On Verra Bien - Nekfeu

Cinq

Samedi 1er Avril 2017

Ils me fixaient, sans rien dire. Enfin, ils fixaient plus Pauline que moi. Personne ne disait rien, tout le monde était trop occupé à regarder les autres. Ma fille les regarda et tira sur main, mon attention se dirigea vers elle.

« Maman, on peut rentrer ? » S'ils avaient un doute sur le lien qui m'unissait à Pauline, ils étaient désormais fixés. Ken avait blanchi d'un coup, il était intelligent, il avait compris que la petite était née quelques temps après notre rupture.

C'est Mekra qui se lança. « Elle a dit quoi ? Elle a dit Maman ? » Il s'approcha. « Qu'est-ce que ça veut dire Violaine ? »

J'ouvrais la bouche, mais aucun son ne s'échappa de ma gorge. J'étais incapable de parler et pour être honnête, je ne savais pas trop quoi dire. Je restais silencieuse devant leur regard demandeur d'explications. Après quelques secondes qui me parurent une éternité, Ken s'approcha de nous et s'accroupit devant Pauline.

« Comment tu t'appelles ? » Il demanda avec une voix douce mais hésitante.

« Pauline et toi ? » Elle répondit. Ken engagea la conversation avec elle et moi, j'assistais à cet échange surréel. Ce moment je l'avais rêvé et redouté des millions de fois. Je n'arrivais pas à me faire à l'idée que Ken et Pauline se parlait.

« Dis-moi, Pauline. Tu as quel âge ? » Pauline montra trois de ses doigts et précisa que son demi-anniversaire était dans pas longtemps. Il hocha la tête et se releva vers moi. « Elle a presque trois ans et demi. On s'est séparé il y a quatre ans. Ça veut dire que je suis son pè... »

« Non. » Je l'interrompais. « Je t'interdis de faire comme si tu étais choqué. » Je crachais, furax.

« Comment ça faire semblant ? J'apprends que j'ai une fille qui a quatre ans et je suis censé ne rien dire ? Tu te moques de moi là ? » Il dit sur le même ton que moi.

« Ne fais pas comme si tu n'étais pas au courant. Tu le savais très bien mais tu t'en ais foutu. Alors s'il y en a bien un que se moque de l'autre, c'est bien toi ! » Je criais.

Pauline se mit alors à pleurer. Je la prenais dans mes bras et tentais de la réconforter. Je savais qu'elle n'aimait pas les bruits trop forts et mon altercation avec celui qu'elle ignorait être son père avait dû lui faire peur.

«  Je crois que je ferais mieux de rentrer. Elle est fatiguée et j'ai plus envie de te voir. Au revoir les garçons. » Je ne lui laissais pas le temps de répondre et je me tournais en direction de mon immeuble très rapidement.

Je suis rentrée en furie dans mon appartement et j'ai appelée Héloïse pour me calmer.

« Allo ? » Demanda-t-elle quand elle décrocha.

« Je te jure, je vais péter un câble. » Je disais tout en tournant en rond dans mon salon.

« Ça va Violaine ? Qu'est-ce qu'il y a ? » Elle paraissait inquiète.

« Il y a que Ken et les garçons étaient en bas de chez moi et que cet enfoiré a fait semblant de découvrir qu'il avait une fille. Je te jure que je vais me le faire.» Je balançais tout ce que j'avais sur la conscience.

« Attends quoi ? Les garçons étaient devant chez toi ?» S'exclama ma petite sœur.

« L'autre fois, Mekra m'avait demandé mon adresse parce qu'ils comptaient passer leurs vacances à Lyon. Mais tu sais même pas le pire. Le mec a tapé la discute à Pauline comme ça. Comme si de rien n'était.» J'étais en colère.

« Mais quel abruti. Si je le vois, je lui pète les couilles.» Elle me faisait rire.

« J'en peux plus, j'aurais jamais dû aller à ce concert à la con.» Je disais, quelque peu dépitée.

« Le truc c'est que Pauline l'a vue. Ça m'a fait mal de les voir ensemble. J'arrête pas de me dire qu'il aurait fait un bon père. » Je murmurais la dernière phrase.

« Un bon père ? » S'exclama ma sœur. « Tu penses vraiment que ce connard de Ken qui n'a pas bougé le petit doigt pour ta fille aurait pu être un bon père ? » Elle était outrée de m'entendre dire ça. Je la comprenais mais je me disais que j'aurais dû le lui annoncer en face et tout aurait pu être différent.

Je raccrochais après quelques minutes et m'installais sur le canapé à côté de Pauline qui regardait les dessins-animés. Depuis que j'avais revu Ken au concert, je ne pouvais m'empêcher de voir la ressemblance frappante entre lui et Pauline. On ne pouvait définitivement pas nier leur lien de parenté. Mon téléphone vibra et je répondais.

« Allô ? » Je demandais.

« C'est moi, Mekra. » Dit-il. « Ecoutes, je... Ken est vraiment dans le mal par rapport à Pauline. Comment t'as pu cacher ça ? »

« Attends, tu te fous de moi ? Il était au courant ton pote. Il s'en foutait, il l'a oublié et ça lui ai revenu en pleine gueule. C'est tout. » Je disais, en colère.

« Mais il savait aps. Je te jure. » Dit-il.

« J'en ai marre de ses mytho. Quand il aura accepté qu'il a déconné en me laissant dans la galère, il pourra venir s'excuser. Mais tu lui diras que jamais il pourra avoir MA fille. Salut. » Je raccrochais. J'avais insisté sur le fait que Pauline était ma fille et certainement pas la sienne. Décidément, j'aurais mieux fait de rester dans mon lit ce matin.