Nous ne devions pas [EN PAUSE]

Chapitre sept.

Comme promis, Cole m'a payé une pizza. Il a garé la voiture proche du Golden Gate. Comme dans un film, il a voulu que nous montions sur le capot pour manger notre pizza face au pont rouge.

Depuis que la nuit est tombée, il fait encore plus froid. Je resserre mon gros gilet contre moi. Cole s'approche de moi pour passer son bras autour de mes épaules. Je pose ma tête dans le creux de son épaule et ferme les yeux. Est-ce que les premiers rendez-vous se passent toujours de cette façon ? J'ai vraiment l'impression de vivre comme dans un film. Sauf que la réalité en est bien loin et je vais me réveiller dès que j'aurais mis les pieds à la maison.

- Alors demain, tu retournes en cours ? lui demandé-je.

- Comme toi.

- Sauf que tu es à l'université.

- Et tu le seras l'année prochaine.

- Encore faut-il que je trouve quoi faire de ma vie.

- Tu n'en as aucune idée ?

Je secoue négativement la tête. Comment pourrais-je savoir ce que je veux faire ? J'ai l'impression qu'aucun domaine ne m'intéresse. Les seules choses que j'aime faire sont le shopping, manger des pizzas et passer mon temps avec Jacob. Aucun des trois ne peut m'aider à faire carrière pour avoir une belle et merveilleuse vie comme mes parents.

- Est-ce que tu sais quels métiers faisaient tes parents biologiques ?

- Non. Ça devait être un métier qui ne rapportait pas beaucoup d'argent. Je ne dirais pas que nous étions pauvres, mais nous nous serions la ceinture pour vivre.

- Tout l'opposé de tes parents actuels.

- Exactement. Ma mère voudrait que je suive leurs pas et que j'aille à Harvard pour étudier la médecine. Je déteste ça. C'est la chose qui m'attire le moins.

- Et ton frère ?

- Elle lui aurait sûrement conseillé de faire ça aussi s'il n'aimait pas tant le football. J'ai l'impression d'être encore trop jeune pour décider du métier que je veux exercer toute ma vie. J'ai toute la vie devant moi pour trouver quelque chose que j'aime. Pourquoi faut-il se dépêcher à ce point ?

- C'est la vie qui veut ça.

- Tout tourne à cent à l'heure. Il n'y a qu'à aller dans les grandes villes, sur le point le plus haut, durant la nuit pour voir qu'il y a toujours des gens qui ne dorment pas. Ils travaillent sans cesse. Tout ça pourquoi ? Pour se bousiller la santé au travail et ne pas profiter de la vie.

Cole rit. C'est la vérité. Certaines personnes, à l'opposé de mes parents, travaillent toute leur vie pour offrir ce qu'il y a de mieux à leur famille. Ils joignent difficilement les deux bouts pour les faire vivre. C'est à peine s'ils partent en vacances. Et s'ils le font, ils partent généralement dans leur famille, car cela revient moins cher. Ils travaillent jusqu'à arriver à la retraite. Au final, ils profitent quelques mois de leur retraite avant de tomber malade et de décéder. Je sais que mes parents biologiques faisaient partit de ces gens-là, ceux qui ont du mal à rassembler de l'argent.

Mes parents ont tellement d'argent qu'ils ne savent plus quoi en faire. Certes, ils ne sont pas aussi riches que les stars, mais chaque fois que la cagnotte diminue, leurs salaires arrivent pour la renflouer. Je ne dirais pas que je déteste ce mode de vie, mais je ne l'aime pas non plus.

Je lève la tête vers Cole. Encore un étudiant qui doit travailler sur son temps libre pour gagner de l'argent. Ses parents payent l'université. Néanmoins, il doit travailler pour pouvoir s'acheter à manger, se faire des sorties, s'acheter des vêtements. Sans compter l'essence et l'assurance de sa voiture. Il doit également mettre de l'argent de côté pour plus tard.