karine pour la saluer et sors pour de bon, perdue dans mes pensées. Ombrine passe un bras autour de mes épaules.

- Tout va bien ?

- Je réfléchissais.

- À quoi ?

- Plusieurs détails sans grande importance.

Je lui souris. Elle me lâche, se tourne vers Kéo qui s'efface comme avalé par un brouillard invisible, salue Diane et ferme la porte derrière nous.


[Oui, je sais. Ce chapitre est hyper court alors que le précédent était super long. En plus celui-ci ne sert vraiment à rien, enfin si, un peu, à introduire des notions importantes pour la formation de nos petits Artistes. Je sais. Désolée. Le 23 sera mieux, OK ? Mais fallait bien que je fasse quelque chose du point de vue de Lyzia.]


De toutes les couleursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant